The Andretti - Suicide, Italian Style

Chronique CD album (46:47)

chronique The Andretti - Suicide, Italian Style

On en a chroniqué des suppôts de Mr. Bungle en ces pages! Pour les trouver, c’est simple: vous ouvrez la page du groupe en question, vous jetez un coup d’œil à la section « GROUPES / ARTISTES DANS LES STYLES DE MR. BUNGLE », puis vous naviguez au petit bonheur, de formation chtarbée en projet improbable. Vous pouvez également taper « CoreAndCo Nawak » dans Google: ça marchote à peu près (il aurait mieux valu que la fonctionnalité de recherche avancée de chroniques permette de filtrer par style pratiqué, mais le patron des lieux attend que le zine soit coté en bourse avant de s’y atteler). Tout ça pour dire qu’on en a vu passer des Bungle-like de toutes formes, de toutes qualités et de tous pays. Mais rarement avait-on eu l’occasion de constater un mimétisme aussi abouti que celui offert par The Andretti. Prenez Suicide, Italian Style, son premier album: lancez n’importe quel morceau en présence d’un bunglophile averti, sans lui dire de quoi il retourne. A moins que le loustic mange et chie Bungle à longueur de journée au point de maîtriser jusqu’à la moindre face B de la moindre démo, il se vautrera lamentablement en vous demandant de quelle chute de studio il s’agit, ou comment vous avez bien pu réussir à avoir accès au promo du nouveau véritable album (pour rappel: The Raging Wrath of the Easter Bunny Demo n’est censé être rien d’autre que de la resucée régressive).

 

Pourtant ce groupe – qui n’a d’italien que le nom (il vient de Pennsylvanie) ni n’est véritablement un groupe puisque c’est la chose quasi-exclusive de Mr John Ferrara – pourtant ce groupe, disais-je, ne se présente pas exclusivement comme un clone de la bande à Patton. Si l’on en croit ses dire:

1) ses références vont bien au-delà (sont également cités Ennio Morricone, Phil Spector, NomeansNo, Nick Cave, Frank Sinatra)

2) l’album peut plaire à bien d’autres publics (ceux de The Mars Volta, System of a Down, Mike Patton au sens large…)

3) et le style pratiqué est un Rock indé sous influences Jazz, Punk, Surf, Exotica et Musiques de film.

Cette description est, il faut l’avouer, assez juste étant donné que la source que Suicide, Italian Style a partiellement copie-carbonnée n’est autre que le légendaire California, ses plages de sable blond, son costard blanc décontract’, ses mojitos dans le désert, sa gouaille rétro et sa nonchalance psychotique.

 

« Un California-bis? Rhaaa mais c’est ce que je cherche depuis toujours!!!!! »

 

Alors crois-moi tu vas kiffer l’ami! Encore plus, même, que lors de ta découverte de Darth Vegas. Si l’on veut toutefois nuancer un peu le propos, on précisera que par moment (sur « Il Pavone D’oro », « Marquis De Sade’s Rockin’ NYE », « New Jersey Jailbreak »…) les morceaux rappellent également beaucoup les sombres élucubrations psycho-Nawak de Dog Fashion Disco / Polkadot Cadaver. Et l’on acquiescera à la liste des références livrée dans le paragraphe précédent en découvrant « Palace Depression » qui, malgré un pur refrain final à la Faith No More, voit s’épanouir une langueur et une tension rappelant les westerns de Sergio Leone. Même sentiment en découvrant « The Man Who Never Was » où l’on croit écouter un apprenti Francky jouer les crooners à Broadway. Pourtant ces pétarades de guitares surf et cet usage intensif du güiro (cf. le grincement de criquet qui colore « Sweet Charity) – pour ne citer que certains des éléments les plus évidents – ne cessent de faire clignoter le nom de Mr. Bungle en lettres goguenardes sur les trois quarts d’heure que dure l’immersion. On retrouve avec plaisir cette tension classy, ces bandes originales de hold-up au Nouveau-Mexique, ces incartades Rockabilly, cette volupté sensuelle un peu narquoise, ces accents rétro-funky qui nous rendent tout chose. The Andretti part par contre moins franchement dans des délires toonesques: il est plus Droopy que Loup de Tex Avery, mais il n’en mérite pas moins son étiquette Nawak.

 

Malheureusement il y a un « Mais ». C’est que pour le bunglo-maniac, Suicide, Italian Style est un peu trop confortable, trop pantouflard. Il s’y sent comme un jeune cadre du Medef dans son premier comité de validation d’un plan social, l’excitation de la nouveauté en moins. Le côté « Zéro personnalité » de cet opus aurait tout à fait pu passer s’il nous avait livré de ces nouveaux tubes inédits que Trey Spruance et Trevor Dunn refusent de nous offrir depuis 20 grosses années. Tiens par exemple: sur le premier Ümlaut figure la tuerie « Atlas Face », du coup les ressemblances un peu trop prononcées passent crème, et l'album en question, logiquement, séduit. Comme quoi c'est possible. Par contre, si les 12 morceaux de Suicide, Italian Style sont tous ficelés aux petits oignons et glissent dans l’oreille comme une binouse fraîche dans le gosier d’un déménageur estival, il y manque la surprise, le piment, la sublimation… D’où cette note un peu sévère. On retiendra quand même quelques pépites plus brillantes que d’autres: un « Marquis De Sade’s Rockin’ NYE » mélangeant brillamment les univers de Todd Smith et Mike Patton, un « See Naples And Die » à la tension juteuse, et surtout un « New Jersey Jailbreak » dont les Dadouwap-Dadouwap aboutissent, un peu avant la barre des 2 minutes, à une superbe envolée polyphonique embrassant toujours plus large, toujours plus haut.

 

7.75, oui. En guise d’encouragements du jury. Et pour ne pas sombrer dans le fanatisme bunglophile béat. Mais sans ce pas en arrière qui a permis de juger les choses avec un peu d’objectivité, nul doute qu’il y aurait aussi bien pu y avoir un 9/10 en vis-à-vis de ce papier.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: California 2. Pas par Mr. Bungle: par un petit nouveau de Pennsylvanie. Je ne vois pas comment résumer plus rapidement et plus justement ce premier album de The Andretti.

photo de Cglaume
le 12/10/2020

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