Jason Bieler And The Baron Von Bielski Orchestra - Postcards From The Asylum
Chronique CD album (01:12:37)

- Style
Prog / Rock / Metal atypique - Label(s)
Autoproduction - Date de sortie
14 avril 2023 - écouter via bandcamp
« Justin Bieber ? Non... ?? Décidément, après Bonnie Tyler et Depeche Mode, ils n'en finissent plus de partir en couilles sur CoreAndCo ! »
Mais non, qu'ils sont bêtes... Pas Justin Bieber : Jason Bieler ! Épaulé par son double fantasque, le Baron Von Bielski, sorte de Mr Hyde du bon Dr Bieler...
...Jason Bieler, non, vraiment, vous ne voyez pas ?
Pour être honnête moi non plus, au début. Jusqu'à ce que j'apprenne qu'il était l'une des forces motrices de Saigon Kick... Mais si: cet inattendu parfum d'Indochine croisé dans les pages des vieux Hard Rock Mag de mes années lycée, celui-ci se mélangeant alors (dans mon cerveau du moins) avec ceux, tout aussi exotiques, d'Hanoi Rocks et de Mekong Delta – de l'influence du Vietnam sur le Metal des années 80s / 90s, vous avez deux heures !
Eh bien Saigon Kick n'est plus (… passez donc à Osaka Punch, c'est d'la bonne ! Fin de la parenthèse publicitaire). Par contre le Jason continue d'écrire et de faire parler de lui. Or, si le groupe qui l'a rendu célèbre n'a que peu réussi à accrocher les oreilles de celui qui vous cause en ce moment-même, il en va tout autrement de cette aventure solo. Enfin, solo, si on veut. Alors oui, Jason est a priori seul aux commandes. Par contre il a embarqué un sacré paquet de monde avec lui... d'où cet « orchestra » qui trône tout là-haut – tout s'explique. Sur les sièges passagers du vaisseau piloté par le cap'taine Bieler, on peut en effet croiser Andee Blacksugar (Blondie, KMFDM...), Todd Kerns (Slash & The Conspirators...), Edu Cominato (Geoff Tate), Ryo Okumoto (Spock’s Beard, Phil Collins, Eric Clapton)... Et on arrête là la lecture de l'annuaire, si ça ne vous dérange pas.
Ce n'est pas un envoi promotionnel qui a déposé Postcards from the Asylum dans le creux de mes oreilles duveteuses, mais une judicieuse notification Bandcamp, l'un de mes contacts ayant craqué pour l'album. Et il n'aura pas fallu beaucoup plus qu'une écoute du titre « Flying Monkeys » pour convaincre le lapin : « My God, mais c'est de l'excellent Nawak Metal ! »
Alors oui, mais en fait non. Sur ce titre, effectivement, on n'en est pas loin. Tout comme Haken peut l'être, parfois. Mais la vérité c'est que Jason s'épanouit plutôt dans un Prog à large spectre. Pas ce Prog qui signifie « Dentelle fractale & petit doigt en l'air », non : le Prog qui signifie « Je fais ce que je veux, et bien malin celui qui devinera mon prochain mouvement ». Le Prog de Devin Townsend (qui a déjà collaboré avec Jason sur son album précédent) et de Toehider. Un Prog inattendu, libre, accrocheur, protéiforme, frais comme une salade de fruits en terrasse. Le genre de truc foufou et enthousiasmant, qui part un peu dans tous les sens – qui pourrait tout à fait être complètement imbuvable sans une personnalité forte et un songwriting en béton armé.
Parmi les armes utilisées par le Monsieur pour rendre non seulement cohérent, mais carrément irrésistible le kaléidoscope intitulé Postcards from the Asylum, il y a
* des morceaux de taille raisonnable, à la structure simple et répétitive. Pop, voilà, c'est le mot
* un chant organisé en mille-feuilles, sa voix – comparable à celle d'un Kärtsy Hatakka (Waltari) ayant perdu en nasalité – finissant démultipliée pour former à elle toute-seule de véritables chœurs
* des refrains à se damner – pas besoin d'aller plus loin que le premier morceau, « Bombay », pour s'en rendre compte, mais le constat ne varie que peu tout du long de la tracklist. D'ailleurs celui de la dernière piste, « Human Head » est lui aussi magnifique
Alors en effet, si vous collez ces cartes postales sur votre frigo, celui-ci va se transformer en un formidable patchwork. Du genre qui nécessite de régler mieux le contraste de votre écran. Surtout si vous mettez côte à côte le Prog louvoyant mais velouté de « Deep Blue » et le bon vieux Hard Rock de « Heathens » (dont le pré-refrain et le refrain font par contre plus penser aux Beatles et aux Bee Gees). Ou le Meshuggah-set-met-au-Blues-cétacé de « Sick Riff » et un « 9981 Dark » dont la mélodie synthétique rappelle Etienne Daho. Notez que, malgré ces références, celui auquel on pense le plus souvent ici, c'est Mike Mills de Toehider, artiste dont les œuvres, elles aussi, ressemblent à des mosaïques bigarrées. Ce sentiment, on l'éprouve autant lors de ces morceaux acoustiques poignants, sans une once de gras (le formidable « Mexico », le tragique « The Depths », la confidence « Human Head ») que sur les vieille diapos nostalgiques (Joe Cocker et les Beatles sur « Birds of Prey »). Car cette fraîcheur amicale, cette douce espièglerie, ces mélodies divines (quelle collection de tubes !), cette apparente simplicité, cette liberté totale : tout ce qu'on aime chez l'Australien, on le retrouve ici, comme dans une dimension parallèle, une réalité similaire et pourtant bien distincte – l'important étant qu'elle est tout aussi passionnante.
L'album a beau être rempli jusqu'à ras bord, et un peu moins punchy sur son dernier tiers, il fait naître une envie irrépressible d'en savoir davantage, d'en écouter plus. D'autant que Songs For The Apocalypse, l'album de 2021, affiche un casting de rêve avec, en plus du Devin précédemment évoqué, Dave Ellefson de Megadeth, Ron Thal (Bumblefoot), ou encore Benji de Skindred !
Pas le choix : on va être obligé de se pencher sur la question !
La chronique, version courte : certains fuient devant le mot « Prog » – je sais, j'ai été de ceux-là. Pourtant, s'il y a bien un artiste qui se retrouve affublé de cette étiquette faute de mieux, c'est bien Jason Bieler. En même temps, il est difficile de rassembler sous un terme unique ces morceaux Hard Rock, ces expériences lorgnant vers Meshuggah, ces douceurs nostalgiques, ces trips acoustiques, ces folies bondissantes – bref, cet univers multiple, matrice d'un nombre affolant de refrains géniaux et de tubes inattendus. Si vous appréciez quand Devin Townsend n'en fait pas trop, et plus encore si vous êtes fan de Toehider (notamment quand celui-ci tire sur la laisse de son clavier), vous n'avez pas le droit de passer à côté de Postcards from the Asylum.
4 COMMENTAIRES
Xuaterc le 08/11/2023 à 17:42:43
Tu appâtes Lapin!
cglaume le 08/11/2023 à 18:30:24
Dans mon Top 10 eazzzzy !!
Xuaterc le 09/11/2023 à 11:48:14
Très plaisant comme écoute, effectivement je trouve que c'est un mélange gouleyant entre Devin Townsend et Bumblefooot
cglaume le 09/11/2023 à 12:44:26
🤘🤘
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