Pitbulls In The Nursery - Equanimity

Chronique CD album (57:38)

chronique Pitbulls In The Nursery - Equanimity

Diamant qui laboure la spirale de vinyle, vieux riff bourdonnant derrière un rideau de poussière…

 

Les tout premiers pas effectués au sein d’Equanimity ne pourraient être plus trompeurs… Car non: ce qui s’apprête à nous tartiner le groin pendant une heure n’a rien à voir avec l’une de ces nombreuses offrandes sud-américaines sur l’autel de Sarcofago et de Venom. Point de pentacle tatoué au vieux clou rouillé ni de T-shirt Blasphemy customisé au stabilo ici, bien au contraire: c’est avec les outils les plus modernes, les plus massifs et les plus affutés que les Pitbulls frappent. D’autant que si, en 2006, avec Lunatic le groupe pouvait encore contenter l’amateur de sauvageries Death pas effrayé par un peu de saccades télégraphiques, avec ce 2nd album les Meshuggo-réfractaires vont devoir définitivement faire le deuil du molosse des bacs à sable. Parce que le passage de Black Lotus Records vers la Klonosphere reflète à 100% l’évolution stylistique entreprise par le groupe qui, abandonnant le growl sèchement rocailleux de Julian pour le large et rugueux éventail de Tersim, s’installe définitivement dans le registre Modern Death de ceux qui ont délaissé le giron de maman Morbid Angel pour les bras de miss Meshuggah.

 

Mais s’il est vrai que l’écoute d’Equanimity fait éclore dans notre esprit des comparaisons avec le groove et les aérations d’un Gojira, avec les longues et sombres errances d’Hacride, ou encore avec le mur de parpaings et la batterie monumentale de Scarve, pour autant ce léger glissement stylistique n’enlève rien à l’ambition, à l’exigence technique ni même à l’esprit d’aventure qui avaient séduit les fans du précédent opus. Et la plus basique – mais néanmoins révélatrice – preuve de cette vérité réside dans la durée des 9 nouveaux morceaux, durée qui ne descend que rarement en-dessous des environs immédiats de la barre des 6 minutes, les 3 pièces les plus longues faisant respectivement 8, 9 et 10 minutes. Peut-on pour autant parler de dimension « progressive » pour décrire la musique des rambolitains? Eh bien oui, et comment Maman! Parce qu’entre les trépidations guitaristiques à très haute fréquence s’insinuent de nombreux passages alambiqués, des plans jazzy et autres trames hypnotiques où le chant clair (LES chants clairs) n’est plus persona non grata.

 

Certes, l'absence des glaireuses invectives de "Panda" risque d'en chatouiller plus d’un en pleine zone sensible, même si globalement le "petit nouveau" apporte plus de diversité aux morceaux. On appellera ça l’"effet Gorod". Certes, de l’entrelacs de ces longs nouveaux titres nait parfois une impression de confusion, de perte d’efficacité, comme à la fin de « Crawling », ou encore sur « Reality ». Et c’est pour marquer le coup de ces 2 « certes » que la note reste ancrée juste en-dessous de la barre du 8/10. Mais je comprendrais tout à fait que certains jugent la démarche un peu sévère tant le groupe prend soin de continuellement nuancer son propos sans presque jamais sacrifier le feeling sur l’autel de la technique ou de la sophistication. Même lorsqu'il s'aventure à de menues expérimentations, le groupe reste sexy, que Tersim se laisse aller à des halètements décalés (au début de « Your Dream’s Not Mine », l’exercice culminant sur une salve de « Ba-Ba-Ba » Pattonniens au début de « Reality »), que des percu’ s’invitent sporadiquement à la fête, ou que les guitares de Mathieu et Simon sortent des sentiers battus (cf. ces échos chevrotants sur la 7e minute de « Crawling », la disto’ électro à partir de 2:52 sur « Conspiracy », ou les excellentes stridulations parkinsoniennes accompagnées de grosses saccades à 2:40 sur « Your Dream’s Not Mine »). Plus barré encore, sur « Soul Bones » –  l’un des tout meilleurs morceaux de l’album – les Pitbulls font dans le Dub Metal planant à la Mel-P. Et putain c’est excellent!

Du coup, cette fois plutôt que de concentrer tous les regards sur 1 ou 2 tubes – car de Lunatic, j’avoue qu’avec le recul je me rappelle surtout de l’excellent « Calibrated » – les français répartissent le talent et l’accroche avec équanimité (tentons-le: c’est de circonstance!) tout au long de la tracklist, nous décollant la pulpe à coups de hachoir rythmique sur « Crawling », ratatinant nos appréhensions sous des saccades monstrueuses en fin d’intro de « The Oath », et finissant la visite guidée par un long trip chamanique (si si) s’étirant sur toute la queue de peloton « Your Dream’s Not Mine »…

 

Alors si vous aimez autant Hacride et Scarve que Cynic, et que pour vous la Klonosphere n’est pas le temple honni d’une engeance ayant mis la rythmique au-dessus de la mélodie, réjouissez-vous car le retour de Pitbulls In The Nursery offre tout ce que l’on était en droit d’attendre d’eux: maturité, technique, ambition et accroche. Si par contre l’évocation de Gojira et Meshuggah vous donne envie de redécorer une crèche à coups de griffes et de crocs, mieux vaut en rester à Lunatic et chercher ailleurs si le death technique y est.

 

 

 

 

 

 

 

La chronique, version courte: Equanimity, c’est 9 titres pour presqu’une heure d’un metal toujours aussi ambitieux et technique, mais un peu moins death et un peu plus « modern » que par le passé. Mêlant les registres de Gojira, Hacride et Scarve au sein d'une musique sophistiquée mais terriblement puissante, ce 2e album donne l’impression d’écouter de la musique prog’ interprétée par un orchestre de Transformers. Un retour réussi? Oui, sauf si les 3 groupes français cités plus haut vous filent des boutons…

photo de Cglaume
le 03/06/2015

4 COMMENTAIRES

Tookie

Tookie le 03/06/2015 à 10:59:04

Tu as dit avec ton style loin de mon vocabulaire, des choses très proches de ma pensée !

cglaume

cglaume le 03/06/2015 à 11:52:21

Comme on dit: "Les grandes oreilles se rencontrent !" :D

S1phonique

S1phonique le 23/06/2015 à 14:20:00

lapin entre, vient me serrer la main.

cglaume

cglaume le 23/06/2015 à 21:27:07

S1, s1, ouvre-toi, la main en fist rentrera... (manque plus que la chat soeur)

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