Kollapse - SULT
Chronique CD album (41:22)

- Style
Post hardcore, post metal en embuscade - Label(s)
Fysisk Format - Date de sortie
25 juin 2021 - écouter via bandcamp
Seconde réalisation pour Kollapse, dont le nom rappelle un opus mythique de Breach, groupe de post-hardcore suédois ayant redéfini les règles du genre dans les 90’s. Sult montre déjà des signes de maturité, les Danois ayant eu tout le loisir, depuis leur 1e méfait (Angst, sorti en 2017), d’assimiler leurs influences, de Cult of Luna à Isis, en passant par Neurosis. C’est donc avec une certaine assurance que débute cet album que personne n’attend mais qui risque de créer une des surprises des tops de fin d’année. En effet, dès son entame, il ne s’encombre d’aucune entrée en matière et plonge l’auditeur, sans aucune espèce de forme de préambule, dans la tourmente. D’ailleurs, les 2 premiers titres s’enchaînent et enchaînent, dans tous les sens du terme. En effet, c’est avec une déconcertante clarté que les 3 instruments trouvent leur place et leur équilibre, dès les 1e mesures de « Drift », chacun jouant son rôle, soit à tour à tour (la basse se montre particulièrement présente sur le passage récité assuré par l’invitée Majken Roswalld Portefée Lex), soit en parfaite harmonie avec les autres instruments. C’est avec une jouissive fluidité que « Drift » et « Knaeler » déroulent leurs plans successifs, mêlant rage contenue, mélodies élégantes, et variations d’une liberté folle. Le tout avec une lisibilité qui relève de l’évidence. Je me permets une comparaison avec un chef d’œuvre du cinéma : Mad Max Fury Road. Dans le film de George Miller, le spectateur se trouve pris dans une spirale infernale d’action sans temps mort, dès l’ouverture, et ce, pendant 30 minutes en apnée, avant de reprendre son souffle. Et dans la déferlante d’actions, chaque plan déborde d’idées de génie et s’imprime dans l’esprit du spectateur pour le poursuivre longtemps après le visionnage. Une véritable leçon de mise en scène. Sult commence de la même façon : 2 chansons liées l’une à l’autre, qui prennent sans prévenir l’auditeur dans les rets de leurs structures respectives et qui fourmillent d’idées d’une clarté confondante à chaque mesure. Elles imposent leur rythme, et on s’y laisse emporter avec délectation.
La force de Sult réside dans l’extrême lisibilité de sa musique, jusque dans la moindre de ses richesses, de ses ruptures, de ses arrangements. Et pourtant, une fois son écoute terminée, elle nous échappe. Paradoxe de la séduction. Donner l’impression de tout offrir, tout montrer, avant de tenir à distance puis de s’évaporer pour ne laisser qu’un cruel sentiment de manque, une sensation de faim qui creuse le ventre et l’esprit. D’ailleurs, Sult signifie précisément faim. Il y a en effet quelque chose de cet ordre-là dans le contenu de l’album. La violence d’une quête, qui s’effectue dans la douleur, car comme pour la faim, vouloir combler un vide peut vous faire perdre vos forces au cours du processus. Et une fois rassasié, on saisit presque aussitôt le caractère éphémère de cette satisfaction. Il convient alors d’en prendre conscience, pour l’apprécier avant qu’elle ne s’évanouisse dans un nouveau cycle. Cette plénitude après la lutte, Kollapse nous l’offre à la fin des 11 minutes du titre de clôture de Sult : un long et calme solo de trompette (aussi long que le titre de la chanson) qui met fin à la reptation dans la fange pour mieux appréhender le bout du parcours. Dans une résignation apaisée qui précède le début d’un nouveau cycle.
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