Hyro The Hero - Bound For Glory

« À la Recherche de la Nouvelle Star du Rap Metal », saison 2023.

Vous avez été aguichés, puis déçus par les biscotos gonflés à l’hélium d’HourHouse ?

Vous avez mis vos derniers espoirs dans le prochain Hyro the Hero, teasés comme jamais par le très prometteur EP Worst Behaviour ?

Eh bien préparez-vous à vivre la vie d’un fan d’équipe de foot en phase de relégation…

Pourtant, quand Bound for Glory démarre, c’est un peu la même histoire que celle vécue sur l’entame de Gold Tooth Guru : vache enragée, gouaille fwom da ghetto, prod’ & orchestrations made in Hollywood, tension et torse musculeux… ‘y a moyen que la torgnole nous abime méchamment l’émail ! Parce que, si si : malgré le brillant des chromes, malgré le pré-refrain un peu tête-à-claques, ce morceau-titre qui fait le fiérot aux avant-postes de la tracklist est un peu comme le souffle d’une explosion. On a beau vouloir rester debout comme si de rien n'était, on finit à terre, groggy, si ce n’est carrément brûlé au 2^nd degré.

Et la suite immédiate ne donne nulle raison de – telle la fouine qui sent le coup fourré arriver – plisser les yeux et figer ses sourcils en points d’interrogation. Car « Sho Nuff » fait dans l’embuscade crapuleuse, le match de boxe truqué, le coup vicieux balancé quand l’arbitre a les yeux tournés. La piste est rampante, sombre, punchy, retorse et baigne dans un mélange de gratte granuleuse et d’ondulations Electro[ubles].

Et puis patatras, le gluant nous tombe sur le coin du groin comme la vague de chamallow sur les surfeurs de Barbie Town. Spleen de gangsta ensommeillé, entre-deux vocodé à vomir, rage bon-chic-bon-genre : c’est sur « Head Under Water » qu’Hyro the Hero perdra la majorité des fans de Body Count. Parce qu’à South Central on ne sirote pas son thé au matcha en pleurnichant devant Emily in Paris. Car c'est malheureux : les excès de sucres lacrymaux constituent l’un des trois problèmes majeurs de ce 3^e album (… même reproche adressé à « We Believe » et son refrain main-sur-le-cœur-blessé-j’ai-trop-mal-Lord-do-you-hear-me-?). Le deuxième de ceux-ci réside dans cette esthétique « pop-corn » hyper aseptisée, pensée pour un public de centre-commercial et les spectateurs de M6, noyée sous les paillettes et le gras. Cet aspect est sous-jacent sur une grande majorité des douze pistes, et explique entre autres pourquoi on n’adhère pas vraiment à « Fight » (… alors qu’il y aurait pourtant eu moyen).

Mais le plus gênant – du moins pour un vieux con qui a connu le minitel et Récré A2 – c’est la naïveté ado qui transpire de beaucoup de ces accès de révolte gentillette. Nous ce que l’on attend d’un tel album, c’est l’insurrection, les cocktails molotov balancés par des gangs de psychopathes ultra-violents, la peur au ventre pendant qu’à l’extérieur se déroulent la Purge d’American Nightmare… Au lieu de cela, sur « FU 2 » (interprété en duo avec un le jumeau ricain de Maître Gims) ou « I’m So sick », les revendications ne font guère plus peur que celles d’un Jordan trépignant pour obtenir une demi-heure supplémentaire de Fortnite. Vous aviez réclamé l’équivalent Rap Metal du mordant nihiliste de Desproges ? À la place on vous propose le Kev Adams du HipHop-core…

Et ce n’est pas tout. Si « Retaliation Generation » était un morceau carrément potable sur Worst Behaviour, la version qui est restituée sur ce long format a été artificialisée – ou pour le dire autrement « electro-marylinmansonifiée ». Et comme on peut s'y attendre, ce passage dans un univers sonore étriqué lui fait perdre la quantité modeste mais réelle de rage organique qui l’animait en 2022. Bien joué les sourdingues !! Quand au remix de « Legendary », s’il fait un peu baisser le taux de glucose du titre original, il se loupe par contre complètement en en faisant des caisses dans le registre Bidibip / Breakcore, le résultat final étant parfaitement indigeste.

On se retiendra pourtant de jeter le BéBound avec l’eau du bain, ceci du fait de quelques claques joliment vivifiantes. Parmi lesquelles les deux premières pistes (on en a causé plus tôt : ‘fallait pas dormir !). Mais également « Renegade of Punk », court brulot sans détour ni bullshit, groovy comme Huggy les bons tuyaux et clignant de l’œil malicieusement vers le « Jump » de Kris Kross. Ainsi que « Woo Hah !! Got You All in Check », tout aussi direct dans la face, mais également insidieusement Trap, et recyclant avec talent l'un des cris de guerre de Street Fighters II. Alors quand on réalise que trois de ces quatre titres s'avèrent être du pur Hyro the Hero, sans la moindre trace de featuring dedans (…on trouve quand même 7 collab' sur les 12 titres !), on se dit que le bonhomme ferait mieux de suivre ses penchants naturels plutôt que de se laisser influencer par ses potes branleurs de nouilles (… issus de Atreyu, Mudvayne, Ice Nine Kills – CQFD).

Je-dis-ça-je-dis-rien, comme dirait l'autre. M'enfin si la chose pouvait être méditée avant d'aborder le quatrième album, je crois que l'on y gagnerait tous…

La chronique, version courte : Bound For Glory, c’est un petit tiers d’un Rap Metal revanchard gonflé aux grosses prod’ ricaines… Plus deux tiers d’une « Urban Teen Music » de goût très discutable proposant un cocktail [émotivité synthétique / révolte post-pubère] qui nécessite d’avoir au maximum la moitié de l’âge du chroniqueur qui vous cause pour en apprécier la saveur et « l’esthétique ». Vous aviez demandé un équivalent Rap Metal de Jérémy Ferrari (ou pour les vraiment vieux : Pierre Desprosges) en espérant mordant et impact ? On vous propose Kev Adams à la place…

Cglaume

le 20/03/2024