Nightwish - Human :II: Nature

Chronique CD album (81:40)

chronique Nightwish - Human :II: Nature

Il est évidemment encore un peu tôt pour l'affirmer, l'année étant loin d'être terminée, mais je pense que je tiens là mon flop 1 de mon futur bilan 2020. Et vraiment, faire grimper un groupe qui fait partie de mon paysage musical depuis mon adolescence à ce genre de place, ça me fend le cœur à un point que vous ne pouvez pas imaginer. Alors évidemment, moult autres chroniques viendront se montrer autrement plus emballées en ce qui concerne ce nouvel album de Nightwish, Human :II: Nature, ils ont peut-être raison d'ailleurs. Et moi-même, je ne peux me résoudre à les flinguer en terme de notation pure et dure : il y a du bon qui ressort de là-dedans à bien des égards et sur certains aspects, comme le travail de production ou les arrangements symphoniques qui n'auront jamais paru aussi subtils et chiadés, on atteint là une forme d'aboutissement sans précédent. Et surtout, dans le fond, avec plus de recul et objectivité, cette galette n'est pas nulle, loin s'en faut. Mais à titre purement personnel, ce nouveau méfait est une véritable déception. Et encore, je reste aujourd'hui plus modérée et sereine : les premières écoutes ne m'ont inspirées que de la colère et du rejet. Maintenant que le temps a passé et que je lui ai laissé moult chances de me montrer ce qu'il pouvait avoir dans le ventre, il ne m'arrive plus dans mes oreilles comme les premières fois qui faisaient vraiment office d'affront.

 

Le bilan est là : mon problème avec ce Human :II: Nature est purement d'ordre personnel car il ne possède pas grand-chose de ce que j'attends d'un album de Nightwish, voire d'un album de metal symphonique tout court d'ailleurs. Point de moments d'epicness, de guitares véritablement mordantes, de variété d'ambiances (à comprendre, du celtique, du celtique et encore du celtique) ni même de joutes/dualité vocales – la voix de Marco Hietala sur cette galette faisant d'ailleurs plus ou moins l'objet d'un avis de recherche – voire même de la moindre mise en perspective du talent de chacun dans leur rôle. A dire vrai, et je joue peut-être ma mauvaise langue et me trompe lourdement dans mes hypothèses, j'ai plus ou moins l'impression que nous avons affaire là à une prise totale de pouvoir de sa tête pensante, Tuomas Hopolainen, qui a été encore plus loin dans son rôle de « petit dictateur » où il serait épaulé par son flûtiste de bras-droit milicien, Troy Donockley, mis en avant comme jamais (sa prestation vocale sur « Harvest » notamment qui me hérisse le poil tel un chat qui défend son bout de territoire). Avoir vu une interview il y a quelques mois de Marco Hietala lors de la promotion de son album solo où il semblait quelque peu fatigué et déboussolé ne fait qu'accentuer ce genre d'hypothèses que la vie interne de Nightwish n'est peut-être pas aussi belle que son succès le laisse à penser en ce moment.

 

