Dust Lovers - Fangs

Chronique CD album (39:10)

chronique Dust Lovers - Fangs

"Bien plus qu'être un nouvel opus, Fangs marque un tournant stylistique pour le groupe Nantais (exilé sur Paris). Mais rassurez-vous : la base du propos reste aussi groovy que rock'n'roll et l'atmosphère toujours cinéphile !"

C'est ainsi que, synthétiquement, le dossier de presse présente ce nouvel album des Dust lovers. Or, c'est bien connu, les gens aiment la nouveauté mais pas le changement. 
Nous faisons partie de cette caste que l'on appelle "les gens". On se méfie, on suppose, on suppute, on imagine à partir de la pochette.

Les chicots dorés ainsi exposés veulent-ils dire que le groupe a perdu de son mordant ? Ou au contraire, montreront-ils les dents ? 
On comprend vite qu'il y a un peu plus de finesse dans le propos musical que dans la possible interprétation primaire de la pochette et du dossier de presse.
 

Grossièrement : les Dust lovers viennent de signer leur Tranquility Base Hotel and Casino mais...en "pas chiant".
Tranquility Base Hotel and Casino est le dernier album en date d'Arctic Monkeys (sorti en 2018). Les Anglais, fringuants amoureux de rock'n'roll avaient délaissé leur style énergique pour un rock-lounge-crooné qui s'avéra être dangereusement soporifique.

À l'instar de la "bande à Turner", les Nantais revêtent leur costume (métaphorique) de dandies, ne craignent pas les (bouts de) ballades, ont composé autour et avec le clavier, ont parfois ralenti le rythme...sans jamais tomber dans l'excès ni tourner le dos à leur son originel.
Ces derniers points font la différence : nos Bretons/Parisiens (hop là, une provocation historico-géographique) n'ont pas tourné le dos à ce qui fait leur personnalité. 
Bref, la nouveauté mais sans le changement. 

Pour une fois qu'un dossier de presse ne ment pas.

Le groupe conserve bien son groove, il parvient toujours à sentir la poussière tout en réussissant parfois, partiellement, à "s'alléger". Parfois presque pop, tantôt capable de crooner (l'intro de "All about you"), la bande fait un peu la nique à son côté psychédélique foufou d'antan, exception faite d'un "Born to lose", titre typique (et foutrement efficace) des créations de la bande.
Exit donc The Eighites matchbox b-line disaster dans les influences discrètes (même si personnellement ça me faisait sérieusement bander).
Au lieu de ça, ça tâtonne une nouvelle écriture avec des ambiances synthwave rétro-contemporaines ("Highter desire"), clôt sur une outro atmo-malaisante, épilogue de l'album, essaie de nous faire rentrer dans le crâne ses refrains ("Born to lose") à la manière des Black keys pour l'aspect rock-poppé.


Le groupe a tout de même conservé ce son "américain", avec une indéniable inspiration chopée dans le Queens of the stone age période Era vulgaris (axé sur l'expérience de mort imminente de J. Homme) et Lullabies to paralyze (autour des contes de Grimm). Energique, oui, mais aussi sombre.
Le côté psyché n'est pas en reste, mais il est plus discret et posé : on pense par exemple aux Black angels sur "Night cruising".
L'aspect cinématographique, autrefois palpable de bout en bout semble néanmoins moins sensible, moins "typé" (exception faite de "Goldie"), il a été remplacé par une ambiance autrement noire, plus axée sur l'introspectif, donnant une forme vraiment "humaine" au personnage central de ce disque.

Le personnage en question est un vampire. Un vampire romantique, figure du cinéma N&B, muet, pour qui l'amour et l'éternité sont des souffrances.
C'est alors que s'explique la pochette, l'influence de cette période QOTSA (entre mort et contes), les sonorités difficilement "temporalisables", la mélancolie, la violence, la nuit etc. 
Pour cet album, les histoires sont donc racontées autrement que cela soit par les mots ou les sons, quitte à prendre autrement son temps, adapter son ton et distiller des ambiances qui étaient autrefois inconnues au groupe.

Ces explorations n'ont pas entamé une des grandes qualités des Dust Lovers : l'art de la composition.
L'art de la compo associé au sens du rythme permettent de surprendre sans cesse et de ne jamais ennuyer...et c'est principalement ce qui ressort de ce Fangs dont la personnalité peut faire tiquer : un moindre mal quand on parvient ainsi à se réinventer.  

photo de Tookie
le 12/06/2020

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