End - Splinters From An Ever-Changing Face

Chronique CD album (33:00)

chronique End - Splinters From An Ever-Changing Face

Ce devait être fin mai, à quelques jour de la fin du confinement. Enfin, le confinement, nous, chez CoreAndCo, on n'y avait pas goûté, ni les joies, ni les galères. Il faut dire que le patron ne voulait pas en entendre parler, il nous a dit : "Bon, les gratte-papiers, je vous rappelle qu’on est là pour éviter aux gens d’écouter de la merde, alors on est plus que jamais dans les emplois indispensables pendant cette foutue période où les gens se ruent sur le torche-derche. Alors, vous pouvez bien vous transformer en Slipknot version discount avec vos masques ridicules, j’en ai rien à carrer mais je veux voir chacune de vos petites ganaches ici tous les jours, virus ou pas".

Le patron, justement, il m'avait envoyé un mail sur les coups de 10h00, alors que je trimais sur la chronique de ILS: “Je vais m’écouter You Suffer de Napalm Death et je veux voir ton séant adipeux dans mon bureau avant la fin du morceau". Je rappliquais donc fissa et fût accueilli dans son bureau, gratifié de son habituel : "Hé le russkov, cale ta grande carcasse de malossol dans une chaise". Il est comme ça le patron, vu que je m'appelle Boris, il est persuadé que je suis né au Pays des Soviets alors que mon père est normand et ma mère de Paris. Il est comme ça le patron, il aime bien les amalgames. Mais chez lui, ils ne sont jamais insultants, c’est plutôt la quintessence cynique et cruelle de son absence d’éloquence. C’est un bon patron, mais du genre bourru, un mélange de J.Jonah Jameson et de Terence Fletcher.

 

Cet hybride me toisa de son regard de Mister Freeze, style basic instinct avec supplément pics à glace, le visage caché derrière son masque, une vulgaire bande de tissus grisâtre muni d’une rond nettement dessiné et jauni en son centre dans lequel il plantait continuellement ses gros cigares pour y tirer de gargantuesques bouffées. L'expiration de l'une d'entre elles entama la conversation en me noyant dans des volutes de fumée apeurées, s'échappant de chacun de ses poils de barbe qu'elles transformaient en de fumantes petites anarchies pileuses. J’étais face à un Cthulhu droit dans son masque et ses bottes, prêt à entamer un dialogue que je redoutais houleux.

“- Bon, le russkov, peux tu me dire ce qu'on fait chez CoreAndCo?
- Ben...euh...On propose des chroniques et des infos sur la scène métal et ses dérivés ?
- Non, triple raclure d'emoboy pinté à la tourtel. Ta réponse, c'est ce que je pose dans les gogues de ces trouffions d'annonceurs. Tu sais à qui tu parles? Je suis un vétéran moi. J’ai fait kickback en 2003, j’ai survecu à Anal Cunt en 99 alors s’il te plait, ne m’insulte pas. Réponds moi, qu'est ce qu'on fait vraiment ?
- On propose de faire des découvrir des groupes et des styles de musique aux gens?
- Nom de nom, mais c’est pas vrai. On peut dire que tu as largement validé tes compétences niveau conneries, toi!
- Désolé patron, je ne vois pas.
- Hé ouais, tu ne vois pas. T'es vraiment de la bleusaille, de l'alevin à peine fini. A peine 50 chroniques, et tu n'as toujours pas capté, t'es pire que SFR dans le Larzac niveau réception."
Il s'adossa dans son siège, lachant un borborygme caverneux.
"- Mais c'est ma faute si tu es toujours un ignare. Tu n’as pas chroniqué assez d’albums qui dégageaient la véritable essence du Metal pour que tu comprennes enfin ce que tu foutais dans ce bastringue. C'est dommage parce que tu as quand même fait quelques chroniques pas trop mal. Celle d'Astrodeath par exemple, ça m'a fait marrer cette histoire de baffes et ça t’aura éviter au passage que je t’en déglingue une dans la tronche pour une fois. Mais bon, ça manquait encore de la fibre CoreAndCo...Et je ne vois qu'une solution pour te redonner l’envie d’écrire de ces chroniques dignes de notre tookie ou du lapin Jaune ou efficace comme celle de Cromy. Eux au moins, ils ont captés. D’ailleurs, tous les autres ont capté, sauf toi. Non, désolé, petit, avec toi, il n’y a plus qu’une seule chose à faire..."
Il s’adossa plus profondément donc son fauteuil et marmonna:
"- Comme diraient les Doors "this is the end"
- Je suis viré ?
- Viré ?! Mais tu calcules vraiment que dalle. Tu vas chroniquer l’album de End. Tu connais j’espère?
- Euh..non
- Evidemment, tête de gland, et pourtant tu devrais parce qu'ils viennent de sortir leur deuxième album, Splinters From An Ever​-​Changing Face et tu vas sortir la plume que tu as dans le fondement et t'en servir pour me pondre un papier digne de ce nom

