Human Vacuum - Enter The Playground

Chronique mp3 (59:45)

chronique Human Vacuum - Enter The Playground

La vérité, c’est qu’initialement je n’avais aucune envie de consacrer à Enter The Playground la grosse douzaine d’écoutes minimum nécessaire à l’écriture d’une chronique honnête. Parce que dessus, il était écrit en grosses lettres: NEO. Beuark!! Bah oui: à l’époque où Korn, Deftones, Limp Bizkit et consorts faisaient guincher de pleins stades habillés aux couleurs d’Adidas, les amateurs des prods signées C. Richardson, S. Burns ou T. Skogsberg – dont je faisais donc partie – considéraient cette engeance avec le même peu d'estime que le métalleux du XXIe siècle juge les groupes de crabcore ou de deathcore. M’enfin sachant que Baptiste Bertrand de öOoOoOoOoOo (ou si vous préférez: de Chenille) se charge de tenir le manche de ce drôle d’avion, et ayant eu vent d’un featuring affriolant (Asphodel, ex-Pin-Up Went Down, öOoOoOoOoOo), je jetai quand même une oreille curieuse à « Tout s’efface », titre où, justement, apparait Mamz’elle Aspho…

 

Et là: Plouf!

 

« Plouf! » dans le sens de « Flop! ». Coup d'épée élimée dans l'eau saumâtre. Parce que non seulement ce titre nous accueille avec certains de ces égosillements de "néolescent" pré-pubère typiques du genre, mais surtout parce que la suite, plus (...trop!) posée, fait dans le metal introspectif, sérieux, émo, « profond »… Bien trop guindé, en somme, par rapport à mes attentes d’alors.

 

Donc non: il n’y aurait pas de chro cglaumienne de Enter The Playground... Et p'is c'est tout!

 

Et puis l’album a été proposé en écoute libre sur Bandcamp. Et puis certains de ces VRP de chez Dyson, croisés à l'occasion d'un concert de Psykup, sont revenus à la charge. Et puis le concert en question a été une bonne occasion de se souvenir que, dans le grand sac à dos « Néo », les gens rangent tout et n’importe quoi. Y compris toute une frange de la scène fusion, assez fertile à l’époque – System Of A Down, Psykup justement, Rage Against The Machine... Et d’ailleurs les Human Vacuum sont les premiers à dire qu'ils ne rendent pas uniquement hommage au « simple nü metal », mais plus largement au metal en vogue dans les années 90s / début des 00s.

 

Du coup – bordel – j’ai sacrément bien fait de revenir sur mon avis! Parce que si, en effet, le groupe adopte parfois un ton assez grave, concerné – bref sérieusement sérieux – comme sur le fameux « Tout s’efface », un « The Void Ahead » pas franchement pétillant, ou encore « Les gens qui parlent seuls » et ses textes à cheval entre sociétal et personnel, le reste est nettement plus osé, plus punchy, voire plus barré. Car, certes, Human Vacuum aime cette scène et use grassement de ses gimmicks (et vas-y que ça jumpe-the-fuck-up, et vas-y que ça cause dans le haut-parleur, et vas-y que ça rape affreux mage…), mais il sait également quand s’en moquer affectueusement… Et que ne pas se prendre la tête est la première des règles pour réussir une fiesta entre potes et emporter l’adhésion générale. Du coup les textes des chansons font régulièrement dans le pied-de-nez ou le n’importe-quoi joyeux (cf. « Interlude – HV Indahouse », la traduction au pied du mot de la lettre du « The Truth » de Biskuit Mou, la caricature Biactol de « Néo », les 3 phases successives de « Outro »…), les injections de parties ragga / reggae / ska reviennent régulièrement nous réchauffer le parasol, tout ça culminant parfois dans des pics quasi-nawak (paf, la fin de « The Grain »). Et puis ‘y a bon les chœurs sacrés ouvrant « Unicorns Represent », le scratch Mordredien de « Les gens qui parlent seuls » ou encore les petites touches hispano de la guitare de Baptiste…

 

Tiens d’ailleurs, puisqu’on en parle: si l’album fonctionne aussi bien, si les morceaux nous percent aussi irrésistiblement la carapace, c’est bien sûr en partie grâce à cette démarche décontractée, convaincue et énergique, mais également – voire surtout – grâce à la pertinence de la guitare de M. Bertrand. Oh le gugusse ne nous en colle pas plein la tronche, mais ses parties ne sont quasiment jamais aussi basiques qu’on pourrait l’attendre en pensant « nü »: entre de petites pointes d’originalité à la Tom Morello, l’utilisation d’un écho chevrotant qui rappelle parfois les élans aériens de U2, et de multiples coquetteries et variations de ton et d’intensité toujours bien senties, le lascar réussit à transformer des morceaux qui ne pourraient être que « sympatochement dans la moyenne, encouragements-du-jury » en de vraies petites réussites, comme l’excellent morceau-titre et son riff d’intro qui donne méchamment faim, « Unicorns Reprensent » plus puissant et pourtant plus caressant que ses voisins de tracklist, « Bienvenue » qui nous ramène à l’époque du Peuh! de Lofofora, ou encore le très bon « The Grain ».

 

Alors certes, Enter The Playground est un 1er album, et cela peut s’entendre à l'occasion de certaines approximations (au niveau du chant clair notamment, voire – plus rarement – au niveau des guitares, comme lors de l’épisode « twin » sur la 2e moitié de « Unicorns Represent »). Mais la vérité c’est que j’ai globalement pris mon pied en compagnie de ces joyeux loustics. Et je dois dire que s’ils décidaient de se la jouer encore plus ouvertement fusion – voire nawak!! – sur leur 2nd album, je serais à 200% derrière eux! 'fin j'me comprends…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: sur Enter The Playground, Human Vacuum nous rejoue le metal de ses années collège en revisitant – tantôt dans la révérence, souvent dans la déconne joyeuse – la scène nü metal, mais également la bonne vieille fusion de ces années fastes (Psykup, SOAD). Armé d’un guitare pertinente, d’un chant polymorphe et d’une bonne humeur confinant parfois au nawak franc du collier, les parisiens ont réussi à convaincre un vieux neophobe comme moi: putain d’exploit!

photo de Cglaume
le 24/04/2015

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