Ken Mode - Success

Chronique CD album (37:00)

chronique Ken Mode - Success

J’étais persuadé que Ken Mode était un groupe de postcore moderne prise de gueule, va savoir pourquoi. Quoi qu’il en soit, je n’ai jamais écouté la moindre seconde de leur moindre album, par flemme ou autosuffisance sans doute. Mais bon, faut croire qu’à force de voir ce nom revenir, mais aussi  à force de les avoir vu passer pas loin de chez moi sans avoir même daigné regarder qui jouait en première partie, j’ai bien dû me rendre à l’évidence : on peut pas classer un groupe dont on a pas entendu une seule mesure, même si on est le dernier connard sur terre.

 

Du coup, ben me voilà avec le dernier Ken mode sur ma platine, le front plissé, les sourcils froncés, la clope et le café en main histoire de m’aider à passer le temps.

 

Et je crois bien que les seules secondes que j’aurais vu passer sont les dix premières : un larsen pas particulièrement joli, un break simple et bien troussé et hop ! Par ici la grosse basse noise rampante, les patterns rythmiques syncopés et les miaulements de gratte atonaux  ! Terrain connu. Je pense illico à une version peut être un peu moins violente de Kiss it goodbye ; moins violente mais tout aussi déglinguée et vicieuse. Le chant confirme cela très vite d’ailleurs : clairement, notre frontman se contrefout royalement d’avoir une voix puissante ou juste. Seule l’émotion semble compter ici et vous vous doutez bien que c’est du côté noir et déviant de la barrière que les performances vocales du lascar se positionnent.

 

Destructuré, volontairement dérangeant voire malsain, le bordel généré par Ken mode n’est visiblement pas fait pour s’intégrer dans les jolies petites cases préétablies du noise hardcore moderne. Il aurait plutôt tendance à s’accorder à cette scène séminale des décennies précédentes dont Kiss it goodbye, Racebannon, Anodyne, Today is the day,  Clockcleaner, ou plus récemment Hawks étaient (ou sont encore) les fers de lance. Et comme ces derniers, nos intéressés ne se contentent pas de composer des autoroutes pour grattes, batterie et brailleur. Toutes les pistes du disque font donc la part belle à de brusques cassures de rythme, à des accélérations syncopées, à de longs breaks épurés, voire à des parties à la limite du spoken word. Tout ça pour refaire péter la tambouille de plus belle bien entendu. De plus, les mecs n’hésitent pas à intégrer un maximum d’éléments décalés à leur musique pour la rendre encore plus explosive et grinçante : des cœurs féminins hystériques par ci, des descentes dissonantes de violons par là. Les compos de Ken mode désarçonnent donc volontiers mais elles ne sont pas pour autant cryptiques ou nébuleuses, bien au contraire… On parle bien d’un album de rock, certes très vicieux, mais de rock néanmoins. On peut même dire que le disque comporte son petit lot de tube bien rentre dedans, comme « this tight jeans », frontale, « management control », étonnamment mélodique, ou encore « failing at fun since 1981 » (ils parlent de moi là non ?).

 

L’album se paye même le luxe de se conclure sur une chanson volontiers plus posée, à la limite d’un indie rock un brin emo mais point putassier pour autant. Tout ça pour renforcer le bilan que je m’étais probablement déjà fait dans ma tête depuis pas mal de temps : Ken mode fait une musique pas originale du tout, certes, mais il y a tellement peu de groupes qui s’évertuent à nous vriller les tympans avec autant de classe de nos jours que je ne peux qu’applaudir des deux mains. D’ailleurs, puisqu’on parle de mes mains, je me rends compte maintenant que j’ai même pas allumé ma clope. Et mon café est froid.

photo de Swarm
le 18/06/2015

4 COMMENTAIRES

Sam

Sam le 18/06/2015 à 19:11:20

expérience différente, et avis opposé: le mimétisme qu'empreinte Jesse Matthewson à Steve Albini m’insupporte au plus haut point. Je suis Ken Mode depuis Mongrel (donc un bail), et même s'ils n'ont pas inventé la poudre, ils l'ont toujours bien fait péter! Là, c'est mou du genou, mais c'est surtout impersonnel et poussif. Voir par moment carrément chiant.
D'ailleurs, tu les avais pas vu au Hellfest toi???

el gep

el gep le 19/06/2015 à 09:53:43

Eh ben comme Swarm je n'avais jamais daigné écouter ce groupe sérieusement, je n'ai pas accroché à ce disque non plus, Sam...
Ca manque parfois de gniaque et... je sais pas, d'autre chose un peu indéfinissable, comme une vrai personnalité. Enfin ça sonne un peu trop fabriqué, quoi.

mat(taw)

mat(taw) le 19/06/2015 à 11:21:00

Et bien pourtant je vous assure qu'en live les nouveaux morceaux fonctionnent du feu de dieu

swarm

swarm le 19/06/2015 à 19:58:23

Ah ben c'est peut être l'effet dépucelage couplet au fait que j'attendais justement une déchirure de tympan que j'ai été assez ravi / surpris de pas prendre. Pour le manque de personnalité, je pourrais te rejoindre Gep mais ça fonctionne quand même pas mal sur mes gamelles, même à la seconde lecture.

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