La Nébuleuse D'hima (lnh) - La Guerre des Rois

Chronique CD album (47:50)

chronique La Nébuleuse D'hima (lnh) - La Guerre des Rois

C’est parce que nos escapades dans la pampa musicale sont régulièrement émaillées de découvertes étonnantes qu’on ne se lasse jamais de chercher, d’essayer, de recommencer, ceci malgré les années qui passent et les camarades qui sombrent dans le désenchantement bougon. Sur les G.R. métalliques dernièrement arpentés par votre web-interlocuteur, Thumpasaurus, 1000 Bone Cylinder Explosion et Horns ont été l’occasion de réguliers refill permettant à la jauge à enthousiasme de ne jamais passer dans le rouge. Et la panne sèche ne risque pas de se produire de sitôt, car c’est à présent LNH qui nous propose de nous refaire les niveaux. Pas Le Niveau d’Huile, ne vous trompez pas d’acronyme. Et ne persistez pas dans votre erreur en pensant qu’Hélène H est la petite sœur d’Arthur H. Derrière ces 3 lettres, c’est en fait le collectif « La Nébuleuse d’HIMA » qui se cache – d’ailleurs on les remercie pour cette initiative condensatrice, c’est plus rapide à taper. Et quand je vous parle de collectif, je ne parle pas d’une petite douzaine de zigs, comme chez Punish Yourself. Non : on parle là de plus d’une quarantaine de personnes, parmi lesquelles des performeurs/euses, des musicien*ne*s, des producteurs/trices, des ingés son, des graphistes, des décorateurs/trices, des vidéastes, des lighteux/euses, des maquilleurs/euses… Parmi cette profusion de talents, on trouve d’anciens Bawdy Festival, Keryah, Munshy, Saturne de The Way I Am, et même un rédacteur de New Noise (pas lapin, non non) ! Une merveilleuse Cour des Miracles, donc, organisée autour de 2 piliers centraux : Nebula, qui fait dans le spectacle vivant et les arts graphiques, et LNH, l'objet de nos présentes attentions, qui régale nos oreilles.

 

«  Moi je voulais juste écrire une histoire… »

 

Si La Guerre des Rois est bien un premier album, il y a en fait eu deux EP par le passé. On aura d’ailleurs tendance à penser que c’est un minimum pour une formation qui, finalement, a déjà 11 ans dans les pattes. Il n’est donc pas étonnant, vu le background de ses membres et la paire d’enregistrements en question, que ce Conflit Royal fasse preuve d’une telle maturité, et ce à tous les niveaux. Les mots sont extrêmement affûtés, en français (ce n’est pas si fréquent dans nos styles de prédilection) comme en anglais (pour ce que j’en ai compris). Les multiples pistes s’enchevêtrent avec un à propos qui n’irait pas de soi pour des musiciens moins chevronnés. Les atmosphères sont prenantes, les artworks travaillés, les accroches sévèrement troussées, et le chant multi-facette aussi juste qu’expressif. Derrière le micro, Faustine Berado nous rappelle d’ailleurs un délicieux mélange d’Agnete d’Animal Alpha, Dominique des Stolen Babies, Skye de Sumo Cyco, Hikiko de Bad Tripes… plus une pincée d’un Reuno à couettes (celui de Lofoforette !).

 

« Qu'est-ce qu'on s'en balance, putain ?! »

 

Vous avez aperçu, affiché en tête de gondole, le style pratiqué : en effet, ce genre de horde baroque toujours à la recherche d’innovations et de nouveaux moyens d’expression ne pouvait se contenter de faire du Blues minimaliste, du Drone monochrome ou du Trve Black régressif. C’est une Fusion multipolaire qu'elle nous propose donc, un pot-pourri où s'entremêlent les machines d’un Rock Electro flirtant parfois avec l’Indus (« The Biggest Wizz »), les gros beats, la platine et la vindicte d’un Hip-hop offensif, l'efficacité rageuse du Neo Metal, la mélancolie urbaine du Trip Hop (« Your Fists On My Cheeks »...), ainsi que des ambiances « Dark Punk Cabaret » à la fois raffinées et destroy. Pendant trois délicieux quarts d'heure principalement colorés de noir (mais révélant de chaudes couleurs quant la férocité redevient passion), on a l'impression de voir évoluer un séduisant monstre de Frankenstein – sans les coutures apparentes ni les boulons dépassant des tempes – constitué à partir des meilleurs morceaux de Senser, Stolen Babies, Krav Boca (pour cet esprit de révolte parfois nuancé de spleen), Eths, Nova Twins, ou encore Hacktivist (sur « Les Âmes Crécelles »). Galvanisé par ce métissage osé, on prend les armes sans hésiter sur l'appel « Shoot the King », on cogne et encaisse les coups avec un sourire mauvais sur « Les Âmes Crécelles », on fond pour les contrastes schizophrènes et le scratch divin de « The Biggest Wizz », on boit avidement le flow et se laisse happer par la tension formidable du morceau-titre, on suit aveuglément la foule derrière la prêtresse de « I Cannot Die », on se vautre dans les coussins d'une Electro duveteuse sur « Despair And Die »... Et jamais le sourire ne disparaît (… surtout pas après le « ghost clin d’œil » tout choupinet suffixant la toute dernière piste).

 

« ...Et comme vous êtes tous des experts, ça dégénère ! »

 

Le terme est utilisé à longueur de chroniques, il a donc perdu de son aura initiale. Pourtant c'est bien d'expérience qu'il faut parler pour décrire ce que vit l'auditeur au cours de l'écoute de La Guerre des Rois. Pas celle d'un long fleuve plus ou moins tranquille, pas un safari musical planqué derrière les vitres d'un douillet casque-4x4, pas un trempage d'or[t]eil[le] frileux pour voir si elle est fraîche mais pas profonde : une aventure immersive, envoûtante, délicieusement dérangeante, qui pousse l'auditeur un peu au-delà de sa zone de confort (« le Trip Hop, le Neo ? C'est pas pour moi ») et récompense les efforts au centuple. Des accroches géantes, une énergie monstrueuse mais qui n'interdit pas les nuances, des décors merveilleusement fantasques, des créatures attachantes... Ma seule crainte, finalement, c'est qu'au vu de la richesse du festin offert à nos oreilles, nos yeux ne puissent se régaler avec la même intensité quand viendra le temps des concerts... Mais c'est un risque que l'on prendra avec plaisir dès que l'occasion se présentera !

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: bien que ne s'adressant qu'à ses oreilles, certains groupes arrivent à faire vivre à l'auditeur une véritable expérience sensorielle. C'est le cas de LNH (pour « La Nébuleuse d’HIMA ») qui crée un univers poético-horrifico-baroque et pourtant indéniablement urbain en mélangeant Hip-hop, Neo Metal, Trip Hop, Cabaret Punk et Rock Electro. On pense à Senser, aux Stolen Babies, à Krav Boca, au Nova Twins, à Animal Alpha et à mille autres... Puis on arrête de penser, on ferme les yeux, et on vibre à l'unisson.

photo de Cglaume
le 24/02/2022

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