Tephra - A Modicum Of Thruth

Il est difficile aujourd'hui d'évaluer le nombre de clones et de copies plus ou moins correctes que les groupes tels qu'Isis, Cult Of Luna ou Neurosis ont engendrés. S'il est certain que parmi ces nombreuses formations post-hardcore un grand nombre est sans grand intérêt, on ne pourra pas mettre Tephra dans ce sac. Ce combo allemand a en effet décidé de sortir un album très inspiré, tout en restant fidèle à un certain "classicisme" instauré par le post-hardcore et ses pères.

Et de post-hardcore, il en est bien question ici. Avec des titres avoisinants les dix minutes, de longues plages instrumentales et un chant à la limite de la rupture, le groupe donne d'emblée la direction dans laquelle il se dirige. Et comme pour bon nombre de CD de ce genre, il serait difficile (et ennuyeux) de décrire de façon correcte et minutieuse tous les titres et le post-hardcore pratiqué par le groupe.

En soixante-dix minutes le groupe expose sa version du post-hardcore, un post-hardcore fortement inspiré par Cult Of Luna, avec une basse très présente, un son bien lourd, qu'on pourrait qualifier de "doomcore" parfois et surtout, une voix éraillée à souhait rappelant un peu trop Neurosis toutefois. De forts relents sludge se font également sentir par moments, comme sur "Until The End" et ses coups de riffs aux faux airs de stoner rappelant Eyehategod. Les derniers efforts des fous de Mastodon ont aussi pas mal inspiré le sextet allemand, avec pour preuve des riffs parfois progressifs et saccadés, ou simplement le son de guitare très proche (l'intro pesante de "Rivers Eye" par exemple). De nombreux sons électros sont présents, aidant à la mise en place de l'atmosphère, à l'image des derniers Neurosis, oscillant entre simples bruits de fond, ou prenant une place prédominante lors des interludes. Bien entendu, toutes ces influences et petits détails ne sauteront pas immédiatement aux oreilles, car il est vrai qu'à la première écoute le groupe ressemble surtout à du Cult Of Luna. Mais après une écoute attentive, les petites différences deviendront bien vite des grandes et vous feront réaliser que le groupe a une très forte personnalité.

Bien entendu, un tel album ne serait rien sans atmosphère, sans ambiance. Et de ce côté-là, le groupe n'a rien raté non plus. Les atmosphères glaciales prédominent, donnant parfois de grands frissons (comme sur le magnifique "Rivers Eyes"), alternant avec des passages à la lourdeur oppressante et agissant comme des rouleaux compresseurs. Et si le tempo est plus souvent lent, le groupe sait enclencher la seconde pour nous marteler tympans lors du rapide "Clearance" ou du très sludge/stoner "Big Black Mountain". De nombreux interludes, aux sonorités électros étranges viennent également contribuer à l'atmosphère, dessinant des paysages souvent effrayants et inquiétants (comme "Wolves Chamber"). Mais au-delà de toute cette lourdeur, le groupe nous laisse entrevoir un peu d'espoir lors du dernier titre (certainement le meilleur du CD), "In The Valley", où des chants féminins viennent gentiment nous bercer, nous apaiser avant le déluge final.

Avec cet album, les Allemands de Tephra réussissent le pari d'innover, même légèrement, dans un genre qui progressivement tourne en rond. Ce A Modicum Of Truth montre un groupe très inspiré, qui tout en tirant exemple des piliers du genre s'est forgé un son très personnel. Un groupe que je n'attendais pas du tout et qui se révèle être pour moi le meilleur représentant du post-hardcore cette année (après Neurosis bien sûr…).

DreamBrother

le 18/11/2007