- Ah...euh...ok…Et c'est quel style?
- Violent.
- Ah ouais, genre hardcore?
- Non, j'ai dit Violent, mais y a un peu de ça.
- Ah..euh...genre deathmetal?
- Mais non, espèce de truffe, tu te poses les mauvaises questions. End s'en balance de l'étiquette que tu vas essayer de leur coller, ils vont te la décoller direct tellement ils sont chauds.
- Ouais mais, Patron, les lecteurs, ils ont besoin de références, de repères.
- Les lecteurs sont des trous du cul! Comme toi!...Et surtout comme moi! Bordel de chiotte, je suis le plus grand trou du cul que cette foutue planète ait porté. Et mon boulot, ton boulot, c'est de faire en sorte que personne ne puisse jamais prendre ma place et surtout pas les lecteurs. Tu veux de la référence, bleusaille ? Je vais t'en donner moi de la référence. End, c'est comme si tu commandais un steak tartare au resto, et que le cuistot se ramenait devant ta table avec un boeuf vivant et y découpait devant toi une belle tranche dans le cuissot avant de la jeter encore fumante dans ton assiette. End, c’est comme penser acheter le dernier Eagle Eye Cherry et se retrouver avec le premier album de Dillinger Escape Plan. End, c'est comme recevoir un perforateur Hilti pour Noël alors que tu as demandé un Dremel. Je vais te dire, petit, s'il y a des albums “pavés dans la mare”, celui là, c'est un parpaing dans ta propre flaque de pisse. Tu veux de la référence? Ecce Lex de Nostromo, Danza III de Tony Danza Tap Dance Extravaganza, Under the running board de Dillinger Escape Plan.
- Ok, et au niveau du Line up
- Le line-up? Alors, je vais te donner un seul nom et tu vas bien le noter dans ton crâne de piaf mal fini. Billy Rymer ?
- Billy Cryer?
- Mais, foutu sac de jute, Rymer, pas Cryer. Billy Rymer, le dernier batteur de Dillinger Escape Plan. Le genre de mec fin comme un moineau avec sa tronche de premier de la classe mais je peux te dire qu'il enterre les culturistes de la double pédale, il annihile les musculeux du blast beat. Notamment, son approche de la caisse claire. Il appelle ça le whip, rencardes toi donc un peu, ça fera du bien aux éponges graisseuses qui te servent d’oreille. Et je vais te dire que dans le registre hyper violent et lourd proposé par le quintette, on découvre une facette que l'on n’avait jamais entendue chez le bonhomme mais comme d'habitude, ça te scotcherait un hyperactif sur sa chaise plus facilement qu’une caisse de ritaline dans ses Chocapic.
- Et les autres?
- Tu as Brendan Murphy de Counterparts avec son grain vocal bien gras et bien puissant. Pas humain pour un sou l'échalat, plutôt un volcan atomique en mode Etnaroshima, qui te balance des pillows lavas vocaux bien dégoulinants de magma hardcore. Tu as Will Putney de Fit For An Autopsy à la guitare secondé par Grégory Thomas et ils défoncent absolument tout avec leur riffs en mode marteau-piqueur pneumatique. Du vrai travail de BTP qui poutre sévèrement. Mais attention, il y a de la belle ouvrage aussi et niveau décoration, c’est du Valérie Damidot mais en plus gras. Pour les chorus de faibles, tu oublies. Là, c’est PLS sur PLS version juvamine. Et si tu veux vraiment une des ces foutues étiquettes, tu as qu’à caler dans ta chronique que c’est pas mal du hardcore, un peu du mathcore, un poil deathcore, un chouia metalcore et surtout pas du djent, au moins, tu ratisseras large niveau public parce que ce groupe en mérite un. Mais n'insiste pas sur l’étiquette. Peu importe, je te l’ai dit, c’est du lourd, du violent, de l’instantané qui passe par la caboche de 5 musiciens fans de gros son qui tape. Bon, et pour finir sur le line-up, tu as Jay Pepito a la basse, au passage chanteur de Reign Supreme mais le pépère sait aussi faire chanter les grosses cordes.
- Et c'est linéaire où il y a quelques variations?
- Effectivement, ils se sont sentis obligés de faire les branles nouilles et de mettre des passages plus ambiants. Mais eux au moins ont eu la décence de faire ça de façon bien malsaine, comme des apéritifs bien amers et corsés avant de t'envoyer le reste du menu en pleine face avec supplément de tartes entre la poire et le fromage.
- Mais du coup, je ne capte pas. C'est juste un énième album de hardcore.

