Alice Cooper - Killer
Chronique CD album (37:08)

- Style
Shock Rock - Label(s)
Warner Bros. Records - Sortie
1971
écouter "Desperado"
Cela fait quelques années que l'on enregistre et faisons le deuil de divers musiciens ayant plus ou moins marqué l'histoire du rock/hard rock/metal. Et vu l'âge que commencent à avoir certains combos légendaires encore en activité qui font les beaux jours des têtes d'affiche des festivals estivaux, nul doute qu'on n'aura pas fini d'en voir de ces news tristement morbides. De toutes les figures qui ne cessent de mettre à mal le concept de « la retraite à 60 ans », s'il y en bien une qui me foutra un sacré coup de voir partir dans les abysses du diable, c'est sans aucun doute Alice Cooper. Un Vincent Furnier qui ne cesse de défier les lois de la nature en se montrant toujours plus en forme malgré qu'il frôle les 70 balais et les 50 ans de carrière. Et ce, physiquement, passionnellement et artistiquement. C'est dire, alors que beaucoup de vieux séniles s'inquiètent de la paille à adopter pour manger leur soupe, le monsieur se permet même de jouer encore le petit jeune en s'éclatant au sein d'un autre projet monté avec Johnny Deep, nommé Hollywood Vampires. La vie étant ce qu'elle est, il est peut-être temps de s'atteler à l'histoire de toute une vie, à savoir la discographie du pionnier du shock rock, avant que le destin ne joue une énième facétie en le faisant trépasser. Un sacré morceau s'il en est, qui sera distillé au compte-goutte, vu qu'on a récemment vu sortir Paranormal qui représente pas moins que la vingt-septième pierre à l'édifice. Excusez du peu...
Les Histoires de Grand-Mère Alice, acte 2, scène 2 : T'as le style Coco (et des chevaux sous le capot)
Le téléphone sonne, encore et encore, sans jamais de réponse...
« Putain, chérie, je suis arrivé et tu n'es pas là, qu'est-ce que tu fous ? Ah oui, merde, j'avais oublié que je t'avais écrasée en arrivant... Bwarf, tant pis, au moins, c'était fun ! »
Quand un album commence par un titre comme ce bon gros « Under My Wheels », il n'y a pas à broncher : c'est de la bonne cylindrée ma bonne dame ! Difficile effectivement de résister à ce hard rock teinté blues qui prône le fait de foutre sa petite amie sous ses roues dans la joie et la bonne humeur. Et que dire de ce final avec sa section de cuivres qui vient ajouter encore plus de jovialité à l'ensemble ? Certes, ça paraîtra un peu téléphoné pour nous aujourd'hui tant le procédé nous semble courant mais à l'époque, voilà quelque chose qui n'était pas légion dans le paysage hard rock, encore à ses balbutiements de durcissement.
Et nous retrouvons un Alice Cooper qui appuie encore plus fort sur le champignon avec Killer. Love It To Death a été un beau succès critique et commercial, il aurait été dommage de ne pas d'autant plus enfoncer le clou. Infatigables et intarissables, les mecs fournissent leur quatrième album seulement quelques mois après, toujours sur la même année. Et en parvenant à se surpasser au passage. C'est que le carrosse se révèle aussi rutilant que fougueux. Et le public ne s'y trompe pas : même si Love It To Death n'a pas forcément à rougir de honte, Killer a connu un plus grand succès encore et reste celui de la doublette de 1971 qui a mieux passé le cap de l'estime et de la postérité.
Quelques raisons à cela. Deux gros tubes : le sus-cité « Under My Wheels » et « Dead Babies ». Ce dernier, petite provocation cynique et gratuite au groupe de pression « un brin puritain » qu'est le PMRC – qui a mis une bonne quinzaine d'années à y réagir d'ailleurs, on applaudira le fait qu'ils jouissent d'une mollesse encore plus grande que celle de l'administration française – à grands coups de poupées décapitées sur les planches, entête avec sa rythmique lourde et lente et son refrain fédérateur jouissant d'une jolie mise en valeur et de chœurs féminins décalés venant l'appuyer du plus bel effet. Deux titres qui occupent encore de jolies places dans les setlists de Mamie Alice d'ailleurs. Même si en terme purement tubesque, « You Drive Me Nervous » et son petit côté AC/DCien au refrain ne se situe pas très loin derrière.
Le groupe flirte encore d'autant plus sur Killer avec les limites du style opéré par la concurrence, tout en continuant de rendre hommage ponctuellement à ses premières amours et influences. Il s'agit sans doute du premier album qui exploite son côté théâtral guignolesque plus ou moins de tout son long. Avec comme point d'orgue, la clôture éponyme de l'album dont l'ambiance est digne d'une cérémonie funéraire aussi menaçante que foutraque façon série B d'un tueur en série. Ou encore ces petites tranches de western lourdes poisseuses, un peu Kyuss bien avant l'heure. Sur « Desperado » tout d'abord, emprunt d'un peu de psyché afin de rendre hommage à Jim Morrison décédé peu de temps avant en lui empruntant notamment son phrasé parlé caractéristique. Et lorsqu'on voit l'arrivée des orchestrations magistrales où le violon vient se taper l'incruste jusqu'à la conclusion, on n'ira pas jouer les langues de vipère sur l'authenticité de la peine du groupe quant à cette disparition tant l'intensité est poignante. Dans le même ordre d'idée, « Halo Of Flies » n'est pas en reste. Le plus gros morceau de Killer sans nul doute. Tant sur sa durée que sur sa qualité. Le prog' à la King Crimson revu et corrigé par Alice Cooper, histoire de résumer ces huit minutes et quelques fort inspirées et jamais chiantes. Le groupe sait faire progresser ses ambiances en ne perdant jamais son fil d'accroche, notamment dans ses breaks de guitare et batterie et son accélération galopante en milieu de course, tout en se permettant de se montrer bien bigarré sur le final.
De moments phares qui viennent un peu faire de l'ombre à des « Yeah, Yeah, Yeah » où Furnier nous sort l'harmonica de sa poche ou « Be My Lover », gentillet avec ses chœurs typés années yéyé des 60's. Loin d'être mauvais en soi mais paraissant tout de suite plus fadasses et anecdotiques par rapport à cette pléiade de bons moments évoqués précédemment. Ce qui n'empêche pas à Killer de se hisser haut. Au-dessus de Love It To Death pour son côté autrement plus confiant et maîtrisé. Et surtout, impressionnant de voir une telle éloquence après quelques mois d'appropriation de son style.
2 COMMENTAIRES
papy_cyril le 30/09/2018 à 13:23:38
tiens un album qui a mon âge :-) !
Eric D-Toorop le 30/09/2018 à 15:16:00
Bon disque classic-rock dans toute sa dignité.
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