Mutation - Error 500
Chronique CD album (38:45)

- Style
Expérimentations metal noisy - Label(s)
Ipecac - Sortie
2013
écouter "Sun Of While Leg"
Certes, avec The Algorithm on avait déjà eu droit à Critical.Error et Polymorphic Code. Mais la geekification de la sphère metal semble ne pas devoir s'arrêter en si bon chemin, le phénomène accouchant aujourd'hui encore d’un Error 500 – en attendant les Stack Overflow, Le Programme Ne S’Est Pas Arrêté Correctement et Windows A Planté: Erreur à L’Adresse x4EF66B12 qui ne manqueront pas d’arriver sous peu. Bordel, comment a-t-on réussi à passer de Welcome To Hell et Reign In Blood à la F.A.Q. de www.pc-tuning.com? Va-t-on bientôt voir arriver une vague Facebook Metal, suivie de ses rejetons Tweetcore et Post-Googlegrind?
… Fin du billet d’humeur. ‘scusez-moi, ça doit être le muesli du matin qui passe mal. A tous les coups il contenait des raisins secs avariés…
Mutation est l’un de ces nombreux projets que s’accordent nos amis musiciens lorsque le carcan stylistique de leur formation principale devient trop asphyxiant, histoire de laisser s’exprimer leur affreux frère jumeau qui, habituellement, est sommé de la mettre en sourdine. En l’occurrence ici c’est Ginger Wildheart – plus connu pour son travail au sein de The Wildhearts donc – qui a envie de montrer au vaste monde que, Nom de nom, lui aussi est capable de déchaîner les nuages de sauterelles et autres cataclysmes métalliques entre les oreilles de metalheads qui ne l’en pensaient peut-être pas capable. Pour ce faire, le bougre s’est entouré de musiciens peu réputés pour leur contribution au développement de la scène « minimalist ambiant easy-listening », j’ai nommé Shane Embury (Napalm Death) et Random Jon Poole (Cardiacs) à la basse, Mark E Smith (The Fall) au chant – ...entre autres, parce qu’il y en a une grosse poignée à ce poste – et puis allez, tiens: citons encore Merzbow, le pape japonais du vrillage de tympans. Au final ils ne sont pas moins d’une grosse dizaine à apporter leur patte à la présente œuvre.
Dernière mise au point avant de véritablement causer musique: contrairement à ce que l’on peut lire ici ou là, Error 500 n’est pas LE premier album de Mutation, mais bien la 2e partie d’un double album dont la première moitié, The Frankenstein Effect, a été enregistrée quelques années auparavant. M’enfin il se trouve que la tactique promotionnelle mise en branle autour de l'objet pousse à complètement éluder le 1er pan de l’œuvre (Va comprendre Charles…), et que c’est dans cette optique que sera donc effectuée la chronique. Là.
Bon alors, comment attaquer l'analyse de la bête? Tentons de décrire l’album en une poignée de qualificatifs sélectionnés avec amour et patience: "hyper-saturé", "surprenant", "furieux", "effervescent", "massif", "audacieux"... Bref, ça latte violemment, mais pas que. Si l’on se concentre sur l’aspect le plus revêche de la personnalité de cette rondelle – autrement dit sur ce qui constitue un bon 65% de la chose –, on remarque que tout ça se rapproche d’un The Dillinger Escape Plan plus noisy que mathcore, plus mécanique que véritablement épileptique, m’enfin bref: un truc salement coriace quoi. Pourtant, sous le vrombissement puissant de cette impressionnante machine de guerre (...propulsée par pas moins de 2 basses!), on remarque une volonté claire de ne pas perdre l’auditeur, voire même de le caresser dans le sens du plaisir audio-métallique. Et c'est un fait, aidée de passages (…voire même de morceaux entiers, cf. « Mutations ») et de voix typées « cold indus pop/rock » (on pense parfois aux univers de Peter Gabriel, David Bowie, Voivod…), la créature de Ginger atteint pleinement son but, jusqu’à – lors des 3 derniers morceaux – atteindre des sommets d’accroche et offrir des montées en puissance exemplaires pas si éloignées que ça de ce que l’on attendrait d’un Devin Townsend, voire d’un And So I Watch You From Afar. C’est sans doute sur « Relentless Confliction » que cette dernière référence trouve le plus sa justification, la tourmente environnante laissant régulièrement émerger de puissantes floraisons de chœurs sereins, la fête se terminant tout de même dans un pilonnage mécanique des plus mastocs. « Innocentes In Morte » reste plus accroché aux basques de la bande à Greg Puciato, le morceau proposant en bonus un refrain ample, posé, majestueux, atteignant des hauteurs qui filent le vertige. Mais c’est encore sur « Benzo Fury » que la douche d’endorphine arrose avec le plus de générosité. Progressant avec détermination le long d’un début de morceau viscéral, tout en tension grésillante et martelage de fûts puissant – sans compter une petite touche Ministry pas dégueu' –, le morceau se déroule implacablement vers la fabuleuse révélation finale voyant un Paul Mullen au chant prophétique porté par une sorte de cyber-cornemuse diffusant une mélodie complètement hors du temps. Vision sublime, élévation de l’âme, pif-paf! derrière le sternum.
Un conseil tout de même: ne vous laissez pas trop endormir par l’enthousiasme débridé de la fin de paragraphe précédent: Error 500 est un gros morceau bien dur à cuire, et il faudra attendrir votre oreille au cours de nombreuses écoutes avant de bien en sentir les différentes saveurs. Et sans le feu d’artifice final occupant le dernier tiers de l’album, on aurait sans doute été plus mesuré. M’enfin crénom, quelle belle bête quand même! Si vous aimez les albums un peu à part, qu’une grosse saturation bien étouffante et des morceaux aux articulations fortement mécaniques ne vous font pas peur, signez là.
La chronique, version courte: Mutation, side-project de Ginger « The Wildhearts », a conçu Error 500 dans le moule d’un TDEP qui se serait coincé les doigts dans la prise électrique d’une noise bien grésillante, tout en allégeant le propos à l’aide de mélodies "cold pop" et de digressions accrocheuses qui, au final, rendent la chose non seulement digeste, mais même carrément bandante. Slurp.
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