Slaughtersun - Black Marrow
Chronique Maxi-cd / EP (23:45)

- Style
Modern Prog Death atypique - Label(s)
Autoproduction - Date de sortie
10 janvier 2025 - Lieu d'enregistrement Frost Gauntlet Recording
- écouter via bandcamp
Toutes les audaces, tous les mélanges, toutes les saveurs n’ont pas encore tous été expérimentés. Je profite que l’IA n’ait pas encore épuisé les possibilités de l’ensemble des domaines de la création pour sortir ce genre de vérité en voie d’extinction, avant que cela devienne obsolète ! On a vu ensemble que, pour peu qu'on les y incite, Slam Death et Synthwave ne rechignent pas à coopérer (cf. Omni Express), que Gospel et Black peuvent aller main dans la main (cf. Zeal and Ardor), et même qu’un improbable trio Electro / Musique Baroque / Metal extrême triomphe lors de tournées mondiales (cf. Igorrr)… Mais le grand blender dans lequel les muses concoctent leurs cocktails n’avait a priori encore jamais vu (je vous laisse fact-checker la chose) un groupe de Death metal prog remplacer sa guitare par un violon.
Et c’est Slaughtersun qui vient aujourd’hui cocher cette case jusqu’alors vierge.
Non, ne fuyez pas en imaginant une version désastreuse d’Apocalyptica souiller les restes d’Obituary ! Si cet instrument improbable permet en effet de faire grincer les cordes et de barbeler notre Metal de manière inhabituelle, il n’est pas dit que vous auriez repéré le subterfuge si on ne vous l’avait indiqué. Car le crincrin est hautement électrifié, râpeux comme un épiderme soigné par Leatherface, et généreux en échardes.
Mais qui es-tu donc, Soleil d’humeur massacrante ?
Une formation toute jeune toute belle, née dans le New Jersey en 2023, à l’initiative de Ben Karas, le violoniste des géniaux Thank You Scientist. Aidé de Cody – un collègue mercientifique – à la basse, de Jason – issu de Tombstoner – à la batterie, et de Justin – qui fait bobo au micro et à la tête dans Cranial Damage –, celui-ci a décidé de souffler un peu la poussière accumulée depuis des années sur ce bon vieux Death Metal. Si on écoute les loustics sans trop d’esprit critique, on apprend que c’est poussés par Death, Cannibal Corpse, Gorguts et At The Gates que les lascars ont décidé de passer à l’action. Sauf que Black Marrow – leur premier EP – navigue bien loin de ces côtes, même si on veut bien leur accorder une filiation lointaine avec la plus canadienne de ces références.
À dire vrai, ce Death Prog moderne et abrasif ne ressemble ni comme deux gouttes d’eau, ni même vaguement de loin à qui que ce soit. On pourrait dire qu’il évoque ce que donnerait un mélange Gojira / Car Bomb s’il était poncé au papier de verre par une main gantée de soie. On peut aussi prétendre y retrouver certaines des sensations procurées par ailleurs par She Said Destroy. Ou par cet autre groupe génial, que je ne connais pas du tout, mais dont vous allez parler dans les comm’ (oui : cette chronique est interactive !). M’enfin vous l’avez compris : Black Marrow ne fait pas dans le Death tradi’, ni dans les gros riffs pavloviens, ni dans le pâté tiède. Ici le groove s’assaisonne au poil à gratter, les plaisirs tout comme les sévices sont sophistiqués, les terres visitées commencent tout juste à être défrichées.
