White Trash - Suburban Purgatory

Chronique CD album (49:22)

chronique White Trash - Suburban Purgatory

Lorsqu'un artiste abandonne définitivement l'espoir que sa musique l'amène un jour à vivre au sein d’une grande villa sur les hauteurs de Beverly Hills, trois possibilités s’offrent à lui. Et de un, si en plus il est criblé de dettes, que sa tendre moitié l’a lâché pour une star montante du Rap, et qu’il connait des problèmes de plus en plus tenaces d’érection, pas beaucoup d’options : il s’en remet au canon – rempli de vinasse, ou de balles de gros calibre, selon le niveau de motivation. Et de deux, il lâche complètement l’affaire, brûle ses instruments et retourne installer des chaudières / mouler des reblochons / remplir des bilans comptables – parce qu’il faut bien payer son abonnement à Netflix. Et de trois, il finit par s’en remettre, relativise, puis décide de continuer à pratiquer son art avec une décontraction retrouvée, sans se soucier du qu’en dira-t-on.

 

Et devinez quoi ? White Trash s’inscrit dans la troisième catégorie. Mais vous le saviez déjà si 1) vous aviez lu la chronique de 3-D Monkeys in Space, l’album précédent, ou 2) si vous le saviez déjà (... parce qu’on ne va pas se mentir, vous avez d'autres sources d’information). Dans la continuité de l’opus de 2009, sans se presser (6 ans quand même) ni ne souhaiter rien d’autre que de prendre du bon temps, Dave Alvin et ses potes ont confectionné un 4e – et dernier à ce jour – opus se plaçant dans la droite ligne du petit précédent. Puisque vous ne voulez pas forcément aller vérifier au sein de l’autre chronique de quelle « droite ligne » il s'agit, laissez-moi vous rappelez que les zigotos s’éclatent en pratiquant un Funk Metal’n’Roll sentant bon la poussière des campagnes américaines et les cigarettes « épicées ». Pour ce qui est de la dimension Funk, les guitares remuent du popotin et de la pédale à effet, la basse groove à gorge déployée et un trio de cuivres nous met du miel plein la partition. Pour ce qui est du côté Red Neck, il tient beaucoup dans l’harmonica de Dave, ainsi que dans sa verve gouailleuse – imaginez-vous une voix entre les glameux de L.A. et Robert Plant, mais avec un mégot de Marlboro au coin du bec. Pour le côté fumette, sachez que beaucoup de titres sentent le hamac digestif, la rythmique en tongs, les trips colorés (cf. « Space Drifting »), voire l’indolence solaire de la Jamaïque (cf. « Rich Kids Suck »). Et pour le côté « ‘n’Roll », facile : l’album est plein de leads bien roots, quand ils ne sont pas carrément bien bluesy.

 

À l’image de 3-D Monkeys in Space, Suburban Purgatory s’aborde comme un banquet à la bonne franquette, constitué par une bande de potes chargés de ramener chacun un truc à becqueter. Du coup on y trouve du miam et du boârf en égales quantités, le tout pouvant s’ingurgiter sans y regarder de trop près ni se prendre la tête. Parmi les chouettes petits cakes aux olives maison et les bons petits crus pas chers, on trouve « The Return of Buzz » avec sa classe naturelle et ses cuivres rappelant un peu « Jungle Boogie », le Ragga/Hippie Metal with impact de « Rich Kids Suck », la promenade psyché-spatiale de « Space Drifting », mais aussi le bon vieux Rock’n’Roll du bayou de « Skinny Lil’ Girl » (qui contient un clin d’œil au « Nobody’s Fault but Mine » de Led Zep), ainsi que la chouette reprise de « A Little Less Conversation » d’Elvis Presley. Parmi les vieilles chips molles et les fonds de bouteilles de Banga, on trouve par contre un « I Might Lie » tout dégoulinant de Ouhouh-Luv-You-Babe Rock peroxydé, le laisser-aller lascif de « Sex Positive », un « We Can Fly » au refrain insupportable et aux couplets fondus au soleil sur la plage arrière, et bien sûr le final « Suburban Purgatory » narco-depressivo-soporifique, qui voit d’ailleurs le personnage de la pochette finir par se tirer une balle.

 

Alors non, Suburban Purgatory n’est pas de ces albums qui apparaissent dans les listes « Les 50 indispensables à emporter sur une île déserte ». C’est juste du plaisir sans prise de tête, sans gants blancs, sans vrai moment de génie mais tout aussi peu de piste bouche-trou. C’est un moment à la cool, entre potes, sous un ciel bleu, qui donne envie de se resservir un verre, de bouger son boule, et pourquoi pas de finir la nuit avec quelqu’un d’autre. C’est du Rock au sens large, du Groove’n’Sun’n’Funk au sens propre, le tout vécu sous un porche, avec des potes, le cerveau bien englué dans des substances interdites – du moins aux mineurs. Des raisons bien suffisantes, en somme, pour espérer que les concerts donnés par le groupe en 2021 finiront par déboucher sur un 5e album.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: la musique d’un barbecue entre potes, voilà ce que propose Suburban Purgatory, tout comme 3-D Monkeys in Space avant lui. Ce mélange de Funk Metal, de Red Neck Rock et de tequila/transat sous le soleil donne le sourire sans trop pour cela puiser dans le réservoir à génie mis à disposition des artistes par l’Ordre des Muses. C’est juste du plaisir simple, comme une fiesta improvisée un vendredi soir.

photo de Cglaume
le 17/02/2023

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