SIZ - Blind

Comme tout bon natif des années octantes, j’ai une passion nostalgique limite passéiste pour le rock des années nonantes. Du coup, impossible de ne pas jeter une oreille curieuse sur le projet de Sylvain Palis (TH da Freak, Courtney & The Wolves…) fondé en 2016: Siz. Et mon oreille curieuse est tombée sur Blind qui s’avère être une madeleine fraîche et délicieuse qui rappelle les tenants des hits parades d’il y a 25-30 ans.

Dans l’esprit de l’auditeur, en tout cas dans le mien, les noms ne finissent pas de se bousculer, comme revenant d’un nul part lointain: Lemonheads, Fountains of Wayne, Weezer, My Bloody Valentine, Semisonic, Nada Surf, Nirvana, voire même Sonic Youth… Mais plutôt que de simplement faire penser à ces groupes, Siz nous les remémorent, un genre de tribute à nos jeunes années dans la musique amplifiée parce qu’il faut bien l’avouer, entre nos groupes de métal, nos groupes de hardcore, nos groupes de post-black expérimental, c’est qu’on aurait tendance oublier ces vieilles références qui tournaient en boucle sur les radios et qui nous sauvaient de la R’n’B et de la variétoche de l’époque (qui était au moins aussi intéressante que celle d’aujourd’hui).

Siz, c’est la piqûre de rappel musicale que mêmes les plus anti-vax feraient avec plaisir. Shoegaze, grunge, rock alternatif, post-rock, trippant, mélodique, pop à souhait, folk parfois, saturé mais pas agressif, Siz décline le son rock/pop des années 90 dans ses plus belles nuances, conjugue les styles avec un brio certain, une classe bien réelle et une superbe très rock. Mais leur musique revêt une certaine recherche dans l’écriture ("Ooook") qui apporte un belle dynamique aux structures qui dépassent parfois le classique couplet/refrain/couplet/refrain/pont/couplet/refrain”.

L'album se déroule tranquillement, sans surprise mais c’est tant mieux, on y est bien, c’est confortable sans qu’on s’endorme. Il pourrait presque s'écouter en soirée, entre ami.e.s, l’air de rien, s’il n'y avait pas toutes ces envolées pop, mélodiques, arrangées avec un soin mâtiné de simplicité qui attire l’oreille, suscite la sacro-sainte attention de l’écoute. Siz est une autre preuve qu’il n’est point besoin d'être multi-instrumentaliste pour créer une musique riche: une sensibilité rock bien réelle ("These questions" dont les couplets m’ont fait pensé à du Adrian Belew), de bons riffs, de belles déclinaisons mélodiques, une batterie rock et généreuse, des harmonies bien placées et le tour est joué.

Ajoutons aussi une production sublime, intensément rock mais avec ce petit côté garage/live bien vivant. Le grain des guitares est superbe, les fuzz d'une douceur incroyable, une véritable caresse de distorsion dans les oreilles. La batterie est bien mat, très flat, quasi oldie mais cela apporte une couleur sympa aux rythmiques, presque tribale parfois. Côté voix, c’est plus que sympathique, un petit brin de voix qui dépote, capable de jouer la carte de l’intensité rock comme celle de la finesse pop.

Le groupe réussit indiscutablement à faire du neuf avec du vieux, à dépoussiérer des styles qui ne sont plus aussi attractifs qu’ils ont pu l’être et tient plus que la distance sur ce défi qui s’étale sur 10 pistes parfaitement empreintes de l’esprit du rock des années 90.

Pas de redite, pas de pastiche, de l’hommage tout au plus car Siz fait tout pour développer sa signature et Blind continue d’en tracer les lignes.

On aime bien: du rock biberonné aux années 90 mais plein de fraicheur...

On aime moins: pas grand chose...

8oris

le 17/01/2024