End - The Sin of Human Frailty

Chronique CD album (30:12)

chronique End - The Sin of Human Frailty

On peut en convenir, plus d'un « supergroupe » a eu une durée de vie relativement courte et une production.... médiocre au regard des attentes. A ce petit jeu de la longévité, End s'en sortent plutôt bien puisque, dans leur désormais septième année d'existence, ils sortent ici leur second album et comptent aussi un EP et un split avec les copains de Cult Leader (dont on espère d'ailleurs un nouvel album, formé par les trois-quarts de Gaza).

Et le dénominatif « supergroupe » n'est pas vraiment usurpé, parce que si vous ne le saviez pas encore, bien que Billy Rymer (ex The Dillinger Escape Plan), parti se concentrer sur son projet Thoughtcrimes, ait été remplacé derrière les fûts par Matt Guglielmo de The Acacia Strain, on retrouve au chant Brendan Murphy (Counterparts), aux guitares Will Putney (Fit For An Autopsy, Betters Lovers, et producteur de nombreux albums extrêmes) et Gregory Thomas (ex Shai Hulud), et à la basse Jay Pepito de Reign Supreme. Excusez du peu.

 

Vous en voulez encore ? Alors qu'à cela ne tienne, en voilà d'autres, puisqu'on retrouve plusieurs guests derrière le micro, à savoir J.R. Hayes de Pig Destroyer (« Twice Devoured Kill »), la vipérine Debbie Gough de Heriot (« Thaw ») et Dylan Walker de Full Of Hell (« Worthless Is The Lamb »).

 

Bref, avec tout ça sur la table, et trois ans après un Splinters From An Ever-Changing Face superbement chroniqué par 8oris et qui avait redéfini les lois newtonienne de l'attraction gravitationnelle talon-machoire, on attendait la suite tout en regardant changer petit à petit la couleur de nos hématomes auditifs.

Les deux titres parus sur le sus-cité split Gather & Mourn avec Cult Leader donnaient déjà une piste de la colorimétrie que prendrait notre épiderme, et on retrouve effectivement sur The Sin of Human Frailty quelques aspérités et teintes indus qui avaient déjà fait leur apparition l'année dernière, un peu dans la veine de ce qu'on récemment sorti Harm's Way, mais avec par ailleurs un degré de violence un cran au-dessus de la bande à James « Running man » Pligge, qui en tiennent pourtant déjà une bonne couche.

 

Et au bout du compte, cet album est mine de rien assez varié, car en sus de ces morceaux en partie orientés indus (le glacial « Gaping Wounds of Earth » et son break assez lourd pour creuser un sillon, l'anxiogène « Thaw » et sa batterie à deux doigts de provoquer des saignements de nez, un « Hollow Urn » où dénote par ailleurs un riff que ne renierait pas le Meshugg'-like), le premier morceau attaque d'entrée en plaçant le maître mot de ce qu'on trouvera ici : la bagarre, de blasts en rapides d-beat en break mid-tempo écrase gueules. Un peu moins d'une minute trente, merci, au revoir, un bel écrémage sera déjà opéré dès ce premier méfait.

Et la suite et à l'avenant, avec le très très Converge-like (période Jane DoeNo Heroes) « Embodiment of Grief », le morceau-titre et son attaque punk hardcore sur venere avec son lot de blasts, de mid tempo renforcé à la double, ou les dissonances chaotiques de « Twice Devoured Kill » qui donnent l'impression de patauger dans la poisse et la fange noirâtre en se cognant dans les murs à répétition – ou peut-être que ce sont eux qui nous cognent ?

Que dire aussi par exemple du break de sortie d'album, sur « Leper » donc, excepté que outch, c'est fait pour faire disparaître les corps et ne laisser aucune preuve, clairement.

En bref : ça bastonne du début à la fin, point barre.

 

Au chapitre des 'petits moins', par contre, on pourra citer la pochette que je trouver relativement peu réussie, et aussi – ce qui me surprend moi-même, parce que j'apprécie beaucoup le chant du bonhomme – la performance vocale de Brendan Murphy, qui si il est vraiment très énervé, bien plus que dans Counterparts, je trouve ici relativement... monotone, disons, même si le terme n'est pas le plus adapté pour dire que j'ai simplement l'impression d'entendre en permanence les mêmes gimmicks. En gros, la variation est apportée par les invité·e·s. Mais ne nous méprenons pas, hein, le taf est tout à fait conséquent : alors que j'écris ces lignes, je cherche encore mes dents, éparses dans les bureaux de la redac.