- Un énième album de hardcore? UN ENIEME ALBUM DE HARDCORE! Je vais t'en coller une à te détartrer les gencives et tu vas en voir des énièmes albums de hardcore....Effectivement, c'est pas original niveau style, effectivement, ils n'ont rien inventé mais tout est dans l'intention avec End. Et ici, l'intention, c'est à gros coup de tensions que t'es obligé d'y faire attention...Eh petit, tu as vu cette phrase? On dirait du Diam's, surtout, tu ne me cites pas.

- C'est noté, Patron, c'est noté....Et le mixage, c’est propre?
- Mais tu nous les brises avec ton mixage. Tout le monde s’en tamponne le cornichon du mixage. Personne ne te lit quand t’en parles, vieille barrique éventée. Ça fait 18 ans que je suis dans le métier et j’y entrave que dalle à tes histoires de fréquences de mes deux et de compression dynamique ta soeur. Ce que je peux te dire, c’est que là, ça tape dans le rouge qui tâche, de la bonne cuvée du patron, plus acides que mes remontées gastriques un lendemain de choucroute-moules-frites. C'est fatiguant pour les oreilles des mal déniaisés et ça ratisse sévère côté feuilles de choux donc je peux te dire que c'est un album pour les vrais, ceux qui ont une paire d'oreilles plus solides que ma paire de...
- Bref! C'est un bon album!
-...Bottes!...Un bon album? Dis donc, le russkov, tu serais pas le roi de l’euphémisme? C’est un sacré putain de monstrueux album! Voilà ce que c’est! Et tu vas me faire le plaisir de dégager rapidos de mes quartiers et d'aller en écrire ton meilleur papier parce qu’il le mérite et surtout parce que je voudrais pas que ta prose habituellement merdique m'oblige à choisir Moltonel comme annonceur. Allez, dégage maintenant."

 

Donc je n’étais pas viré mais pire que ça, il fallait que j’écrive une chronique sur "Splinters From An Ever​-​Changing Face" de End. Je me demande bien ce que ça allait donner.

 

 

 

On aime: le style sans détour et complètement gratuit, la violence ultime, le chant de rageux, le mixage solide, Billy Cryer Rymer, quand le patron remotive ses troupes.

On n’aime pas: pas pour les faiblards, loudness war detected

photo de 8oris
le 04/08/2020

8 COMMENTAIRES

pidji

pidji le 04/08/2020 à 11:47:45

Mais...
Mais......
😂

cglaume

cglaume le 04/08/2020 à 11:55:52

Haha, excellent !
Quel salaud ce Pidji quand même : il fallait bien que quelqu'un finisse par cracher le morceau :D :D

Seisachtheion

Seisachtheion le 04/08/2020 à 12:24:38

😂😂😂

Nicoscope

Nicoscope le 04/08/2020 à 12:44:14

A mon sens, le meilleur album de mathcore (à tendance) grindcore depuis... très longtemps ! Ça me rappelle un peu le premier Gaza, dans l'exercice de style. 

Xuaterc

Xuaterc le 04/08/2020 à 13:37:16

J'en ai craché ma gorgée de bière de rire

pidji

pidji le 04/08/2020 à 20:09:07

@nicoscope : sans aller jusqu'à la comparaison avec Gaza, c'est vrai que cette sortie est très très bonne !

Dams

Dams le 11/08/2020 à 17:36:20

Une chronique au top pour un album au top ! La Poutre de cet été !

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 15/08/2020 à 13:46:04

Je m'attendais à plus de méchanceté mais ça passe pas mal. Et très bonne kro oui.

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anonyme


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