Sun le 31/03/2023, La Camillienne, PARIS

Vous avez déjà assisté à un concert de Metal dans le sous-sol d'une école élémentaire, vous ? Moi non plus, jusqu'à ce concert à La Camillienne, le 31 mars de cette année. Enfin j'exagère un brin : l'établissement fait tout au plus de la garde périscolaire, pour que les jeunes têtes blondes n'errent pas dans la rue ou devant www.hardcore-anal.org en attendant que papa-maman rentrent du boulot. M'enfin ça fait toujours bizarre d'attendre dans une file majoritairement garnie de porteurs de logos Hellfest, Body Count & co, et de devoir régulièrement se pousser pour laisser passer des parents qui viennent récupérer leurs enfants, cartable sur le dos. Tout aussi bizarre cette buvette / vestiaire, façon kermesse de fin d'année, située juste avant l'entrée du lieu des réjouissances, qui propose Fanta, Schweppes, eau minérale, mais pas la moindre binouze, ni même un petit panach' – heureusement qu'un coup de tampon à l'entrée nous permet de nous rendre au mini-Auchan du coin pour siffler une Chouffe entre deux concerts...

Une fois passé le seuil de la salle par contre, on se retrouve dans notre élément, bien que le côté en partie « Pop » de l'évènement colore le public ici rassemblé d'éléments qui rappellent que ce n'est ni Sublime Cadaveric Decomposition, ni Arkhon Infaustus qui sont programmés. On croise cependant des gens tout à fait recommandables, comme ce proche des 6:33 qui tracte pour la première date parisienne où l'on pourra enfin voir Schrödinger.

Mais les festivités du jour s'avèrent autrement métissées, car c'est Sun, précédé d'ODC et Giant Fragments, que l'on est venu voir. Outsiders de la soirée, ces derniers pratiquent un Metal djentophone qui tantôt s'énerve et voit la Harley Quinn derrière le micro envoyer du grunt, tantôt riffe de l'air frais sur fond de chant clair. Alors on mentirait si l'on prétendait que l'attitude du groupe trahit une longue expérience live : les échanges avec le public sont un peu hésitants, tout comme l'occupation de l'espace et les « chorégraphies »... Et puis le son n'est pas aussi léché qu'il le sera par la suite, ce qui ne permet pas forcément de bien comprendre tout ce qui se passe. Malgré tout – y compris des problèmes techniques qui privent l'un des guitaristes de son et ruine la transition entre les deux derniers morceaux – on aura bien apprécié cette compo ponctuellement traversée de sonorités orientales (… non, ne me demandez pas son titre), celle-ci ayant brièvement ravivé notre intérêt (… oui parce que la vérité c'est qu'à de rares exceptions près, la télégraphie Djent, si ça eut émoustillé mes oreilles il fut un temps, ça reste un plaisir que je conjugue au passé antérieur).

Autre formation de nous inconnue, ODC joue un Metal nettement plus accessible, et également plus aguerri. D'ailleurs c'est l'ensemble du groupe qui a l'air plus à l'aise sur scène – exception faite du timide guitariste – le batteur n'ayant qu'une envie c'est d'assurer le show debout, le bassiste respirant la joie d'être là, et la chanteuse ayant clairement travaillé sa prestation, aussi bien vocalement que scénographiquement. À un tel point qu'on pourrait presque le lui reprocher d'ailleurs, les danses, interactions avec ses compères et mimiques ne laissant pas beaucoup de place au naturel ou au lâcher prise, mais ressemblant plus à ces prestations de vieilles gloires orchestrées au poil de cul, aux déplacements millimétrés, où les artistes ne sont plus que des acteurs sans aucune latitude pour improviser... C'est d'autant plus dommage que les morceaux s'écoutent avec plaisir, même quand on n'en connaît aucun, et que Sonny a l'air franchement dans son élément, lui, sans avoir besoin d'en faire des caisses. On retiendra de ce show qu'ODC a clairement tout ce qu'il faut où il faut pour plaire aux fans d'Evanescence, Lacuna Coil (oui, j'ai des références de boomer) et autres groupes péchus mais sans échardes.

Mais forcément, si l'on était là ce soir, c'était avant tout pour Karoline Rose, Bassem, Loris et leur Brutal Pop solaire. Looké mais sans y perdre en naturel, souriant mais sans chercher à présenter le bon profil aux téléobjectifs, le groupe fait passer la soirée à un tout autre niveau. Bénéficiant d'un son aux petits oignons, le show commence comme le premier EP, sur le superbe crescendo de « I Kill My Man ». La messe commence, la tension monte, les zygomatiques démarrent leur ascension. Alors non, n'attendez pas un report léché, une setlist sur papier millimétré : ça fait longtemps que je ne fais plus de concert carnet en main, et que ma mémoire prend des RTT sans préavis. Ce que je peux vous dire c'est que la quasi intégralité des deux EP a été interprétée (… pas de « Princess Erakin », toutefois, il me semble), que les moments forts ont été nombreux et ont évidemment coïncidé avec mes chouchous, dont « Strength », « Golden », « Higher Fire », l'incroyable reprise de Lykke Li «  I Follow Rivers »... Ainsi que le conclusif « John & I (Money) », qui prend un vrai coup de boost en live. À noter parmi les points notables (… vous remarquerez la cohérences de la démarche) la reprise d'Edith Piaf « Jezebel », un speech franco-germain enflammé sur la difficulté d'être un « jeune » Allemand quand les chances sont aussi grandes d'avoir un squelette en tenue de SS dans le placard généalogique, ainsi qu'un extrait complètement irrésistible de l'album à venir, vécu en mode « love at first sight », qu'on brûle de ré-écouter. Autant vous dire qu'après la découverte du groupe au MaMA Festival l'an dernier, effectuée bouche bée et yeux écarquillés, ce round #2 n'a fait que confirmer les bonnes impressions et rendu le lapin plus entiché que jamais de ce brillant soleil. D'ailleurs, pour l'anecdote, la connaissance présente en ces lieus – évoquée en début de papier – qui découvrait Sun à l'occasion de cette date, s'est faite retourner comme une crêpe elle aussi, ce coup de foudre étant logiquement suivi de l'acquisition des 2 EP au stand de merch'.

Les objectifs à venir sont clairs, dorénavant :

1) re-re-voir le groupe sur scène

2) mettre la main sur le premier album dès qu'il sera disponible

3) lancer une pétition pour pousser Karoline à réaliser une cover de « 99 Luftballons » de Nena

Cglaume

le 04/04/2023