Pestifer - Expanding Oblivion

Chronique CD album (45:04)

chronique Pestifer - Expanding Oblivion

En ces heures où les virus galopent en première page des journaux et où se multiplient mesures de confinement et peur du voisin qui se mouche (… enfin je dis ça mais à tous les coups Pidji va mettre cette chro en ligne quand la Corona sera enfin redevenue une bière comme les autres), il parait tout indiqué d’évoquer un groupe au nom sentant bon le bubon et les humeurs malignes: Pestifer. Quoique dans les faits, Expanding Oblivion – son 3e album – n’ait pas grand-chose à voir avec la rugosité old school de Leprosy ou de Contamination Rises (No Return). Non, au pus et aux plaies malodorantes du Death « classique », les Belges préfèrent la dentelle et les algorithmes du Tech-Death.

 

« Du Tech-Death avec une pochette typée SF? Laissez-moi sortir mes albums de Nocturnus, le Spheres de Pestilence, et la discographie complète de Vektor et Voivod, qu’on se fasse un bon petit gueuleton de riffs alambiqués et de structures fractales entre nerds mélomanes avertis… »

 

Si vous voulez coller au plus près au registre de Pestifer, il va falloir également retrouver vos vieux Atheist, Focus de Cynic, et pour vraiment avoir les maux de tête qui vont bien après de longues séances de tortillons sinueux, les tables des lois selon Martyr. Parce que l’une des caractéristiques du groupe – le « problème » écrirais-je, si je n’essayais pas de garder un semblant d’objectivité – est qu’il apprécie tout particulièrement les parties de cache-cache, les détours vicieux, les approches lancinantes et les pelotes de notes toutes emberlificotées. Ah ça Pestifer est clairement plus Prog que Punk! Ce qui n’est pas forcément un problème: on sait apprécier la sophistication et les jolis drapés de ce côté-ci de l’écran. Malheureusement le groupe des frères Gustin a le tortillon un peu trop souvent maladif, l’hésitation un peu trop fréquente: bref il pratique plus souvent le coïtus frustratus qu’il n’envoie la purée!

 

Si Expanding Oblivion a atterri entre nos oreilles, c’est que quelques posts Facebook provenant de sources fiables se sont bruyamment réjouis de la qualité de ce nouvel album. Et puis n’oublions pas que – gage de qualité s’il en est – le groupe avait réussi à placer le titre « Sleepless Century » sur le tout premier volume de la compilation Combat Nasal. Mais il est vrai que, déjà à l’époque, j’avais eu un peu de mal à digérer l’assaut – je m’en étonnais d’ailleurs dans la chronique de ladite compil’, étant habituellement plutôt client de l’exercice. Malheureusement, 9 ans plus tard, le sentiment se confirme: pour apprécier Pestifer il faut aimer les attaques en crabe, les déhanchés improbables et la technique qui biaise. Parce qu’en dehors d’une fin de morceau joliment vitaminée, un titre comme « Swallower of Worlds » n’est qu’inconfort et mélodies difformes. « Silent Spheres » prend un angle d’attaque plus Morbid Angelien, mais pour emprunter au Grand Ancien sa capacité à rendre la noirceur houleuse et contorsionnée. Quant à « Grey Hosts », toute sa première moitié semble être destinée à mettre en musique la sensation sourde et lancinante d’un début de carie. Et j’arrête là sans trop insister sur le peu d’intérêt des 3 interludes insérés entre les séances de riffing broussailleux, la pauvre ambulance étant déjà toute criblée de balles.

 

Mais il serait injuste de s’en tenir là, car:

  • si elles ne sont pas toujours très lisibles, les compositions du groupe n’en sont pas moins expertement alambiquées
  • contrairement à ce qui pourrait avoir été sournoisement suggéré plus haut, Pestifer sait lâcher les chiens de temps à autre, via de bonnes petites accélérations Thrash
  • l’album contient quelques belles petites réussites, parmi lesquelles « The Remedy », le très bon « Ominous Wanderers » – qui lorgne en partie vers le Chuck Schuldiner des derniers albums de Death et propose de belles petites explosions jouissives –, et plus encore « Fractal Sentinels » dont la mélodie Voivodienne est aussi tordue que sexy (… dommage que la compo se perde un peu en chemin)

 

Expanding Oblivion est donc destiné à un public exigeant, qui préfère avoir les neurones excités que la nuque échauffée, et pour qui la sophistication doit forcément avoir un côté retors. Plutôt piment-oiseau et gingembre dans le mojito, donc, que bière belge bien fraîche. Ou si ça vous parle plus, plutôt pinces à linge sur le scrotum qu’huile de massage dans le bas du dos. Aïe!

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: Expanding Oblivion, le 3e album de Pestifer, est un monument de contorsion Tech-Death. Plus Martyr que Death, plus sinueux que pleinement mélodique, l’album demande qu’on adhère tout autant à la SF qu’au SM. J’avoue avoir un peu de mal avec ce trop plein de contorsions grimaçantes (d’où la note), mais l’album trouvera sans mal son public.

 

photo de Cglaume
le 19/03/2020

1 COMMENTAIRE

pidji

pidji le 19/03/2020 à 08:42:01

Même pas, le corona est toujours bel et bien là :D

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