Beyond Creation - Earthborn Evolution

Chronique CD album (46:21)

chronique Beyond Creation - Earthborn Evolution

AVERTISSEMENT: ce début de chronique dégage de lourds effluves de nostalgie rance. Lecteur, lectrice, commence au paragraphe suivant si ce genre de discours t’exaspère – nous ne t’en tiendrons pas rigueur…

Il fut un temps où le death technique – alors appelé techno-death – me chatouillait la truffe tout autant, si ce n’est plus, que le nawak metal. Si si, juré-craché. Atheist, Cynic, Nocturnus, Theory in Practice, Sadist, Necrophagist… ‘y avait bon Banania! Sauf qu’entre la liquéfaction du système nerveux de tonton Masvidal, les errances des italiens sadiques, et plus généralement le manque d’actualité sexy, la flamme s'est faite de moins en moins brulante. D’autant que le genre fut bientôt squatté par de nouveaux zigotos plus fans de crocs de boucher que d’atomes avec les miens crochus. Ce furent les gros bras de Spawn of Possession, Origin et autres Decrepit Birth qui commencèrent à jouer à c’est-moi-qu’ai-la-plus-grosse en laissant les amateurs de mélodies sur le bord de la route. Puis ce furent les poulains de l’écurie Sumerian Records (Veil of Maya, Born of Osiris) et leurs potes qui se mirent à suffixer leurs assauts discographiques par "–core" au lieu du traditionnel "–metal".

Donc bof.

Heureusement restaient quand même les Gorod, Arsis et autres Obscura… M’enfin le genre ne m’excitait plus guère en dehors de ces quelques exceptions…

Fin de la parenthèse « Les souvenirs de Tonton Ronchon », retour à l’actualité.

 

Mais voici que l’école canadienne – et plus particulièrement québécoise – fait à nouveau parler d’elle. "A nouveau", car s’il y a quelques années de cela ces contrées nord-américaines avaient une réputation d’excellence en matière de metal extrême chiadé (cf. Martyr, Augury, Cryptopsy, Gorguts, Unexpect, Neuraxis), plus récemment, hormis le retour de Gorguts, c’était devenu le calme plat. Sauf que voilà que nous arrive le 2e album de Beyond Creation, servi sur le plateau d’argent de Season of Mist. Et là autant vous dire que ça va être tournée générale de bière au sirop d’érable et steak de caribou pour tous. Câlice, quel coup de pied au train!

 

Parce qu’Earthborn Evolution c’est de la broderie fine, dense, alambiquée, sombre… Ce qui, si on s'en tenait là, ne signifierait pas forcément que le groupe évolue autre part que dans le domaine du tech-geek metal peu digeste, on est d'accord. D’autant que le groupe n’hésite pas à se la jouer méchamment velu, façon blast’n’growl’n’shriek – Augury n’est pas toujours très loin. Sauf qu’en fait la chose reste fluide, lisible, voire franchement mélodique, accrocheuse, aérée et grandiose. Sur « Sous La Lueur De l’Empereur » ou – de manière encore plus évidente – sur « L’Exorde », le groupe va même explicitement taquiner la muse des bordelais de Gorod. Sans oublier que les amoureux de basse fretless seront aux anges: le fidèle compagnon de Dominic Lapointe (Augury, Atheretic, ex-Quo Vadis) ronronne avec insistance comme le plus moelleux des matous de Sean Malone. On goûte même avec joie à certains solos où la bête est lâchée sans plus aucune contrainte, pour le plus grand plaisir des amateurs de l’exercice. Ceux qui ne jurent que par Focus apprécieront les quelques pauses jazzy disséminées de loin en loin en travers des 10 titres de l’opus, tandis que les francophiles se réjouiront de déchiffrer de temps à autres quelques propos que même leur grand-mère native de Paimpol pourrait saisir.

 

Mais je vous parlais accroche et mélodie, et je ne fais pourtant que rester dans la description évasive et généraliste…

Il ne nous bourrerait pas un peu le mou le cglaume des fois?

 

Pas du tout, non mais eux là, oh! Rien que la triplette ouvrant l’album rabattra le caquet des vils médisants – tout particulièrement le morceau titre, qui fait dans la pure classe. Profondeur, majesté, complexité et évidence entremêlées: ce morceau est une pure merveille de dosage savant, d’élans magnifiques, d’intelligence et d’ambition couronnée de succès. La suite reste d’un niveau élevé – bien qu’un peu moins marquant pour ceux qui préfèrent l’impact d’un morceau bien ficelé aux étincelles de musiciens d’exception – mais les frissons de plaisir ne reprennent véritablement que sur le trio final, entre le très Gorodien « L’Exorde », le long « Theatrical Delirium » qui plonge dans le divin à mi-parcours (3:28) à l’occasion d’un miroitement foisonnant où guitare et basse deviennent fourmilière grouillante et merveilleuse, et un « Fundamental Process » final plus porté sur les atmosphères caressantes mais puissantes que sur la branlette indigeste.

 

Ça fait plaisir, Tabernac’!

 

Si vous aimez que votre death technique fasse plus dans le finement progressif que dans les BPMs en folie, si vous préférez Atheist à Origin, si pour vous les ambiances et les mélodies priment sur les exploits techniques, et si le qualificatif « alambiqué » n’est mélioratif qu’adjoint à « équilibré », alors Beyond Creation fera remonter les commissures de vos lèvres à des altitudes où elles n’avaient plus grimpé depuis un bail.

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: une basse fretless qui fait des œillades à Cynic, d’occasionnels faux airs de Gorod – en plus velu et moins groovy tout de même –, de la dentelle qui ne sacrifie pas systématiquement le feeling sur l’autel de la branlette: avec Earthborn Evolution, Beyond Creation fait méchamment du pied aux fans de death technique que les brutasseries inhumaines fatiguent et que les coreries rebutent.

photo de Cglaume
le 27/10/2014

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