 

Au bout du compte, je sors de ce nouvel album de End un poil (mais juste un) mitigé, mais c'est en partie dû au contexte des sorties hxc métallique bagarrovitch bien débiles de ces derniers temps : pas facile de se faire une vraie place entre le chaos de Chamber, les récentes galettes de Jesus Piece, Burner, Harm's Way et autres apôtres de la violence en hoodie, qui donne l'impression que cette année aura été celle de la compet' à qui arrivera à faire l'album le plus débilement violent. Mais mine de rien, malgré tout ce déferlement, il me manque un petit quelque chose, une sauvagerie plus éruptive, un peu moins 'sage' et 'lisse' si j'ose dire, entre énormes guillemets : bref, en fait, je crois simplement les bleus provoqués pas Splinters From An Ever-Changing Face n'ont pas encore eu le temps de faire de la place à ceux induits par The Sin of Human Frailty. Parce que l'intention est là.

 

En bref, malgré ces quelques chouineries de ma part, cet album reste vraiment très bon, vous avez bien vu la note en haut de page. Avec un dénominateur commun : pas de place pour la luminosité, ici ça rigole z-é-r-o, on n'est pas dans le noir fluo. Sombre, violent et destructeur, et bien aidé par la production massive de son guitariste, cet album de End ne fait pas de cadeau, même pour celles et ceux qui ont l'habitude d'écouter ce genre de douceurs. Et malgré toute l'intensité du bébé, on se surprend à redécouvrir des petites choses à chaque écoute

 

A écouter quand on constate qu'il y a des claques qui ne se perdent pas.

photo de Pingouins
le 17/11/2023

9 COMMENTAIRES

8oris

8oris le 17/11/2023 à 09:36:00

Ahhhh je le ré-écoutais justement ce matin, la bonne surprise de découvrir ta chro en même temps.
Je crois que tu as vraiment tout dit et bien et, pour ce que ça vaut, je partage ton avis à 200% notamment sur la voix et le côté "bagarre un peu lisse" ou "convenu" mais ça n'en reste pas moins un gros "banger" comme tu dis.

8oris

8oris le 17/11/2023 à 09:36:39

"redéfini les lois newtonienne de l'attraction gravitationnelle talon-machoire" <-- Superbe! :D

Pingouins

Pingouins le 18/11/2023 à 00:29:05

Ah ben merci, je me demandais justement ce que tu, maître ès End, en avais pensé, de ce petit nouveau.
Content de voir que nos impressions se rejoignent. Y'a vraiment ce côté méthodique et peu spontané dans le rendu qui joue un rôle je trouve. Je sais pas si c'est dû à la prod, mais c'est là.

Tookie

Tookie le 18/11/2023 à 10:03:43

Je me tape l'incruste dans votre groupe de parole et vous rejoins : c'est super bien fait, bien emballé, mais ça manque de grain, de gras. Ça tape mais ça ne saigne pas.

daminoux

daminoux le 19/11/2023 à 13:20:13

je le même ressentie que tookie. il y a une coté trop propre qui me gêne peu 

Brutal Grreg

Brutal Grreg le 19/11/2023 à 13:26:17

Moi je pense qu'on a de plus en plus de groupes qui s'égarent dans les gadgets du son. Et pour beaucoup, la prod sauve la mise, mais ne sauve pas la muse (merci a mon correcteur orthographique ibérique qui m'a clairement aidé a accoucher de ma pensée... )

lapaju

lapaju le 19/11/2023 à 17:28:10

Les goûts et les couleurs...
J'adore la production de cet album. C'est un poil trop compressé mais j'adore !

Moland

Moland le 20/11/2023 à 07:03:34

"Noir fluo" haha. Je reste scotché sur cette image. 
A part ça, en termes de supergroupe qui tient la durée, je pense à Killer Be Killed direct

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 20/11/2023 à 10:28:17

Ouais, enfin, il n'a fait que deux albums vraiment pas folichons le supergroupe à Maxou. 
J'hésite maintenant à commenter ce type de produit. Mais je le fais quand même. 
Que dire de cette prod  là ? Pas grand chose et je vais tenter de ne pas être méchant. Je ne parle pas d'avoir le son d'un combo de Rawpunk japonais mais ici, c'est juste d'une tristesse absolue. 
C'est de la bagarre de salle de muscu où on met des compresses stériles sur les plaies après et pas de la bagarre de rue où on désinfecte au whisky.

Les patrons RINGWORM plient tous ces petits morveux du Metalcore, cette année.

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