Julie Christmas - Ridiculous And Full Of Blood

Chronique CD album (42:15)

chronique Julie Christmas - Ridiculous And Full Of Blood

Cette année, malgré les chaleurs écrasantes annoncées pour l'été, il y aura un peu de Nöel en juin.

 

Pas que des paysages enneigés viendraient s'inviter pour plâtrer les horizons de la CoreandPlage, non ; simplement du fait que, 14 ans après The Bad Wife, Julie « I have a present for you » Christmas, que l'on connaît bien pour ses éruptions microphoniques chez Made Out Of Babies et Battle of Mice, dévoile un second album sous son patronyme, Ridiculous and Full of Blood, un titre qui exprime au plus simple comment la chanteuse se perçoit elle-même. Et vous, dans le fond, je vois que ça vous parle un peu aussi, parfois.

 

Flashback. 19 avril 2023. Au volant de la CoreandCar quelque part sur les routes d'un nord-est de la France inconnu de moi, en compagnie de notre cher camarade Freaks et en direction d'un Roadburn (où nous retrouverons Moland) où Julie Xmas se produira justement, pour la première fois depuis longtemps en Europe (ce qui, soit-dit en passant, avait largement contribué à nous faire prendre la décision de monter jusqu'en ces terres lointaines), nous nous rendons compte qu'un nouveau morceau, « Not Enough », le premier depuis 13 ans donc, vient de sortir sur le bandcamp de Julie. Nous, frétillants sur nos sièges avant, qui essayions de conserver une contenance vis-à-vis des covoitureurs à l'arrière, notamment d'un point de vue de playlist acceptable en société, ne parvenons pas à résister à l'attrait et le blastons dans la voiture. Pas que ce soit particulièrement extrême quand on a l'habitude des musiques qui sont les nôtres, mais vous savez ce que c'est.

 

Le lendemain, ce morceau et deux nouveaux autres seront joués lors du concert, ce qui laissait plus qu'envisager l'éventualité d'un nouvel album à plus ou moins court terme.

Depuis sa collab avec Cult Of Luna sur l'album Mariner, elle est restée très proche de Johannes Persson, le chanteur guitariste de la formation suédoise : celui-ci fait partie des musiciens du groupe « Julie Christmas » (et était présent à la guitare lors du concert), pousse une gueulante impromptue sur « End Of The World » (justement joué pour la première fois au RB) ainsi qu'en backings sur « The Lighthouse », et Ridiculous and Full of Blood sort sur son label, Red Creek.

Et au final, il me semble que l'on retrouve de nombreuses marques de cette collaboration tout au long de cet album, dans la logique de composition et dans les arrangements, un peu comme si Ridiculous and Full of Blood était la « version Julie Christmas » de Mariner. « Supernatural », le second morceau, en serait un bon exemple.

 

Mais pour ce nouvel album, elle s'est aussi entourée de quelques autres petits noms en sus : Chris Enriquez de Spotlights, Andrew Schneider de Kenmode et Unsane, John LaMacchia de Candiria et Tom Tierney de On the Might of Princes.

Et ceux-ci ne sont pas en reste en termes d'influences injectées dans ce projet, comme peuvent l'incarner un « Thin Skin » ou un « Blast » aux vibes et à la basse très noise-rock à la sauce Unsane croisée avec Queen Adreena. Parce que oui, la voix de Julie Christmas, cette impression d'être toujours sur le fil, à cheval entre la maîtrise et la rupture, ou tout bêtement dans la maîtrise de la rupture, rappelle toujours autant celle, au bord du nervous breakdown elle aussi, de Katie Jane Garside. Relancez-vous Drink Me, vous verrez.

Et pour moi, ce genre de voix, c'est du touché-coulé : la chair de poule qui s'invite dès le premier scream de « Supernatural », mon porte-avion qui s'évade au fond des flots avec le « I just wanted to see you again... » de « End of the World », et toute la voilure déployée pour me faire balloter au gré des tempêtes et des accalmies de cet album, de façon plus totale que sur The Bad Wife qui, malgré des morceaux excellents, me laissaient encore embarquer une bouée de sauvetage avec moi pour avoir une chance d'être retrouvé au cas où je passerai par dessus-bord. En clair : je pense que The Bad Wife est l'un des éléments de la discographie de Julie Christmas que j'apprécie le moins si on le considère dans son ensemble. Bien qu'il comporte certains des morceaux que je préfère.

Ici, heureusement, on garde le phare de « The Lighthouse » et son approche shoegazy associée à l'éruptivité de Julie Xmas pour nous guider à travers ces remous, les dissonances assumées de « The Ash », l'enchaînement de « Silver Dollars » into « Kids » au petit côté dream pop x noise-rock x sonorités faussement lumineuses surprenantes.

 

Ridiculous and Full of Blood parvient à garder une cohérence d'ensemble malgré sa diversité, et donne vraiment la sensation d'avoir muri pendant longtemps. Il en découle le doute, la rage, la mélancolie, la perdition, l'accomplissement dans l'abandon, pavé d'émotions fortes et d'une sincérité qui aura toujours marqué le parcours de la native de Brooklyn.

 

Avec ce nouvel album, Julie Christmas a fait sauter les quelques digues d'appréhension que je pouvais avoir dans son attente. Le concert au Roadburn avait donné des signaux positifs, oui. Mais il s'agit là d'une confirmation, ce qui peut procurer une forme de soulagement – c'est bien de parfois garder quelques repères dans la vie – et de bonheur de retrouver cette écorchée s'exprimer pleinement. Et le bonheur n'est pas exactement ce qui domine dans l'actualité, alors on prend.

 

A écouter en gardant en tête qu'il y a toujours un moyen de passer à travers la tempête.

photo de Pingouins
le 11/06/2024

3 COMMENTAIRES

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 11/06/2024 à 11:27:58

"post-trucs" ?

Pingouins

Pingouins le 11/06/2024 à 13:08:42

Des bouts de post rock, post hardcore, post metal.... post trucs, quoi !

Moland

Moland le 11/06/2024 à 13:31:17

Yes, j'aime l'idée qu'on pense à un Mariner version Xmas. 

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