PeelingFlesh - The G Code

Chronique CD album (26:12)

chronique PeelingFlesh - The G Code

« … Alors je vous rappelle qu’il faut deviner un genre musical.

- OK

- J’utilise des borborygmes menaçants en guise de lignes de chant

- … Le Konnakol ? Le AyaNakamura-core ?

- Les individus que j’évoque dans mes textes sont du genre que tu n’aimerais pas croiser seul un soir, au détour d’une ruelle sombre

- … Le Dirty R’n’B ? Le Trve Gérald Darmanin Metal ?

- Exposées à ma musique, les nuques se mettent à osciller, les arcades sourcilières à se froncer, les démarches à goriller

- … La Chanson de geste ? Le Gangsta Jul ? »

 

Sur ma fiche il est clairement écrit que seules deux réponses sont acceptables : le Gangsta Rap, et le Slam Death. S’il y en a bien un qui m’aurait trouvé la réponse en deux coups de cuillère à pot, quelle qu’elle soit, c’est bien PeelingFlesh. Facile pour eux : ces gus d’Oklahoma City mêlent allègrement les deux. Ça vous choque ? Oh vous, tel(le) que je vous vois, vous n’avez dû apprécier des masses ni le mix Synthwave / Slam Death d’Omni Express, ni le Flamenco Bleuargl d’Impureza

Pourtant des ponts existent clairement entre ces deux genres, ainsi que mon intro-Taboo essayait de le souligner. Ce n’est pas comme si on tentait d’accoupler ASMR et War Metal ! Après tout, le Slam Death n’est-il pas cette excroissance du Brutal Death qui se complait dans le groove Beatdown-compatible ? Qui ralentit le tempo jusqu’à la vitesse de machos tatoués se toisant dans l’arène avant de se refaire la cloison nasale à coups de 45 fillette ? Qui ne cherche pas Montaigne à quatorze heures, et préfère les onomatopées aux subordonnées relatives ? … Y a comme un air de ressemblance, non ?

 

Nos amis américains l’ont bien compris. Et ils n’ont eu de cesse de le prouver, ceci au sein de pas moins de 4 EP et 3 splits. Mais n’essayons pas de tromper les fans de Body Count sur la marchandise : oui, il y a clairement de la matière pour eux, ici. Sauf que la popotte mitonnée sur The G Code fait quand même à 80% dans les grumeaux baveux, le BrüBrüBrüüü sponsorisé par Destop, et les guitares accordées au sismographe. Si l’on veut avoir une chance de goûter cette savoureuse mixture, il vaut donc mieux ne pas trop hurler au vacarme quand sur la radio passe « Highway to Hell » …

 

Dès « Intro », piste au titre ô combien approprié, le décor est méchamment planté : nappe lugubre façon vieille péloche typée 80s, rapport de police, saccades à la tronçonneuse, rototos de brontosaure, mosheries au ras du bitume, répliques bien vénères à la Ice T, allure menaçante : ça va ratatiner, mudafubluargl ! Et le Rhaa Lovely baveux espéré de se trouver confirmé instantanément sur « Shoot 2 Kill », qui démarre chez un Cannibal Corpse allant mollo tempo, balance du break en veux-tu en voilà, et s’enfonce toujours plus profond dans la slamoshin’ fiesta. Mais bientôt le bavoir se colore du bandana HxC et de leads virilement lugubres, avant d’aboutir sur un bon gros flow Hip-Hop soutenu par les traditionnelles harmoniques sifflées. Et comme plus c’est lent, plus c’est méchant, le Slam Rap s’en va mourir au ralenti, pour atteindre progressivement les alentours du zéro degré Kelvin.

 

Putain mais ça bute ton truc dis donc ! OK, mieux vaut avoir mis ses neurones au congélo, mais une fois ce prérequis respecté, on se régale comme un jour de steak-haché/frites/ketchup à la cantoche !

 

... On pousse encore un peu le bouchon ?

 

Ça tombe bien, c’est au tour de « Perc 3000 » d’aller cajoler nos enceintes. Après un petit « blah black » introductif, la machine à saindoux se remet à suinter par tous les riffs et tous les gruïks. Sauf que dès 0:34, une speakerine introduit en 2 mots 3 mouvements la prestation d’un DJ scratchant comme s’il était chez Mordred. Quelques sirènes et dialogues from da ghetto continuent d’épicer cette orgie de Grizzly Death marécageux, jusqu’à la ligne d’arrivée, franchie au bout de 2 minutes et 23 secondes, où l’on réalise qu’on a tout recouvert de bave reconnaissante T-shirt Devourment et casquette NY… Bordel : on n’aurait peut-être pas dû balancer l’intégralité de notre matière grise au milieu de pots d’Häagen-Dazs et des bâtons de colin Findus finalement !

