Carcariass - Afterworld

Chronique CD album (53:39)

chronique Carcariass - Afterworld

Pour sa 6e virée discographique, Carcariass nous emmène dans le « Monde d’après ». Et vu la pochette dont l’album est affublé, le futur qu’il nous prédit ressemble plus aux vacances de Poutine à Kharkiv, à une place de la Bastille post-suppression du SMIC adoptée par 49.3, ou à la description du Dubaï de 2040 par les experts du GIEC, qu’au jardinet choupinou au sein duquel vous espérez passer votre retraite. Les vétérans du Tech-Death hexagonal se seraient-ils convertis à l’Apocalyptic War Metal ? Que nenni. Vous vous rappelez Planet Chaos, le précédent menu proposé en 2019 par les maîtres queux bisontins ? Eh bien 4 ans plus tard la carte n’a pas fondamentalement changé. Ni au niveau des ingrédients, ni au niveau de la cuisson.

 

Mais peut-être ne vous rappelez-vous plus trop les détails du Quoi ni du Comment de l’album précédent ? Parce que, c’est vrai, vous avez depuis confié des semaines et des semaines de votre vie à Netflix, et sacrifié des Téra et des Téraoctets de matière grise sur l’autel des Vignerons indépendants. Pas d’inquiétude : CoreAndCo va vous aider à rebooter vos neurones à grands coups de flashbacks. Ça se passe juste au-dessous, il suffit d'enjamber le blanc qui vous sépare du paragraphe suivant.

 

Rappelez-vous : la spécialité de Carcariass – depuis un bail qui doit remonter à l’adolescence de Nathalie, ou pas loin – c’est un Tech-Death mesuré, taillé à échelle humaine, accessible, mélodique, narratif – cette dernière caractéristique n’étant pas due à un frontman à la voix chaude et sensuelle, mais à la fluidité et la limpidité de compos dont beaucoup sont purement instrumentales. Chez nos amis les tempos sont tempérés plutôt qu’enfiévrés, la voie est largement dégagée (pas de ces ronces dissonantes dont d'autres raffolent, bien qu'elles finissent toujours par nous égratigner les oreilles), et les interventions solos ne servent pas qu’à soutirer des « Ouawh, mate le nombre de doigts !! » au public, mais bien à équilibrer la trame musicale.

Rappelez-vous, bis : alors même que le monde se découvrait un intérêt soudain pour la vie et les mœurs des pangolins, Raphaël Couturier, Pascal Lanquetin et Bertrand Simonin décidaient que ce serait peut-être le moment de remplacer la quatrième roue du carcarr[i]osse par un chanteur tout entier dédié à cette seule tâche : et bam, Jérôme Thomas se voyait confier la garde du micro. Et puis tant qu’à aérer un peu la salle de répète, le groupe s’était décidé à confier ses décibels à Drop (Sybreed, Samael) pour l’enregistrement et le mix, puis à Jens Bogren pour le mastering of the lord. Or devinez quoi : les trois lascars sont toujours fidèles aux postes, 4 ans plus tard. Pas étonnant, dès lors, que les saveurs n’aient pas changé du tout au tout…

 

Mais attendez, ce n’est pas tout.

 

Peut-être vous souvenez-vous également que des claviers s’étaient invités sur Planet Chaos, ostensiblement sur les intros et plus discrètement intra-muros, afin de renforcer le côté « Cyber-dystopie & Espaces infinis » ? Eh bien sur Afterworld, rebelote ! À vrai dire la seule différence véritablement notable entre les deux opus, c’est la quantité des fameux instrumentaux qu’on évoquait plus haut : leur part de marché est passé de 50% à 25% de la tracklist, les seuls représentants de leur espèce étant cette fois « Fall of an Empire » et « Afterworld », présents respectivement à la mi-temps (#5) et à l’entrée des vestiaires (#10) de ce 6e match.

 

Mais évoquons une dernière symétrie quasi-parfaite entre Afterworld DuponT et Planet Chaos DuponD : une certaine ambivalence. D'un côté, celle-ci se manifeste par la présence de titres sans aspérité, sans brusquerie, sans grosses tartes riffées dans la gueule (pour la cuvée 2023 on parle des deux instrumentaux, ainsi que d'un « Angst » un peu goth sur les bords), dont le moelleux tiède m'avait conduit, il y a 4 ans, à parler de « Tech-Death en pantoufles ». C'est clair que ce ne sont pas des titres à écouter quand on a entassé 100 grammes de pâté de tête, une énorme plâtrée de choucroute, une belle part de Roquefort, un quart d'Opéra et une pleine bouteille de pif dans son estomac, car ce ne sont pas eux qui éviteront les ronflements de venir rapidement rythmer la digestion. À l'extrême opposé par contre, à la différence d'E-xtinction, les deux derniers albums proposent l'un comme l'autre de vrais petits tubes, de ceux qu'on réclame au moment des rappels s'ils n'ont pas eu les honneurs de la setlist principale. Parmi eux citons tout d'abord le porte-étendard « No Aftermath », à la démarche gaillarde, décidée, qui franchit les nuages d'astéroïdes avec aplomb et détermination. Le lumineux « Identity », qui commence en suivant les pas de Devin Townsend, avant de rentrer dans une épique boucle mélodique avec la magistrale décontraction d'un Joe Satriani de l'« extrême ». « Generational Rot » encore, qui démarre comme du Def Leppard de stade, avant d'ouvrir grand les fenêtres sur de vastes paysages spatiaux. Et enfin « The Hive », morceau plus venteux, plus offensif, taillé court et musclé, idéal pour booster le fantassin hésitant ou le jogger fatigué.

Et même s'ils n'ont pas été cités dans cette shortlist, le riffing solaire déployé sur « Billions of Suns », le tapping continu de « Black Rain » et le souffle épique d'un « Machine Kult » – dans lequel on retrouve des saveurs rappelant S.U.P. – en font également des pièces de choix.

 

« Allez, allez, on ne va pas rester ici toute le nuit : il faut conclure Monsieur ! »

 

Aftermath s'avère donc une bénédiction pour ceux qui avaient été convaincus par Planet Chaos, ainsi que – corollaire logique – pour l’ensemble de la Tech-Deathosphère. On regrettera juste que, par-delà nos frontières, la sortie parallèle du dernier Gorod risque, cette fois encore, de masquer celle de la bande à Raphaël, la France qui riffe dans la dentelle étant trop souvent résumée aux Bordelais – et leurs frangins d’Exocrine – ainsi qu’à Fractal Universe... Alors que bon sang : Carcariass était là avant, et il continue album après album de remplir notre ciel métallique d’étoiles scintillantes ! Espérons que les têtes vont enfin commencer à se tourner sur leur passage, et qu'ils n’auront pas à attendre le monde d’après pour enfin récolter les fruits de leur luxuriant verger discographique !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: Aftermath ? Planet Chaos II, la revanche ! C'est-un-peu-court-jeune-homme, oui, je sais. Et réducteur aussi. Sauf que l'album de 2019 était foutrement bien, et que le petit nouveau l'est tout autant, pour exactement les mêmes raisons. Alors vous reprendrez bien de ce Tech-Death spatial, particulièrement accessible et mélodique, d'autant qu'il revient avec certains morceaux méritant largement leur place dans le best of du groupe.

photo de Cglaume
le 11/05/2023

2 COMMENTAIRES

8oris

8oris le 11/05/2023 à 14:17:08

" récolter les fruits de leur luxuriant verger discographique "...La vache, c'est beau!

cglaume

cglaume le 11/05/2023 à 17:15:59

☺️☺️🥰

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