A comprendre : « Je n'en fais qu'à ma tête, vous m'obéirez au doigt et à l’œil, je fais mon truc sans que personne ne puisse rien me dire, s'exprimer artistiquement, ni même me suggérer qu'il faille peut-être revoir tel ou tel truc discutable en l'état à cause d'un cruel manque de recul. ». Ce manque de recul amène à l'auto-parodie qui laisse fort tiède tant ça va puiser un peu trop vers des choses déjà faites pour un résultat autrement plus fadasse (« Music » et ses faux airs de « The Poet And The Pendulum » mâtinés aux claviers plus empreints des périodes dorées Oceanborn/Wishmaster ou encore « Noise » qui font tour à tour penser à « Storytime », « Ever Dream » ou « Shudder Before The Beautiful »). On a l'impression d'avoir entendu ça cent fois donc, et pour ces cas précis, même s'ils se laissent écouter, on sait pertinemment qu'ils ne laisseront pas d'empreinte indélébile. De la même manière qu'il s'avère fort dommage de ne pas percevoir à aucun moment le savoir-faire de chacun dans son rôle, donnant clairement l'impression qu'ils ne faisaient que jouer bêtement ce qu'ils devaient jouer. Comme s'il n'était pas important de montrer que l'on sait jouer, encore moins de montrer que l'on aime ce que l'on joue. D'où le fait que le sentiment global qui ressort de cette galette est que le seul talent mis en avant est celui du compositeur. Jamais on ne ressent véritablement de mordant ou de fièvre quelconque – et cela va bien au-delà que Nightwish ait choisi d'enclencher la pédale douce pour partir vers des choses plus progressives et atmosphériques. Et ce, même si de ce seul talent exhibé, il en ressort des moments de toute beauté. Parce qu'on ne va pas cracher dans la soupe, on ne peut que s'extasier d'entendre ces vocalises lyriques de Floor Jansen que l'on ne lui avait plus entendu depuis longtemps en conclusion de « Shoemaker », cette subtile ligne de clavier venant soutenir avec délicatesse la voix de Troy lors du second couplet de « Harvest », le travail des chœurs sur le break de « Pan » ou cette ambiance percussive primitive sur le bien-nommé « Tribal » (le seul titre d'ailleurs qui a attiré mon attention positivement dès la première écoute). Regrettable que tout ceci soit niché au sein d'un ensemble manquant cruellement de relief et d'âme.

 

Voilà pour le premier disque de ce Human :II: Nature qui est en réalité un double album. C'est sur le second disque en revanche que l'on parviendra à se mettre un peu de baume au cœur, quand bien même il s'agit d'un exercice un peu à part puisqu'il s'agit d'un récital symphonique subdivisé en huit parties pour un total dépassant la demi-heure, quasi-exclusivement instrumental. Même si l'on entend Floor Jansen intervenir un peu au début mais surtout en toute fin de course (et de belle manière tant le travail des chœurs et des harmonies sont juste magnifiques !), le reste du groupe n'est donc pas au rendez-vous ici pour amener un peu d'électricité dans l'air. On pensera dans la démarche que ce disque représente un peu ce qu'Epica a pu faire avec The Score en son temps, quand bien même cette pièce ne supporte aucun film ni autre support visuel. Et vraiment, si vous êtes friands de musique classique, dans sa mouvance moderne fortement teintée de folk (on peut autant y trouver un peu de Béla Bartók que de Claude Debussy dans l'esprit) et bien entendu de bandes originales de films (Hans Zimmer, encore et toujours une référence), vous aurez tout intérêt à vous plonger sur ce second disque. Mais là encore, cela pose question et laisse un peu dans l'expectative : même si partir vers ce genre d'ambition paraît cohérent, est-ce réellement du Nightwish pour autant ? Car là, plus encore que sur le disque précédent, la seule chose mise en avant, c'est Tuomas Hopolainen en tant que compositeur (de surcroît, seul). On en viendrait d'ailleurs presque à se demander si ce récital n'était en réalité pas là où voulait réellement nous emmener son géniteur mais s'est finalement ravisé en rajoutant de ce premier disque, histoire de, par simple prétexte de faire jouer le groupe, pour justifier le patronyme de la jaquette.

