Concrete Age - Bardo Thodol

Chronique CD album (41:42)

chronique Concrete Age - Bardo Thodol

Tu portes une veste à patches, un grand sac à dos bourré de poches et de sangles, ainsi qu’une casquette « Guide du Routard » ? Tu es donc le genre de personne qui pourrait finir avec le logo de Concrete Age tatoué sur le mollet. Parce que les zigs dont l’échoppe musicale arbore ce patronyme en guise d'enseigne ne tiennent pas qu’un magasin de gros son : ils font aussi agence de voyage. Et sur Bardo Thodol – leur 8e album crénom, j’ai vraiment dormi tout ce temps ? –, si le titre évoque les hauteurs du Tibet et le cycle des réincarnations chers aux bouddhistes, les 10 pistes qui défilent nous proposent bien d’autres destinations : l’Europe centrale, le Moyen Orient, l’Océanie… Cet album, comment vous dire : c’est J’irai Dormir chez Vous, mais agrémenté de grunts et du suave parfum des pissotières du Hellfest.

 

Mais commençons par resituer l’action, parce que si l’on ne sait pas d’où l’on part, on n’est pas vraiment sûr de là où l'on va arriver. Figurez-vous que les hérauts de l’Âge de Béton sont russes, mais oui. On connait origines ayant plus le vent en poupe ces derniers temps… Peu de chance, donc, qu’ils gagnent l’Eurovision du Metal cette année. Sauf que nos loulous se sont relocalisés à Londres à l’automne 2014, et n’ont donc pas eu à abandonner temporairement la troupe des fans de Slayer pour le groupe Wagner.

 

« Des Russes en guise de guides globe-trotters ? Et pourquoi pas des Touaregs commerciaux pour les piscines Desjoyaux ? » vous demandez-vous, êtres pleins d’a priori que vous êtes. Oui, parfaitement : Concrete Age est une formation mondialiste et poly-folklorophile. Cette appétence trouve peut-être son origine dans la ville où Moroz, le guitariste / chanteur / leader du groupe, a passé une partie de ses tendres années : Mineralnie Vody, bourgade située à mi-chemin de la Mer Noire et de la Mer Caspienne, à même pas 300 bornes au nord de la Turquie. On est donc loin, a priori, de la caricature du blond à mâchoire carrée faisant des pompes torse-poil par -40° au soleil et +40° dans le verre... Cette localisation au carrefour de l’Europe, de l’Asie et de la péninsule arabique a dû stimuler la curiosité géographico-musicale du bonhomme. D’où la débauche d’influences et d’instruments divers (shamisen japonais, oud turc, fujara slovaque, didgeridoo aborigène…) caractérisant ce réjouissant opus.

 

Maintenant que vous avez le contexte, passons à présent aux faits. Côté guitares qui meulent, nos gaillards sont fans de Thrash, de Death, de Thrash/Death, de Groove Thrash, et de Black, aussi, un peu. Tandis que côté folklores & danses en espadrilles, les sonorités qui reviennent le plus souvent dans les compos de Bardo Thodol dégagent des saveurs de thé à la menthe et diffusent des ambiances de mariages kusturiciens. Bilan des courses ? On a l’impression d’assister à une partouze débridée où ceux qui râlent le plus fort sont Orphaned Land, Dew-Sented, le Sepultura tout-rouge-tout-fâché en pagne de Roots, ainsi que Dirty Shirt. À noter qu’on entend aussi assez clairement du Arch Enemy période Angela Gossow sur « True Believer », et qu’on a parfois l’impression de faire un bout de chemin en compagnie des zinzin-diens de Bloodywood.

 

« Tous ces binious et ces tamtams, ça doit ressembler plus à la Fête au Village-Monde qu’à un World Mad Max, non ? C’est pas un tantinet trop choupinou votre histoire ? »

 

Vous seriez étonnés : ça tabasse dru. Comme pour rappeler que les peuples de Gaïa n’ont pas que le soleil et l’amour en commun, mais également les catastrophes naturelles et les Fêtes des voisins qui se terminent en bains de sang. D’où, par exemple, le solo incroyablement speedé qui démarre à 1:38 sur « Lullaby for a Deadman », puis l’implacable tempête Black Metal qui suit dès 2:07. Ou la rouste sévère qu’on se prend à 1:05 sur « Threads of Fate », le tempo accélérant encore d'un cran au bout de 10 secondes !

