That Handsome Devil - Exploitopia

Chronique CD album (43:00)

chronique That Handsome Devil - Exploitopia

 

That Handsome Devil… Rhaa, j’adore ces loustics ! Et ce depuis ma découverte (tardive) de A City Dressed In Dynamite (10/10, mais oui !). Put** que cet album est bon !! « … le fruit d’une commande faite par Tarantino auprès de Gorillaz pour illustrer son prochain road movie nawak » que j’écrivais à l’époque. La description est aussi lapidaire que lacunaire – drôlement à côté de la plaque, même, diront certains – mais il ne faut pas qu'elle vous empêche de foncer écouter cet album si vous ne l’avez pas fait jusqu’à présent. Car découvrir le petit nouveau alors même que vous avez raté ce chef d’œuvre, ce serait un peu comme de commencer la visite des châteaux de la Loire par celui de Saumur alors que vous n’avez mis encore le pied ni à Chambord, ni à Blois, ni à Chenonceau.

 

Il y a quatre ans, Your Parents Are Sellouts était venu me rappeler à quel point j’étais un triste trouduc de n’avoir pas essayé d’écouter les Américains en-dehors de leur magnum opus. Bon, pour être honnête j’avais essayé... Mais les quelques tentatives s’étaient soldées par un « bof mouaif » démotivant. Heureusement, la cuvée 2021 avait remis quantité de charbon dans ma locomotive, et de swing dans mes chab-douwap. Alors quand tomba la nouvelle de l’arrivée d’Exploitopia, c’est tel le bouliste se préparant pour le Salon International du Cochonnet que je dévisageai mon calendrier, et salivai par avance en imaginant les délices auriculaires à venir.

 

La découverte de la pochette jeta un froid, je dois dire. OK, je valide le fait de ne pas avoir demandé à Andr-IA Marschall, le Midjourney des métalleux (non ?), de leur générer un artwork sur mesure plein de junkies à 6 doigts et de seringues au design improbable. M’enfin pour le coup c’est dans une autre forme d’extrémisme que les zigs sont tombés. Parce que OK, avec des lunettes vintage rouge et bleue (fournies avec la cassette / le CD / le vinyle si jamais vous mettez la main à la poche), ce crayonnage est censé vous sautez à la gueule en 3D. M’enfin, eh, oh : ‘y a pas écrit « jambon » là !

 

Heureusement, dès lors qu'elles se sont à leur tour emparées de ce cinquième album, nos oreilles sont rapidement venues contredire nos yeux. Parce que, portant toujours aussi haut et fort la patte inimitable du groupe (pour rappel : un mélange rétro-goguenard-groovy de Rock, de Funk, de Surf Rock, de Hip-Hop et de trucs plus psyché, sur lequel pétille le chant gouailleur de Godforbid), « portant toujours aussi haut et fort la patte inimitable du groupe », disais-je, cette nouvelle cuvée aligne treize pistes qui prolongent l’univers merveilleux des zozos, tout en l’emmenant dans d’autres contrées, saugrenues quoique connexes, et ajoutent presque autant de nouveaux tubes croustillants à leur répertoire. « Presque » parce que – attention, voici venir la révélation de pourquoi la note reste sous la barre du 9/10 – l'aventure finit en demi-molle, sur l’enchaînement d’un « Crooked Heart » mignon mais à l’insouciance hawaïenne un peu trop gentillette, et d’un « The Toilet That Killed Elvis » trop mou, trop nonchalant, trop léger… Alors qu’ils avaient en stock largement de quoi finir en beauté, les sacripants !

 

Mais essayons de ne retenir que le positif de la chose – ce sera d’autant plus facile qu'il est ici largement majoritaire. Si pour vous That Handsome Devil c’est un mélange oxymoresque d’indolence cool et de vitalité rythmique, vous allez être aux anges. Si vous kiffez cette basse, ce chant désabusé de fripon peu fréquentable, cette remise au goût du jour des teintes sépia, et cette aptitude à péter doucement un câble sans sortir le gros nez rouge, alors vous êtes à la bonne adresse. Et ce dès « The Age of Men », morceau emblématique – la génération d’après dirait « signature » – qui coule dans les oreilles comme un vieux whisky dans la gorge. Même topo avec « You’re Doing Too Much Cocaïne » qui propose les mêmes substances illicites, la même silhouette de Tarantino, les mêmes vieilles canailles old school que sur A City Dressed In Dynamite. On pourrait encore en citer nombre d’autres, mais on terminera cette liste avec l’une des plus belles réussites de l’album, dans une tonalité plus Indé Rock noisy cette fois : « Buddha Was a Rich Boy », sa délicieuse saturation et ses « Blah Blah Blah » à entonner en chœurs.

 

Le petit plus d’Exploitopia cependant, ce sont toutes ces mini-virées dans des univers amis mais bien distincts, qui colorent l’album de teintes multiples. Sur « A Milllion Bots » par exemple, on pense carrément à – tenez-vous bien – Ministry ! Un poil seulement, mais un gros poil. « Everybody’s Robbing Everyone », interprété en compagnie de Baby Boy Robinson, convertira immédiatement les fans die hard de Funk humide gorgée de Soul. « Gravity of the Situation » a recours à des échantillons de Jazz manouche et de sonorités Klezmer pour nous emmener rêvasser dans les prairies d’Europe de l’est. « Tonight » fait dans le giallo Dark Synth Disco à distorsion étouffante, et s’en sort dans le trio de tête des meilleures compos 2024. Tout comme « About You », qui déroule quant à lui un Hip-Hop flippant, traversé de scratch so 90s et de tirades planantes complètement irrésistibles. Et l’on finira ce listing étouffe-chrétien par « Cleanse My Algorithm » qui revisite à sa manière la proto-Electro des années « Rockit » et « Pop Corn ».

 

Exploitopia s'apparente donc à une exceptionnelle corne d’abondance pour le fan de That Handsome Devil. Son seul défaut (c'est notre job d'en trouver) ? Être émoussé au niveau de sa queue de peloton / tracklist. ** Ici le chroniqueur est soudain pris d'une bouffée de mélancolie en réalisant que ses chances de voir le groupe sur scène sont aussi grandes que celle d’une lame de fond politique écolo-libertaire dans la Russie de Poutine ** Il est peu probable, malheureusement, qu'on puisse se payer le billet pour aller écouter ces nouvelles compos dans la moiteur fébrile d'un club de Brooklyn. On se contentera donc de leur incarnation discographique, ainsi que des quelques vidéos qu’Internet voudra bien dealer sous le manteau...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte : avec Exploitopia, les petits souliers des fans de A City Dressed In Dynamite se trouvent remplis de tout ce qui figurait sur la liste adressée au Père Noël, et plus encore. Car il offre le meilleur de That Handsome Devil – un mélange improbable Funk/Rock/Rap/Surf fourni avec gouaille, teintes rétro réjouissantes, swing insolent, trips souriants, groove indolent – enrichi de tout un tas de cadeaux Bonux trop nombreux pour qu’on les cite tous en ces quelques lignes, supposées succintes. À vrai dire, il serait sans doute même pertinent de parler ici du deuxième meilleur album jamais composé par le groupe, c'est dire…

 

photo de Cglaume
le 25/12/2024

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