Mais expérimentons par le menu ces sensations nouvelles. Car après tout, une fois enlevées la première – une intro synthétique pleine de cette tension caractérisant les films d’horreur des 80s – et la dernière piste – une version « live en studio » du plus gros tube slaughtersunnien – il ne reste plus que 4 titres à couvrir. Groovy et torturé à la fois, « Fall of the Firmament » tortille sévère, et s’avère follement osé, sans jamais révéler qu’un violon se cache sous cette épaisse masse de zinc et de plomb mélangés. De nombreuses friandises parsèment la compo’, mais c’est l’appesantissement à 2:47, puis cette complexe montée mélodique finale, à partir de 5:06, qui nous procurent les plus beaux souvenirs. Pour se remettre de cette masse imposante de décibels et d’informations, le groupe ne trouve rien de mieux que de balancer son hit absolu, « Relentless Thelemic », qui pédale dans les copeaux de fer comme si sa vie en dépendait. Vicieusement mélodique, véloce, inspiré et délicieusement accrocheur, le titre s’offre même une courte incartade quasi-Stoner à mi-course. Alors c’est vrai, « Ready Cell Awaits » nous convainc moins, ce clou rouillé et biscornu dans la tracklist multipliant dissonances, épines, et grandes bouffées tirées sur la chicha… Heureusement qu’on est vacciné contre le tétanos ! Le morceau-titre nous offre quant à lui une nouvelle occasion d’arborer un sourire, celui-ci stridulant, voletant, furetant avec détermination et sentiment d’urgence, en laissant suffisamment de place à la basse pour qu’on puisse constater que celle-ci pique l’épiderme tout autant que l’instrument de Ben.
Je suis conscient que conclure ainsi est carrément cliché, mais bordel, quand c’est vrai, quelle est l’alternative ? Le propos banal mais pertinent, ici, vous l’aurez compris, c’est que cet amuse-gueule nous a drôlement mis la gaule (l’idée ici est de créer des allitérations, hein, on ne pense pas à mal bien sûr), et qu’on a sacrément hâte d’entendre la suite.
Banale, donc, est comme prévu cette conclusion. Tout le contraire de la musique des zigotos. Et c’est bien ça le plus important.
La chronique, version courte : et si on tentait de jouer un Death Prog sonnant moderne et abrasif, avec un violon électrique à la place de la 6-cordes ? C’est la question que se sont posée, puis la mission dans laquelle se sont lancés des membres de Thank You Scientist et Tombstoner. Et le résultat est aussi atypique qu’affriolant, tel un mélange Gojira / Car Bomb / She Said Destroy. Bam : premier coup de cœur de 2025 !
5 COMMENTAIRES
el gep le 11/02/2025 à 22:58:30
Oh ben dis, un violon doit laisser bien de la place à la basse dans les fréquences, y'a moyen de remplir tout le speeeeeectre ! (pauvres fesses du speeeeeectre!)
Suis dégoûté pour Zeal And Ardor, en vrai j'y avais pensé avant lui, au Black-Metal Gospel, mais je pourrai jamais rien prouver.
Chienne de vie...
Chais pas comment tu fais pour écrire toutes ces chroniques, j'aurais déjà pas le temps d'écouter tous les disques dont tu parles, alors..
cglaume le 12/02/2025 à 05:32:14
Ce violon là, grandement électrifié, prend toute la place qu'une guitare occupe habituellement... Tu as le player Bandcamp pour effectuer un constat auriculaire de la chose 🙂
el gep le 12/02/2025 à 08:29:05
J'étais plein de Goudale !
Black Comedon le 12/02/2025 à 12:08:28
J'avais écouté l'album peu de temps avant la chronique et j'avais trouvé ça plutôt bien, le violon ça fait peur, Apocalyptica je trouve ça chiant et le live de Ne Obliviscaris n'a pas aidé à me faire aimer les élans mélodique du joueur de Crincrin, qui en bonus chantait trop fort quand il n'en jouait pas .
Mais là avec un chant un peu typé Lamb Of God avec de la zic bien foutue, c'était plutôt un bon moment. Par contre j'aurais pas dit Death, j'aurais dit metal générique que quand on sait pas comment classer!
cglaume le 12/02/2025 à 12:48:28
Disons que c'est tout aussi "Death" que les groupes que je cite en comparaison ( Gojira / Car Bomb / She Said Destroy) 😁😅
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