Bütcher - 666 Goats Carry My Chariot

Chronique CD album (36:35)

chronique Bütcher - 666 Goats Carry My Chariot

 

« … m’en parlez pas ma pauv’ M’ame Lavey : de nos jours il est impossible de se procurer un bouc avec des cornes potables, du sang de vierge qui ne croûte pas sur les bords du calice, ou même un prêtre défroqué digne de ce nom. ‘Y a pas à dire : le culte de Lucifer, c’était quand même mieux d’not' temps ! 

- Je ne vous l’fais pas dire M’ame Derleth: d’autant que même quand on arrive à s’organiser un p'tit sacrifice humain à l’ancienne, vous pouvez être sûr qu’il y aura toujours un Woke pour vous reprocher, gnagnagna, que la victime soit blanche et hétéro, ou un Vegan pour critiquer le fait que, gnignigni, le cœur humain c’est bien moins digeste et sain que les brocolis … J’vous jure !! »

 

C’est grâce à un micro dissimulé dans notre sac à main de fonction que nous avons pu capter cette discussion au sein du salon de coiffure attenant à l’Église de Satan d’Antwerp, alors que Fenriz s’y faisait faire un brushing en compagnie de ses amis de Bütcher. Et on est bien d’accord avec eux : c’est pas avec tous leurs blasts, leurs growls incompréhensibles et leurs riffs entortillés que les musiciens modernes risquent de faire passer un message à Belzébuth, le sonotone de ce dernier fonctionnant de moins en moins bien. Pour que le boss réponde aux sollicitations, rien de tel qu’un bon vieil album à l’ancienne, avec guitares furieuses mais mélodiques, batterie vénère mais pas plus haut que le bord, vociférations véhémentes mais restant déchiffrables. Autant vous dire que c’est pas avec leur Brutal Boeuf Metal qu’ils feront oublier le Speed/Proto-Black tout de cuir vêtu !

 

Allez, rapide coup d’œil au menu : 666 Goats Carry My Chariot, donc. Et précédemment Bestial Fükkin' Warmachine, et même Speed Metal Attakk. On peut dire que les Belges ne tergiversent pas quand il s'agit d'annoncer la couleur ! « Ouaip, on est à fond dans la caricature. Ouaip, les journalistes de Laurent Delahousse qui auraient à s’occuper de notre cas dresseraient de nous un portrait de dégénérés profonds. Ouaip on sent fort sous les bras et les mites ont commencé à attaquer nos caleçons. Mais l’excès et la crasse sont le propre (oxymore!!!) du Metal, non? Et là où il n’y a ni blasphème ni cirque grimaçant, il n’y a pas de plaisir ! »... C'est pas faux. Du coup comment s’étonner que ce 2e album soit une célébration brûlante de tout ce qui fait que – qu’on soit directeur du marketing, plombier, voisin respectable ou père aimant – on lève haut l’index et l’auriculaire en tirant loin la langue dès lors que retentissent les riffs rugissants ?

 

Dans la lignée des Hellripper, Hexecutor, Midnight et compagnie, Bütcher propose donc un opus de sang et de feu combinant dans un grand chaudron rougeoyant Speed Metal, Thrash, proto-Black, quelques mélodies Heavy, ainsi qu’un esprit furieusement Punk’n’Roll. Et plutôt que de jouer la carte d’une pseudo-modernité en appuyant son micro sur des shrieks de Beumeuh énervé, R Hellshrieker éructe des propos ulcérés partant parfois dans les trémas aigus des ancêtres de la scène. King Diamond valse donc avec Deströyer 666, des garnisons de Venom furieux galopent jusqu'à l’horizon sur de fougueux purs-sangs NWOBHM (la basse de Maiden n’est jamais loin), tandis que de jeunes Manowar impulsifs coupent les têtes à l’épée et que d’athlétiques Bathory à cornes tranchent des membres à la hache…

 

« Elle courre, elle courre, la maladie Bütchour, elle unit dans un cri la scène extrême la scène Heavy »

 

Encadrée par l’intro grandiloquente de circonstance et une outro qui-disparait-de-par-les-chemins-médiévaux-vers-de-nouvelles-quêtes-Blind-Guardianesques, la tracklist joue la carte bicéphale avec quatre premiers coups de boule enchaînés sans temps mort, suivis de près par trois morceaux plus nuancés, plus épiques et plus sombres.

Fiers, véloces, mélodiquement guerriers, excessifs mais sexy malgré la sueur crasseuse et les poils hirsutes, les pistes #2 à #5 vont vous coûter cher en excès de vitesse et autres points de permis. Si « Iron Bitch » reste à peu près maîtrisable sous ses patches et sa panoplie 80s, « 45 RPM » s’emballe déjà plus méchamment et fonce ventre à terre jusqu’à ce que le moteur se mette à appeler au secours. « Metallström / Face the Bütcher » réussit à combiner idéalement le visage de ses deux prédécesseurs pour se poser en hit absolu, tandis que « Sentinels of Deth » propose un sprint ultime destiné à épuiser les derniers belligérants qui tiendraient encore debout.

Mais comme méphitique ne rime pas qu’avec monolithique, les Belges profitent de la mi-temps pour changer de stratégie et poser un morceau-titre de plus de 9 minutes déroulant ce genre d’épopée viking que Bathory a commencé à explorer à partir de Blood Fire Death. Ce faisant le groupe entame un début d’« emblackisation » plus marqué, le maquillage à la King Diamond des débuts se muant peu à peu en pseudo-corpse paints. Et l’on se dit que le titre de la piste suivante – « Viking Funeral » – aurait sans doute mieux convenu à ce périple héroïque, d’autant qu’on peine à imaginer une procession funéraire avançant au son du mélange de rythmiques Punk, de chaos proto-BM et – finalement – de décontraction psyché-70s proposé en avant-avant-dernière position. Et pour finir, tout en combinant la touche Epic Black mélo/Punk du morceau-titre et la fin traîne-savates de « Viking Funeral », « Brazen Serpent » donne l’occasion à Lorenzo « Speedhämmer » Vissol – batteur de Skelethal – de nous offrir quelques blasts bien sentis. Ce qui montre qu’on peut tout à fait se vautrer dans l’old school sans complètement fermer la porte à la « modernité »...

 

Sauvage mais mélodique, convaincu et convainquant, rétro-crado mais arborant de big biscotos, 666 Goats Carry My Chariot rappelle que c’est sur les vieux autels que l’on célèbre les meilleures messes noires, et que porter des bullet belts et des bracelets à clous peut encore offrir d’intéressants débouchés (… quoi de plus normal quand on s’appelle Bütcher !)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte : Speed Metal, Punk'n'Roll, Heavy Black... Satan, war & blood... Mélodie, vitesse, sauvagerie et cuir clouté... Bütcher offre tout ce dont les fans de bon vieux Metal old school trve-to-the-bones adorent. Avec une mousse d'une telle fraîcheur, une exécution d'une telle ferveur, et des formes d'une telle rondeur: c'est tout juste si on remarque la fine pellicule de poussière qui recouvre l'ensemble !

 

photo de Cglaume
le 07/10/2021

2 COMMENTAIRES

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 07/10/2021 à 19:06:13

Ah cette intro de chronique qui te claque à la gueule au propre comme au figuré: du grand art. Après le groupe en question est vraiment gentillet.

cglaume

cglaume le 07/10/2021 à 22:11:34

Merci pour l'intro 🙂. Et dommage que tes oreilles digèrent aussi mal les cartouchières old school ;)

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