Alice Cooper - Billion Dollar Babies

Chronique CD album (41:04)

chronique Alice Cooper - Billion Dollar Babies

Cela fait quelques années que l'on enregistre et faisons le deuil de divers musiciens ayant plus ou moins marqué l'histoire du rock/hard rock/metal. Et vu l'âge que commencent à avoir certains combos légendaires encore en activité qui font les beaux jours des têtes d'affiche des festivals estivaux, nul doute qu'on n'aura pas fini d'en voir de ces news tristement morbides. De toutes les figures qui ne cessent de mettre à mal le concept de « la retraite à 60 ans », s'il y en bien une qui me foutra un sacré coup de voir partir dans les abysses du diable, c'est sans aucun doute Alice Cooper. Un Vincent Furnier qui ne cesse de défier les lois de la nature en se montrant toujours plus en forme malgré qu'il frôle les 70 balais et les 50 ans de carrière. Et ce, physiquement, passionnellement et artistiquement. C'est dire, alors que beaucoup de vieux séniles s'inquiètent de la paille à adopter pour manger leur soupe, le monsieur se permet même de jouer encore le petit jeune en s'éclatant au sein d'un autre projet monté avec Johnny Deep, nommé Hollywood Vampires. La vie étant ce qu'elle est, il est peut-être temps de s'atteler à l'histoire de toute une vie, à savoir la discographie du pionnier du shock rock, avant que le destin ne joue une énième facétie en le faisant trépasser. Un sacré morceau s'il en est, qui sera distillé au compte-goutte, vu qu'on a récemment vu sortir Paranormal qui représente pas moins que la vingt-septième pierre à l'édifice. Excusez du peu...

 

 

Les Histoires de Grand-Mère Alice, acte 2, scène 4 : Money, money, money !

 

Les albums s'enchaînent mais ne se ressemblent pas pour le Alice Cooper Band. A peine School's Out puisse-t-il être digéré qu'on se prend un Billion Dollar Babies en pleine face. Et si les férus de rock dur ont pu rester sur leur faim avec le grand frère, il n'y a, avec ce petit dernier, plus aucune excuse pour jouer encore les mijaurées. Car Billion Dollar Babies, c'est le véritable virage vers le côté rockeur pur et dur sans concession que le rockeur attendait sûrement depuis Love It To Death et Killer. Celui où le groupe pousse le bouchon plus loin, qui laisse toutes les influences yéyés et psychés sur le carreau... Néanmoins avec pas mal de concessions dans le sens où il s'agit sans conteste de son album le plus « commercial » et convenu à tous les étages. C'est simple, la note est peut-être élogieuse par rapport aux deux derniers prédécesseurs cités et elle n'est là que pour souligner la haute maîtrise et constance qui y est présente. Pour le reste, on pourra admettre qu'il y comme un petit grain d'amertume qui empêche de gonfler davantage le jugement : il manque à Billion Dollar Babies l'aplomb et l'audace d'un Love It To Death ou d'un Killer.

 

En revanche, par rapport à School's Out qui ne contenait que son éponyme fédérateur, on enfile les hits comme des perles ici. Et pour le coup, on parle de choses qui ont traversé les années et amènent encore et inlassablement de merveilleuses tranches de concerts à l'heure actuelle. Jugez plutôt : outre l'éponyme « Billion Dollar Babies » (les jeunes n'ayant jamais entendu la version studio originelle s'étonneront sans doute de la dualité voix claire/voix nasillarde qui s'enchevêtrent continuellement de très belle manière) où 'sieur Furnier s'amuse toujours à nous balancer ses nuages de biffetons dans la poire sur scène, on voit également dans la tracklist l'indécrottable « No More Mr. Nice Guy » au refrain aussi fédérateur que guilleret, « Elected » qui représente sûrement le passage le plus foufou de tout l'album ou encore la ballade « I Love The Dead » aussi excellente qu'à prendre au second degré dans ses orchestration surjouées et guignolesques (imaginez Furnier avec son petit crâne à nous clamer tout ça à la Shakespeare). Et bien entendu, on n'oubliera pas le non moins fameux « Generation Landslide » (na-na-na na-na !), bluesy en diable avec sa guitare slide et son harmonica de l'amour. Aussi efficace que révélateur du niveau technique au ras des pâquerettes de ses géniteurs qui se prennent de plein fouet à cette époque les plus mauvais travers de leur alcoolisme. De la technique en berne que l'on retrouve plus ou moins partout sur Billion Dollar Babies et donne ce caractère hyper accessible, calibré radio en diable.

 

La limite dépréciative du « trop facile » est même parfois très proche sans qu'on ne s'aligne de ce mauvais côté de la balance pour autant (« Raped And Freezin' », « Hello Hooray »). Tandis qu'un « Sick Things » qui aura toujours été injustement laissé pour compte – c'est qu'encore aujourd'hui, il pourrait connaître de belles heures de gloire en concert – par son côté théâtralo-grandiose fait remonter tous les suffrages : le groupe ne s'est pas complètement soudoyé dans la manœuvre et n'en oublie pas ses influences les plus cinétiques entre deux faiblesses éthyliques où les manettes semblent laissées au producteur au détriment des ambitions purement artistiques. Autant dire, Billion Dollar Babies a beau puer le fric à plein nez, on reste encore dans le grisant sans jamais tomber dans le verdâtre. Les limites ont été frôlées sans qu'elles n'aient toutefois été dépassées. Et au vu de ce qu'il en reste aujourd'hui – une pléiade de hits qui mettent encore bien le feu sur les planches et la mention non négligeable d'être l'album issu de l'ère Alice Cooper Band le plus (re)connu – la manœuvre n'était peut-être pas aussi malhabile qu'elle pourrait paraître...

photo de Margoth
le 20/01/2019

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