 

Alors oui, on peut entendre certains reproches pas complètement injustifiés. Car une oreille inquisitrice glanant quelques infos via une écoute superficielle trouvera 1) que ça mange un peu à tous les râteliers 2) que ce Tour du Monde en 80 bleuargls se fait dans le bus d’une prod’ bien grosse, bien propre, bien élevée, alors que d’aucuns auraient pu préférer un gros son plus roots, les-pieds-nus-dans-la-poussière. Certes. De toutes manières, quand on cherche matière à ronchonner, on trouve toujours. Personnellement j’objecterai aux grognons que mieux vaut de gros tubes enfiévrés sous cellophane que des titres génériques moulés à la louche artisanale. Et des morceaux qui envoient du bois et mettent le feu à ta cheminée, ‘y en a une sélection de choix, ici. Toute la tracklist pourrait y passer, mais j’avoue en pincer prioritairement pour une petite poignée plus particulièrement punchy. Pour un « Purity » tout vénère, actif des percus, à la mélodie orientalo-DirtyShirtienne extrêmement contagieuse. Pour le break Thrash joliment ciselé, à 2:10 sur « Threads of Fate », ainsi que la Folk Party qui déboule juste derrière. Pour « Lullaby for a Deadman » et son accroche constante qui n’empêche pas des volées de bois vert hyper cinglantes. Mais aussi pour ce « Bezdna ot ludost » instrumental aussi technique que cosmopolite, qui conclut idéalement le périple. Et j’en oublierais presque le petit clin d‘œil à AC/DC balancé vers la fin de « Thunderland », au milieu d’un concert de sonorités indigènes pincées.

 

Oui, vous avez bien compris de quoi il retourne : Bardo Thodol est clairement l’un des tout premiers candidats au Top 2023.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: que peut bien proposer Concret Age sur Bardo Thodol, en sachant qu’il s’agit du 8e album de Russes réfugiés à Londres ? Rien d’évident, mais du foutrement bonnard : un melting-pot « World Metal extrême » réunissant sous un même chapiteau bouillonnant de cosmopolitisme fiévreux Orphaned Land, Dew-Scented, Dirty Shirt et le Sepultura de Roots… Tuerie !

photo de Cglaume
le 24/03/2023

8 COMMENTAIRES

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 24/03/2023 à 12:27:37

J'ai lu "bouddhistes" et j'ai vomi. Désolé je vais nettoyer et écouter.

cglaume

cglaume le 24/03/2023 à 17:22:26

Tu dis ça parce que tu trouves que ta dernière réincarnation est particulièrement foirée ?? 🤣🤣🤣😜😉

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 24/03/2023 à 17:48:07

J'ai 6 pattes et squatte les tas de fumier : tu trouves ça cool toi ?

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 24/03/2023 à 17:52:14

Pouyagaaaa, comment il déboite le premier morceau !

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 24/03/2023 à 18:47:20

un « Purity » tout vénère : oh oui !

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 24/03/2023 à 18:58:34

C'est assez énorme, "ton groupe" là Lapinou : et tu as tout raconté. Sur le papier ça pourrait être mignon mais les mecs tabassent aucun sans répit. Le chant, pour une fois, est parfait.  "True Believer" est juste un gros massacre. Les mecs ont pigé qu'ils allaient joué le skeud en Live et que sur les planches, il faut du GROS BOUZIN. Pour ce type d'exercice, le prod parfumée est parfaite.

cglaume

cglaume le 24/03/2023 à 19:43:05

Reste plus qu’à espérer que tout ça puisse s’agiter sur des planches pas trop loin du clapier 🤘🤞

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 24/03/2023 à 21:12:59

"aucun sans répit "? Yoda j'ai causé.

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