Cryptosis - Bionic Swarm
Chronique CD album (37:11)

- Style
Techno Thrash spatial - Label(s)
Century Media - Date de sortie
26 mars 2021
écouter "Death Technology"
Quand Dr Jekyll devient Mr Hyde, c’est pour remplacer la médecine douce par de généreuses saignées.
Quand Gordan devient X-Or (en 5 centièmes de seconde, la classe !), c’est pour botter le cul des C-Rex plutôt que de cravacher ses chevaux.
Quand un candidat devient président, c’est pour abandonner les préliminaires et nous la mettre bien profond.
Dans la vie, les changements, quels qu’ils soient, ne sont jamais anodins. Alors quand Distillator décide de devenir Cryptosis en 2020, après 7 ans et deux albums à faire chauffer les alambics d’un Thrash canal historique, ce n’est pas pour ouvrir un magasin de patches à l’effigie de Kreator. Non, le confinement est passé par là, donnant aux Néerlandais des envies d’ailleurs, de plus loin, de plus beau. Marre des canettes de bière vides empilées dans un appart’-prison qu’on ne quitte brièvement que pour aller chercher du PQ et des canettes pleines. Le trio a soif d’horizons lointains, de profondeur, d’étoiles dans son ciel comme dans les yeux de ses fans. Il décide donc de suivre une voie plus exigeante, plus technique, mais aussi plus progressive, et de dédier ses riffs au parcours des espaces intersidéraux plutôt qu’aux kickflips en bas de son immeuble.
Et en moins de temps qu’il n’en faut pour dire cornofulgure, bam : Bionic Swarm s’essuyait les pieds sur le paillasson avant d’entrer dans nos vies.
Alors coupons court au débat : oui, ces cavalcades enfiévrées autour de l’Etoile Noire, ces protestations aigres dérapant parfois dans les aigus, ces sauts quantiques que réalisent parfois les compos : il est évident qu’on pense plus d’une fois à Vektor. Et ce d’autant plus naturellement que les deux groupes ont organisé un jumelage Pays-Bas/USA le temps du split Transmissions of Chaos – sortie dont nous vous avions partiellement parlée en décortiquant la face américaine de l’objet. D’ailleurs les deux titres utilisés pour l’occasion se retrouvent sur le présent album, l’ébouriffant « Decypher » étant le premier vrai morceau de celui-ci. Et quel morceau, quelle fougue, quelle belle plongée dans les confins du Cosmothrash ! Mais tout comme le grand-frère vectoriel – qui n’était pas parti, loin de là, d’une copie blanche – c’est avant tout à Voivod que le trio batave voue un culte. C’est du moins l’impression que laisse « Death Technology » (une référence à peine voilée à Killing Technology ?), son ambiance de tragédie spatiale, et son break monstrueux, à 0:27, qui fait bien sentir que, eh merde, il aurait peut-être mieux valu ne pas l’ouvrir, ce SAS marqué d’un signe rouge « Danger ».
Mais Cryptosis ne se contente pas de faire une fixette sur le bébé de Michel Langevin et Denis Bélanger. Par le passé, quand son nom sentait encore la vieille gnôle de papy, le groupe a montré qu’il avait grandi en écoutant bien d’autres disques. Et l’on n’est donc pas étonné qu’à 2:41 « Death Technology » laisse soudainement la guitare hoqueter en mode Pantera. Ni que dans les moments où la véhémence atteint des sommets – en l’occurrence sur « Transcendence » – le chant ainsi que quelques ambiances rappellent le Spiritual Healing de Death (… notamment sur le refrain). Plus loin, dans un registre plus en phase avec sa nationalité et ses aspirations technico-spatiales, on croit voir en « Mindscape » un clin d’œil au Pestilence de Spheres (remember « Mind Reflections » ?), le morceau s’avérant plus progressif, plus ambiant, et le micro semblant parfois tomber entre les mains de Patrick Mameli.
Entre Thrash technique ayant à la fois de la classe et du chien (« Game of Souls » et son déhanché maladif mais merveilleusement groovy), space operas nerveux à la narration alambiquée (« Conjuring The Egoist ») et sombres errances en travers de champs d’astéroïdes (« Prospect of Immortality »), Bionic Swarm est donc de ces albums exigeants mais sexy comme on n’en croise que trop peu, qui savent tout à la fois remuer bien fort le shaker, manier avec une dextérité létale le scalpel-laser, et poser des ambiances duveteuses (à grand renfort de mellotron). On ne saurait trop conseiller à ceux qui ont mouillé leur liquette à l’écoute du dernier Paranom de tenter également de se mettre à la cryptosiphilie. Quant à nous, il va à présent falloir swarmer de patience afin de voir si le groupe saura conserver ces hauts standards qualitatifs au moment de livrer un successeur – un Empire Crypto-Attaque ? – à cette impressionnante première bataille spatiale !
La chronique, version courte: acéré, alambiqué, astéro-haché, le Thrash de Cryptosis est à la fois technique, progressif et spatial. On pense bien évidemment à Vektor à l’écoute de Bionic Swarm (les deux groupes ont partagé un split il y a quelques mois), mais pas seulement. A Pestilence aussi (cf. Spheres), à Death un peu. Mais plutôt que de penser, l’activité pertinente à l’écoute de ces 10 titres consiste plutôt à se déconnecter, à décoller… et à kiffer !
2 COMMENTAIRES
korbendallas le 19/10/2022 à 17:00:07
Très bon ce Cryptosis ! Je le trouve même meilleur que Vektor, qui pour moi est trop "branlette" de manche, donc saoulant quoi :)
Et ce "Death technology", quel titre, un groove imparable, entre Voivod et Megadeth ...
A suivre !
cglaume le 19/10/2022 à 19:25:35
Yes, on espère une suite !!!
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