Changeling - Changeling
Chronique CD album (1:00:14)

- Style
Death technico-progressif - Label(s)
Season of Mist - Date de sortie
25 avril 2025 - Lieu d'enregistrement FountainheadHQ
- écouter via bandcamp
« Pour fans d’Obscura, Steve Vai, Devin Townsend et Morbid Angel »
Autrement dit : « Tu montes, chéri ? Avec la pipe j’offre les ‘cahuètes et la bière ! ».
Oui je sais, je sais, arrêtez les tomates : la comparaison est merdique. J’aurais plutôt dû écrire : « Avec cet abonnement vous ne payez que 19,99 euros par mois les neuf premiers mois, et vous bénéficiez de la 5G, de Deezer illimité et d’un abonnement Pornhub premium »
Non plus ?
Enfin bref : le discours promotionnel dans lequel était emballé le premier album de Changeling était parfaitement calibré pour hameçonner les loustics de mon genre. Ils auraient ajouté Prince et Mr. Bungle que je me serais vu obligé de demander Tom « Fountainhead » Geldschläger, le leader du groupe, en mariage.
Mais je bavarde trop, passons aux infos.
« Changeling » signifie en gros « enfant substitué à la naissance ». Comme dans La Vie est un Long Fleuve Tranquille, c’est ça. Ils ont vraiment un nom pour tout, ces Anglais.
Changeling est le bébé de Tom « Fountainhead » Geldschläger, donc, guitariste de Nyn, ex-Obscura, ex-Amogh Symphony, ex-guitariste live de Belphegor, Defeated Sanity et Nader Sadek. Et rat de studio, qui plus est, où il tripatouille avec maestria manettes, boutons et consoles.
Mais Changeling ce n’est pas que Totom. Car celui-ci s’est entouré d’un lineup international, constitué de Mike Heller (ex-Fear Factory, Malignancy) à la batterie, Arran McSporran (Virvum) à la basse fretless, et Morean (Alkaloid, Dark Fortress) au growl et autre discours en chant clair.
Changeling, c’est également de pleines brouettes de cartons d’invitation envoyés à Bill Hudson (Doro, I am Morbid), Jason Gobel (ex-Cynic, ex-Monstrosity), Andy Laroque (ex-Death, King Diamond), Yatziv Caspi (ex-Orphaned Land), Ally Storch (Subway To Sally), James Dorton (The Faceless, NeObliviscaris)... Je vous épargne la suite, votre salon n'est pas assez grand pour accueillir tout ce beau monde.
Changeling, c’est enfin un orchestre rassemblant moult musiciens classiques, plus des chœurs réunissant moult cordes vocales expertes.
… Gros morceau, donc. Qui force le chroniqueur consciencieux à poser un CV léger comme un hippo en béton en plein milieu de sa chronique. Pas très digeste, mais nécessaire, histoire de savoir où l'on met les pieds.
A priori, ce premier album s'annonçait donc comme la promesse de mille plaisirs sophistiqués pour le fan de Metal extrême technico-progressif. Sauf que les mentions à Steve Vai et Devin Townsend pour décrire le terrain de jeu de Mr Fountainhead ressemblent plus à du flanc qu’à une belle tranche de bacon bien croustillante. Afin de situer ce que vous réserve cette heure ronflante de décibels tourbillonnants, imaginez plutôt zapper entre les discographies d’Alkaloid, Menace, Carcariass et Septicflesh, cela vous donnera une meilleure idée de ce dont il retourne.
Vous avouerez au passage qu’il y a déjà de quoi choper le tournis, pas besoin d’en rajouter…
Pourtant ce Changeling semble bien ne pas avoir réussi à donner le change – c’est ballot – à votre interlocuteur (cf. la note)… Ceci malgré (et de un) un début joliment troussé, « Introject » maniant en effet l’esbrouffe – vas-y que ça t’enroule du tapping de malade, que ça dégaine les orchestrations joufflues, que ça martèle avec emphase – sans pour autant sonner creux. Malgré (et de deux) un « Instant Results » offrant une démonstration de très haute volée, alliant joaillerie gorodienne, épaisseur deathmetallique, refrain en chant clair et une dynamique épique du meilleur goût. Malgré (et de trois) ce genre de basse féline qui renvoie à Focus, ainsi que des gourmandises en veux-tu en voilà (le premier tiers d’« Abdication » est délicieux). Malgré (et de quatre) quelques belles poignées d’épices orientales déversées via une sélection de percussions et autres cordes folklo’ – celles de l’oud par exemple, que Tom maîtrise aussi bien que les autres instruments.
