Ripped To Shreds - 亂 (Luan)

Chronique CD album (35:05)

chronique Ripped To Shreds - 亂 (Luan)

Demon Scriptures, l'EP précédent de Ripped To Shreds, nous avait laissés mi-figue mi-lapin, avec l'impression piquante que toute l'énergie investie dans cette version cracra du bon vieux Swedeath de Mère-grand était en partie gâchée par un manque de direction et de vision. Mais comme le dit le dicton, il ne faut pas jeter la peau du bébé ours avant d'avoir vendu l'eau du bain. D'autant que la très efficace pochette de ce 2e album (c'est "Mulan Vs la Torche" le thème, c'est ça?) est de ces invitations qui ne se déclinent pas. Alors on met de côté les mauvaises impressions précédentes et zou, c'est reparti Marty sur la grande muraille du riff basaltique, du micro vomito et du rouleau-[de-printemps-]compresseur métallique!


 

Mais je me rends compte que la chronique de l'EP ne présentait pas clairement le contexte... Rattrapons-nous donc séance tenante: Ripped To Shreds est avant tout un homme, Andrew Lee, tiraillé entre un home-sweet-home et un prénom américains d'un côté, et des racines et un nom chinois de l'autre. Son groupe est à son image, avec un line-up yin à San José, et une formation yang à Taipei. Malheureusement la cohabitation entre ces deux mondes tient plus de la schizophrénie que du métissage: en effet, pas la moindre trace d'influences asiatiques dans cette coulée de lave de 35 minutes qui aurait tout aussi bien pu être composée par des brésiliens ou des finlandais. L'ombre de la dynastie Ming et de Lao Tseu ne portent que sur les textes, qui traitent de récits de guerre anciens.


 

Alors que ce soit dit une bonne fois pour toute: en écoutant Luan, n'espérez pas trouver le petit frère vénère de Tengger Cavalry ou de Nine Reasures. Car outre une “Intro” synthétique qui fait penser aux BO de films fantastiques occultes des 70s (genre Susperia) et un interlude lorgnant du côté de Nile (quoique sans pharaon ni pyramides), tout ici n'est que fange, feu, bubons et bouillon. D'ailleurs ça démarre sur du massif furibard cousin de Dismember (le très bon “Righteous Fist to the Teeth of the Wicked”) pour ne plus s'arrêter de cracher de la bile jusqu'au charbonneux “Remnants”, sur lequel Damian Herring (Horrendous) sort son gros zoziau à 6 cordes. Les fondations de Luan sont donc faites d'un Swedeath en apparence primaire – souvent Dismemberien, mais aussi fréquemment Entombedien (à tel point d'ailleurs que sur “Eight Immortals Feast” c'est limite abusé) – qui baigne dans une grande marmite de pus proto-crapoto-punko-metal extrême dans lequel Chris Reifert et Martin Van Drunen font qui des longueurs, qui du snorkeling. De temps à autres Andrew se rappelle que le blaze de son gang vient du World Downfall de Terrorizer et se met à se fâcher tout rouge le temps d'un accès Grind bordélique (on pourrait croire la fin de “Ripped To Shred” écrite par Brutal Truth). Mais à l'opposé il peut également se mettre soudainement à baver des litres de slime dans son Yop, accouchant alors de passages Doom qui, quand ils ne sont pas maladifs ou funèbres – ambiance Papy va fêter la fin du Covid sous les chrysamthèmes – peuvent aller jusqu'à flirter avec la mélancolie finlandaise (cf. la fin de “Throes of a Dying Age”).


 

Eh oui, du vieil Amorphis au milieu de ce sabbat de vieilles harpies anarchinoises. Et ce n'est pas la seule surprise que nous réserve cet opus. Car à 1:56 sur “Throes of a Dying Age” ce sont carrément les tanks écrasants de Bolt Thrower qui s'invitent au milieux des moines crachaolin. Tandis qu'à la fin d'”Opening Salvo” une longue minute est consacrée à de superbes solos Heavy dont certains ont été tricotés par Phil Tougas (de Funebrarum). Et c'est pourquoi j'écrivais “en apparence primaire” quelques lignes plus haut: pour tenir compte de la richesse qui se tapit dans ces nombreux recoins, dans ces breaks multiples et ces leads joliment troussés. D'autant qu'on ne parle pas là de complexification artificielle d'un bordel sans nom, mais bien d'un brûlant canevas intelligemment tissé qui réussit à faire de “Righteous Fist to the Teeth of the Wicked”, “White Bone Spirit”, “Throes of a Dying Age” ou ”Ripped to Shreds” de putains de beaux petits missiles qu'il nous tarde de réécouter.


 

Alors oublions l'EP raplapla précédent et les pangolins malicieux pour nous laisser caresser les poils auriculaires par cet album extrêmement sympathique – à défaut d'être référentiel – qui remplace les brumes glacées du Swedeath originel par le feu brûlant d'un dragon chinois s'abreuvant à la source d'un virulent proto-Metal extrême. D'autant que, je vous le rappelle, nul n'est censé ignoré la Luan!


 


 


 


 


 


 


 


 


 


 


 


 


 

La chronique, version courte: si l'EP Demon Scriptures n'était que moyennement convainquant, sur Luan Ripped To Shreds change la donne et réussit à rendre son mélange de Swedeath, de Grind, de Doom et de proto Metal Extrême cradingue sacrément sympa!

photo de Cglaume
le 22/06/2020

1 COMMENTAIRE

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 22/06/2020 à 12:10:48

J'écRoute ça ce soir !

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