Cosmic Jaguar - El Era del Jaguar
Chronique CD album (41:11)

- Style
[Az]Tech-Thrash / Death - Label(s)
Soman Records - Date de sortie
29 mai 2024 - Lieu d'enregistrement Nuts4all Studio
- écouter via bandcamp
J’ai consulté la liste de l’ensemble des constellations officiellement recensées (… grâce à Wikipedia). Diantre : on en trouve de la bestiole sous la voûte étoilée ! Y compris des lions. Mais pas un seul jaguar… Alors ce patronyme, là, « Cosmic Jaguar » : excusez-moi mais ça sent la consommation non raisonnée d’ayahuasca. Ou de cake au peyotl. Ou de feuilles de coca. Bref : on comprend pourquoi ces Ukrainiens font une fixette sur la civilisation aztèque : c’est la pharmacopée locale qui les motive, dirait-on. Parce que nos amis m’ont l’air bien trop jeunes pour que ce nom et ce décorum précolombien aient été combinés pour rendre un double hommage aux Cosmocats et aux Mystérieuses Cités d’Or…
Allez, rappelez-vous : on avait laissé nos gros matous de l’espace sur un split partagé avec Fusion Bomb. Et l’expérience avait été plutôt positive. Ce qui explique que – sans pourtant battre pavillon arc-en-ciel – j'avais été ému lorsque mes yeux s'étaient posés sur le musculeux grand prêtre-guerrier de la pochette d'El Era del Jaguar. Vous vous en doutez probablement : en quelques mois, il n’y a pas eu de changement notable d’orientation stylistique. D’ailleurs on retrouve ici deux morceaux d’alors, « Obsidian Mirror » et « The Shorn Ones ». En l’occurrence, sur ce 2e album Cosmic Jaguar continue de pratiquer un Thrash / Death particulièrement tortillonneux fleurant bon la jungle amazonienne. Un peu comme l’a fait en son temps Sadist, sur Tribe et Hyaena : même vocaux finis à la ponceuse, même embrouillamini de riffs, même batterie contorsionniste, même pagne, même sarbacane. Même mal au crâne, également (on est donc plus sur Hyaena que Tribe), le groupe ne cherchant manifestement pas à chasser sur les terres du Thrash à large audience.
Quelques nouveautés attendent néanmoins le fan. La plus notable étant l’ajout d’un chant féminin, qui nous prend d’ailleurs un peu de court sur « Ashes in Eyes », en jouant l’onctuosité – un vrai contraste avec les trois titres le précédant, notamment lors de cette parenthèse très Crimson-like, à 1:23 ! Et il ne s’agit pas là que d’une coquetterie ponctuelle, car on retrouve Chimalma, la chanteuse, sur deux titres supplémentaires (… on me dit dans l’oreillette que la demoiselle avait déjà participé à la cover de « Veil Of Maya »). L’autre nouveauté – qui s’intègre particulièrement bien à ce cadre historispanophile – ce sont plusieurs incursions dans l’univers du Flamenco, l’ombre de Rodrigo Y Gabriela se faisant sentir sur pas moins de quatre morceaux. Et l’on finit ce recensement des infos périphériques mais pas inintéressantes par la liste (partielle) des musiciens invités à participer à ce concert de rugissements spatiaux : Marc Grewe (Morgoth), Tommy Talamanca (Sadist !), Miguel Teixeira Sousa (Fusion Bomb), Marc Biedermann (Blind Illusion)… Des copains, des influences, des vilains des Terres du Milieu : de quoi animer efficacement une soirée Mezcal & Quesadillas !
On ne reviendra pas sur l’impression laissée par les deux titres déjà présents sur l’EP – z’avez une autre chronique pour en savoir plus. On insistera par contre sur les bonnes vibes générées à nouveau par la basse de Sergio – qui doit avoir un poster de Steve DiGorgio au-dessus de son lit, c’est pas possible autrement. Ainsi que sur les soli relativement inventifs des gratteux – il y a un peu de Tom Morello sur les délires concluant « God of Sun and War » (… et pas que là). Bien qu’il participe à l’atmosphère tribalo-ushuaïesque de l’opus, on est par contre moins fan de ce flutiau des Andes qui vient poser ses trilles dissonantes au sein de morceaux déjà assez difficiles à digérer. Mais je ne vous laisserai pas croire qu’El Era del Jaguar n’est qu’un immense casse-tête : « Solar Logos » s’avère relativement accueillant, quoique pas autant que « Decapitated Lunar Goddess », dont on adore les formidables va-et-vient guitaristiques du refrain. On regrettera juste que – comme c’est le cas sur trop d’opus interruptus – les adieux prennent une forme un peu discutable, « La Noche Triste » étant sans doute la plus bordélique, la plus revêche, la plus « floue » même, des compos de ce millésime 2024, ceci malgré quelques très bons riffs disséminés ici et là.
Si l’on embrasse à présent une vision plus panoramique de la tracklist, on reste sur plus ou moins le même constat que celui établi à l’écoute du split : la technique est délectable, le voyage grisant… mais également usant, le groupe mitraillement follement tel un sniper-marsupilami, sans laisser le temps à l’auditeur de refaire ses lacets ni de reprendre pleinement son souffle, ceci malgré quelques mélodies plus clémentes. Ah ça : l’amateur de Pop, tout comme celui de Punk, prennent cher sur El Era del Jaguar ! Et c’est ce qui, au final, nous fait appuyer un tantinet sur la pédale de frein au moment d’inscrire dans le marbre de la marge la note attribuée à l’album.
La chronique, version courte : vous aviez aimé la visite des pyramides aztèques proposée sur le split partagé avec Fusion Bomb, plus tôt cette année ? Vous re-signerez donc des deux mains pour cette excursion Thrash / Death technique dans la jungle précolombienne assurée par un disciple agité mais extrêmement compétent de Sadist.
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