Bref, s’il avait fallu parier à l’aveugle, j’aurais dit que ce gros bébé joufflu aurait sans doute mérité un bon 8,5/10. Et j’aurais sans plus de doutes maintenu une telle position après la toute première écoute complète de la chose...
Oui mais en y revenant encore, et encore, et encore, on se rend compte que, au lieu de se magnifier au fur et à mesure d'écoutes répétées permettant à notre cerveau de s’acclimater à ses subtils détours, l’œuvre peine à faire de ce vaste tintamarre prétentieux quelque chose de vraiment consistant. Certes les ors brillent, les artisans sont des experts en la matière, et quelques « Oh ! » admiratifs se forment sur nos lèvres… Mais tout cela louvoie trop, se perd trop dans les recoins, retarde toujours trop l’instant d’en mettre un bon coup, et s’étale trop sur des sept, huit, neuf, voire dix-sept minutes !! Pourquoi faut-il toujours que les groupes étiquetés « Prog » se croient obligés d’étaler ainsi leur confiture ? Si encore leur muse les aidait à faire émerger de cette débauche de moyens des colosses métalliques fiers et pleins de personnalité (Crimson reste un maître-étalon en la matière), ok, pourquoi pas... Mais quand non, décidément, rien de vraiment saillant ne permet de fixer notre attention, qu'aucune mélodie durable et naturelle ne se détache pour emporter notre adhésion… Eh bien on finit par se faire un peu suer ! Eh oui. C’est le travers classique de ce genre de pavé. Et cela va en empirant au fur et à mesure qu’on progresse le long de la tracklist …
Au final, Changeling est comparable à certains de ces restaurant chics où le menu est plein d’enluminures, où les serveurs ont un nœud pap’ et un balai dans le cul, et où le sommelier vous parle de cuvées exhalant des parfums d’acacias, de pruneau et de brioche toastée… On en ressort avec un découvert bancaire abyssal, et – bordel, c'était quoi déjà ? – sans aucun souvenir de quelle entrée nous a été servie après les amuse-bouches. Et l’on se dit qu’on n’y reviendra probablement plus, un bon vieux troquet moins guindé et proposant des petits plats pleins de personnalité étant quand même bien plus sympa…
La chronique, version courte : Changeling, c’est un all star band international réunissant des musiciens multi-diplômés (des ex-Obscura et Fear Factory ente autres), ainsi que des guests de folie. C’est un pavé d’une heure de Death progressif entre Alkaloid, Menace et Septicflesh, plein de basse pulpeuse, d’exploits guitaristiques, de compos à tiroir et d’orchestrations hollywoodiennes. Mais si les oreilles s’en prennent effectivement plein les yeux (… façon de parler), au final on en ressort avec quelques bâillements, et l’impression d’avoir voyagé dans un bateau de croisière fastueux mais dénué de GPS.
3 COMMENTAIRES
Thedukilla le 21/04/2025 à 11:27:17
J’ai bien aimé « Instant Results » mais j’avoue que le reste m’a assez rapidement saturé, vaut mieux arriver le ventre vide face au buffet.
« Les oreilles s’en prennent effectivement plein les yeux » 🤣 formule parfaite !
Aldorus Berthier le 22/04/2025 à 16:26:41
J'irais même jusqu'à le comparer avec un restaurant gastronomique : celui dont le menu te file une gastro et pour lequel tu payes un prix astronomique...
cglaume le 22/04/2025 à 16:32:37
C'te webzine de fins gourmets 😂
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