 

Évidemment, j'insiste que cette bafouille n'est que mon avis personnel qui n'engage que moi. Je n'ai clairement pas adhéré à cette dimension folk atmosphérique qui ampute au registre de Nightwish tout son mordant et caractère épique. Cette évolution expliquant peut-être cette impression tenace de sentir un groupe en roue libre, ne jouant que le rôle de bête de simple exécutant au détriment du feeling d'ailleurs. La tendance que l'on sent depuis Dark Passion Play de s'engouffrer toujours plus vers les ambiances celtiques, ici homogénéisées au maximum, n'était clairement pas dans mes petits papiers tant l'explosion du folk en phénomène de mode m'a quelque peu écœurée de ce type d'ambiances explique aussi sans doute pourquoi les choses bloquent dans mes oreilles. Nul doute que cela parlera à une bonne tranche du public du groupe. Human :II: Nature ralliera sans doute de nouvelles têtes au passages qui se laisseront séduire par ce nouveau parti-pris. Mais il faut reconnaître que cet album saura également laisser une autre partie de sa fan-base sur le carreau. Dommage pour moi, je fais partie de cette dernière catégorie.

photo de Margoth
le 12/05/2020

9 COMMENTAIRES

Julien

Julien le 12/05/2020 à 12:16:50

Tu n'as pas adhéré, tu es déçu, tu as trouvé ça "mollasson", etc.
Mais pourquoi mettre 7 sur 10..
A un moment donné, il faut être un peu cohérent.

Margoth

Margoth le 12/05/2020 à 12:59:58

Peut-on réellement mal noter alors qu'au fond il y a un si bon travail de production, de mise en œuvre avec l'orchestre (sur le second disque)... Tout un tas de choses qui ont représenté un boulot titanesque et excellent dans leur rendu purement technique.

Margoth

Margoth le 12/05/2020 à 13:08:20

Après, j'avoue qu'à la base, noter m'horripile au plus haut point. Un chiffre, ça ne veut rien dire pour des choses liées à l'art et le culturel. Si je file des chiffres, c'est juste parce qu'on me le demande parce qu'apparemment beaucoup ont besoin de ce genre de carotte pour lire.

el gep

el gep le 12/05/2020 à 13:26:28

Moi j'aurais répondu par trois longs paragraphes pour finalement me rendre compte que ça mérite juste un LOL.
Bisous.

Julien

Julien le 13/05/2020 à 11:52:15

Donc si le truc a une grosse production et une bonne mise en oeuvre mais que c'est vide, chiant et sans émotions, tu fous 7? lol!
Donc les disques de Johnny valent 7? Les disques des Kanye West valent 7 aussi? Et le disques de One Direction? 8? Parce que niveau production, c'est top quand même. 

pidji

pidji le 13/05/2020 à 15:35:56

Tu ne chercherais pas un peu la p'tite bête Julien ? 😅

Xuaterc

Xuaterc le 13/05/2020 à 16:25:41

Tiens, ça me rappelle des lyrics de Stupeflip...

"j'avoue qu'à la base, noter m'horripile au plus haut point. Un chiffre, ça ne veut rien dire pour des choses liées à l'art et le culturel." Je suis à 100% d'accord. Je met 20/20 à ton commentaire ;-)

Margoth

Margoth le 14/05/2020 à 10:56:35

Merci Xuxu. D'ailleurs, il me faudra des conseils avisés pour passer mon concours de prof. Paraît qu'il faut maîtriser "l'art" de la notation pour exprimer une opinion, même en tout amateurisme, j'ose espérer qu'on apprend ça au sein de l’Éducation Nationale :P

Rico

Rico le 08/09/2020 à 19:26:52

Après 2 écoutes mon avis est plutôt raccord avec le tien. Ou est la puissance de l'album précédent quo vous emportait et vous laissait avec un sourire béat à la fin ? Par contre ce sont surtout le passages "celtiques" qui ont emporté mon adhésion ici, mais je suis grand fan de ce style.
Après j'attends de voir sur la durée comment va évoluer (ou pas) mon opinion, j'essaie d'être optimiste en me disant qu'il fait partie de ces albums qui nécessitent plusieurs écoutes avant de réussir à saisir le propos et adhérer à l'univers développé.
Mais à ce stade je trouve que ça ressemble beaucoup plus au Life of Scrooge d'Holopainen qu'à un album de Nightwish.

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