SHvininiai SHarvai - The Great Paradise of Tomorrow
Chronique CD album (38:21)

- Style
Thrash légèrement ensaxifié - Label(s)
Autoproduction - Date de sortie
29 juin 2023
écouter "Full album"
« … Consonne… V ! Voyelle… A ! Voyelle… I !
Ce qui nous fait : S-H-V-I-N-I-N-I-A-I-S-H-A-R-V-A-I.
Euh… 8 lettres : NAVARINS.
Pas mieux… »
Honnêtement, 17 lettres et pas un seul E, aux Chiffres et aux Lettres ce serait la misère ! Quoiqu’en Lituanie ce tirage permet peut-être de former l’anticonstitutionnellement local. Parce que oui, le-groupe-qu’on-préfère-appeler-SHSH (c’est le raccourci officiel) vient de Vilnius, et y joue un Thrash un peu à part. Comme quoi il est possible de vivre dans cette ville et d’y exorciser sainement ses noirs désirs via la musique (z’avez besoin que je sous-titre la référence ou bien ça va aller ?).
« Un peu à part » le Thrash de SHSH, en effet. Pas parce qu’il inclut des éléments de folklore balte – ce n’est pas le cas. Ni parce que les zigotos montent sur scène habillés de costards et de masques de soudeur customisés – c’est le cas, mais l’oreille a du mal à s’en rendre compte. Ce qui place ces loustics un peu à la marge, c’est leur tendance à ne pas rester sagement dans leur moule originel, à mélanger passages sombres, twins gazouillantes, riffs plus franchement « tech » et gimmicks éculés... Mais aussi à proposer des plans franchement perchés, comme cette B.O. kitchissime en guise d’intro de « Morgen », et ce saxo invité sur pas moins de 3 pistes. Sans doute ces singularités trouvent-elles leur source dans le parcours des SHSH-boys qui – c’est du moins ce que nous apprend Metal Hammer, qui a bien aidé à créer le buzz – viennent aussi bien du Heavy, du Jazz, que de l’Electro.
Alors, intéressé par l’aventure ?
Assénons cette vérité tout de go : The Great Paradise of Tomorrow ne va pas révolutionner le Thrash. Relativement original, oui, l’album l’est. Assez réussi, également. Mais ne vous attendez pas non plus à un chef d’œuvre marginal, qui ferait trembler Slayer sur son trône. À vrai dire un tas de plans entendus au cours de ces 38 minutes ne font que ronronner paresseusement dans un registre assez convenu. D’ailleurs, au bout de 2 morceaux, après avoir subi le refrain à nuque épaisse de « Morgen » et celui, plus retors, de « I Have No Mouth », on reste dubitatif. Déçu presque, au vu de ce que promettait l’affiche. On leur préfère « The Shaman », le suivant sur la liste, quoique cette pochette surprise, bien qu’intéressante, parte un peu trop dans tous les sens pour convaincre pleinement.
Il faut en fait attendre les deux tiers suivants, une fois que le groupe a fini de se chauffer, pour commencer à vraiment rentrer pleinement dans le Thrash de nos amis. Et ce grâce à un « Cracked Open » plus brillant des chromes, plus accrocheur et plus focalisé, les quelques menues fantaisies au menu ne nuisant cette fois plus à la solidité de l’ensemble. C’est alors l’occasion d'enfin profiter de la vivacité des guitares twins, ainsi que de cette basse avantageusement mise en avant – caractéristique trop rare, qui nuit pourtant rarement à la musique, au contraire. Le groupe ne redescend dès lors plus de cet appréciable palier qualitatif, enchaînant sans sourciller « Homeopsychopathy » (excellent ce saxo qui s’ébroue sur la basse du « Knight Jumps Queen » d’Annihilator, à 1:19), « MK Ultra » (homogène, inspiré, efficace… slayerien !), un morceau-titre riffant en crabe, et de ce fait un peu moins juteux que ses voisins, et enfin « My Way », qui non seulement surprend par une parenthèse judicieusement intimiste en son début, mais également par la justesse de ses cavalcades où se mêlent joyeusement cuivre et six-cordes.
En voilà une belle séance de kiff Messieurs-dames !
N’empêche : on reste un peu déçu… Cette pochette in-yar-fesses, cette provenance « exotique », ces looks improbables, ce saxo décalé, ce nom à la mords-moi-l’zboob : on avait envie de trouver en The Great Paradise of Tomorrow le successeur de From Blue to Black, So It Goes et du plus récent Trample the Weak, Devour the Dead. Malheureusement, s’il propose plein de choses croustillantes, ce 2e album ne réussit pas à éviter quelques inélégances moins reluisantes qui lui interdisent cette noble filiation. On arrondira quand même sa note à 8, pour les quelques brillants frissons qu’il procure, et le souffle relatif de fraîcheur qu’il apporte.
La chronique, version courte : en Lituanie les groupes de Thrash ne se contentent pas de nous écorcher la bouche avec des blases imprononçables, ils essaient également de nous impressionner l’oreille avec des incartades sinueuses en dehors des larges autoroutes sur lesquelles foncent les bolides du genre. Ainsi, non content de composer des pochettes-surprises musicales ne suivant pas à la lettre les standards, SHvininiai SHarvai va jusqu’à inviter un saxo sur trois de ses compos. Le résultat est intriguant, pas systématiquement brillant, mais néanmoins suffisamment souvent pour qu’on vous recommande chaudement d’y jeter une oreille attentive.
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