La fin de la face A prolonge délicieusement ce trip crassement régressif, avec tantôt un clin d’œil plus évident – et plus Hardcore – au cinéma horrifique (cf. « Concrete Curb Enforcement »), tantôt un interlude sinistre façon Creepy Trap Metal (cf. « Full of Lead »), tantôt un panel plus large de MC (on trouve même du Rap féminin sur « Skin Blunt ») … Et toujours aucun affaiblissement évident à l’horizon.

 

Puis c'est à la face B d'embrayer. Et l’excitation de retomber progressivement, l’album n’ayant plus guère de charbon à nous balancer dans le moteur. Rien de vraiment méchant, mais à partir de « Barbarianism », on a l’impression que ça ne fait plus que ressasser, en restant certes dans les limites d’une caricature toujours aussi bien faite, mais de plus en plus redondante. Et puis les cailloux commencent à s’accumuler dans nos chaussures. Avec le court « The Fuckening », qui donne clairement l’impression de nous faire perdre notre temps. Avec un morceau-titre trop lourdement chargé en discours semblant uniquement là pour détourner notre attention du manque de pertinence grandissant des riffs (… on apprécie quand même le sketch final, avec ce qui semble être le fiston de Sarsippiu – remember Infectious Grooves ?). Avec, enfin, un « Outro » sans intérêt particulier. Bref : on est plus du côté de Bérézina que d’Austerlitz sur la queue du peloton…

 

Reconnaissons que si la face A nous avait été livrée sous forme d’un EP, on aurait collé celui-ci dans le Top 3 des formats courts de 2024. Avouons de plus que, quelles que soient les approximations et errances de la face B, on n'en garde pas moins une très bonne impression globale de cette improbable mixture, qui nous donne dès à présent envie de goûter à la suite. Comme quoi, le Trap Metal n’est pas la seule perspective d’avenir viable pour la scène Rap Metal !

 

PS : The G Code c'est aussi du guest en veux-tu en voilà, avec Matti Way de Cinerary / Disgorge / Pathology & co, Alex Erian & Steve Marois de Despised Icon, j’en passe et des plus vilains…

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte : The G Code, c’est Devourment et Body Count qui se galochent avec un (imperceptible) sourire en coin. C’est du groove et du gras en dose anti-homéopathique, du BrüBrüBrü de brontosaure mélangé à du gros flow Hip-Hop/Hardcore, et de la mosh part pour gorille troisième dan… C’est le genre de plaisir honteux qu’on n’avouera jamais à son cousin accro à Dream Theater, ni même à son pote fan de Gorod, mais néanmoins un disque qu’il fait du bien par où il passe. Parce que le bonheur et les neurones, ça ne va pas forcément toujours de pair ! (« Heureux les simples d’esprit, car le royaume du mosh leur appartient ! », Lapin 5:3-11)

 

photo de Cglaume
le 18/11/2024

10 COMMENTAIRES

Pingouins

Pingouins le 18/11/2024 à 13:28:20

Ah j'avais écouté à la sortie ça. Rigolo un peu mais vite lassant, quoi, dès que la blague retombe.

cglaume

cglaume le 18/11/2024 à 14:25:15

Perso je suis resté accroché tout le long de la face A :)

Aldorus Berthier

Aldorus Berthier le 18/11/2024 à 23:31:10

La p'tite ref à Gotlib qui m'a maintenu en éveil jusqu'à la fin de la chro 😳💚

cglaume

cglaume le 19/11/2024 à 07:00:19

Marcel for ever

FEDAYKYN

FEDAYKYN le 19/11/2024 à 11:39:14

Étant grand fan de body count et de Gorod (mais pas du tout de slam death), ça va j'ai survécu. Sympa et plutôt pas mal sur certains morceaux mais c'est effectivement un peu lassant à la longue. Ça me rappelle un peu le disque No Sense du groupe français Fate qui avait déjà mis des scratchs dans leur espèce de brutal death en 2000. 

cglaume

cglaume le 19/11/2024 à 13:32:48

Très belle référence !! 🤘
Fate, Gothic : la France avait un incroyable talent dès cette lointaine époque 🙂

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 19/11/2024 à 20:16:11

Jusque là je pensais que la curiosité était une qualité. 
Scratch posé n'importe comment, batterie sonorisée avec le Q, chant ridicule : rien à sauver dans cet étron. 
- 93 sur 10.

cglaume

cglaume le 19/11/2024 à 21:58:33

"Les avis c’est comme les trous du cul, tout le monde en a un" comme dit l'Autre.
"... mais on n'a pas forcément envie de pratiquer un anulingus sur chaque", me permettrais-je de rajouter :D

Aldorus Berthier

Aldorus Berthier le 20/11/2024 à 12:31:55

@cglaume Y en a même qu'en ont deux !

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 20/11/2024 à 20:08:05

- 567sur 10 sur les deux derniers posts

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