Electric Wizard - Black Masses

Chronique CD album (59:06)

chronique Electric Wizard - Black Masses

Il fut un temps, le son crasseux et distordu d’Electric Wizard en effrayait plus d’un. Les compos boueuses et enfumées du grand maître en ennuyaient beaucoup. Et par-dessus tout, le goût prononcé pour les drogues et les trips musicaux sous acides imprégnés de films d’horreurs et de cérémonies païennes en faisait déguerpir des plus téméraires. Mais depuis quelques années, et grâce à la petite vague de hype que subit le monde occulte et baveux du Doom, digne héritier du Sabbath (pas les impies opportunistes à mèches), le Wizard a vu sa fan-base croître et l’arrivée du Witchcult Today, plus abordable à tous les niveaux, a laissé quelques vieux briscards à vestes à patch sur le carreau. Tout ça pour dire que ce nouveau cierge allumé au nom de notre Maistre Belzebuth qu’est ce Black Masses était attendu comme le messie par tous les nouveaux adorateurs du Malin électrique. Mais cette nouvelle messe noire tient-elle ses promesses pour les plus anciens adeptes des riffs rampants, des envolées psyché et de la crasse que nous sommes ?

 

Réponse en presque une heure, divisée en 8 mouvements nous plongeant encore plus que son prédécesseur dans un univers 70’s, où cultes de sorciers et autres vilaineries prohibées se confondent en un amas sonore invoquant les toutes puissances de l’enfer. Si le son analogique bien feutré et poussiéreux et l’ambiance rétro nous ramènent effectivement aux années hippies et aux films occultes de sectes secrètes et autres rites sataniques (je pense à Simon King Of The Witches, The Devil rides out etc.) le léger manque de puissance qu’on avait ressenti sur le Witchcul Today ne lui fait ici pas défaut. Cependant, et c’est là que le bât blesse, l’ambiance de ce disque ne fait pas tout. Il manque en effet cruellement ce qui fait d’ordinaire l’essence même du Wizard et du doom/stoner en général : du riff ostentatoire et blasphématoire ! On constate que pour la première fois, le combo de Dorset manque un peu d’inspiration à ce niveau. Si le Come My Fanatics allie l’ambiance de caveaux aux riffs mortels, que le Doepthrone nous amène au plus profond de la terre et que le We Live (mon préféré) nous assomme avec sa puissance et ses tubes, force est de reconnaître que le groupe n’est plus à son meilleur niveau. On reconnaîtra même que le grand frère de ces Messes Noires contient des riffs plus catchy et des compos plus accrocheuses. Si l’aspect psychédélique sous champi en séduira peut être certains dont le cerveau est déjà trop ravagé, il manquera pour mes oreilles l’essentiel, qui faisait autrefois toute la grandeur des cérémonies du groupe. Si le côté lancinant et plombant des riffs est remplacé par des flottements fumeux de soli et autres nappes sonores -avouons le- pas d’une facture incroyable (« Crypt of Drugula » piste finale ambiante pas très intéressante) on a l’impression que le groupe n’en a fait qu’à sa tête au niveau de l’esthétique. Il aurait fallu un garde fou pour canaliser un peu la prise de psychotropes de la bande à Jus Oborn, car même si les titres les plus sympa de l’album restent bien en tête (le refrain de « Black Mass », le riff principal de « Night Child ») on oublie vite la deuxième moitié du disque. Et même si le côté déjà-vu propre à la touche du Sorcier ne fait plus grimacer les vertueux chevaliers de l’originalité et du renouveau, on est limite dans du plagiat avec le riff final de « Black Mass » qui pompe jusqu'à la moelle celui de fin du morceau éponyme du We Live. Faut pas pousser Satan dans les hosties non plus.

 

Si Jus Oborn nous dessert la même soupe au niveau lignes de chant depuis des années (des petites entorses à la cène sur ce disque ceci dit avec « Turn Off Your Mind » ou le nasillard couplet de « Venus In Furs » ) il faut avouer qu’il a vraiment progressé au niveau de sa justesse vocale, mais on regrettera que son prêche soit si en avant dans le mix. Autre petit bémol, la surabondance de soli de guitares, qui finissent par nous taper un peu sur le système par leur systématisme (surtout sur les parties plus psyché) et bon… Oborn n’est pas ce qu’on appelle un virtuose, bien que doté d'une bonne patte. Et pour aborder le sujet, autant dire que le nouveau bassiste passe également totalement inaperçu sur cet effort.

On se retrouve donc avec un album en demi-teinte, aux trois premiers titres relativement enthousiasmants, puis gros coup de mou qui nous ennuie un peu pour remonter la pente uniquement avec l’avant dernier titre (le nostalgique « Scorpio Curse »), classique mais c’est mieux que rien pour cette petite virée au royaume de Lucifer.

 

Période de vache maigre, même pour les cadors anglais, même si on aura compris l’esthétique de cet album et pourquoi ils sont allés si loin dans leur délire rétro. Le gourou qui pourrait scander haut et fort, entre l’autel, le sang de vierge et les crânes de bouc cette ode au démon, typiquement adaptée pour nos froides et humides journées d’automne -je parle en tant que breton-  s’est fait remplacer par une autre forme d’halluciné, immortalisant par des photos jaunies et des bandes magnétiques poussiéreuses des instants d’un autre temps. Il lui manque le grain de sel pour faire basculer cette invocation en ragnarock, ce sabbath en orgie, cette réunion tupperware en messe noire.

photo de Viking Jazz
le 25/11/2010

8 COMMENTAIRES

cglaume

cglaume le 26/11/2010 à 06:39:23

Attention l'ami, tu vas finir par te faire influencer !! (promis, dernière remarque de ce style ;) )

skorbutt

skorbutt le 08/12/2010 à 11:35:34

Bonne chronique dans laquelle je me retrouve. Riffs peu inspirés, voix trop en avant, production pas top, cette offrande a un gout bien fadasse.

bernard

bernard le 19/04/2011 à 16:34:19

Ca fait un petit moment déjà qu'ils sont plus inspirés ! La recette est facile le tour est vite fait ....

el gep

el gep le 16/02/2013 à 08:58:20

Bande de pisse-glaçons, ce disque est excellent! Le son, enfumé, lointain, désagrégé, est absolument parfait. P.A.R.F.A.I.T. Et l'ambiance de grosse grossse LOOOOOSE qui se dégage de l'ensemble est pas loin d'être géniale.

Crom-Cruach

Crom-Cruach le 17/02/2013 à 01:05:23

Depuis hier, j'ai arrêté la guedro.
Du coup j'écoute plus "Magicien electrique".

Promis je m'y remets bientôt... à la gue...

el gep

el gep le 17/02/2013 à 09:50:17

Je vais être taxé d'hérésie mais j'ai jamais eu besoin de drogue pour apprécier le Wizzzard. Sans dèc', les compos, ici aussi, sont bien bonnes. Même si "We Live" et "Dopethrone", c'est quelque chose, ma bonne dame!

R.Savary

R.Savary le 21/02/2013 à 15:12:02

Ce Black Masses tient surtout par ses 2 "tubes"qui buttent en live : Black Mass et Nightchild. Pour l'ensemble,et même si cet album se laisse écouter, j'ai préféré le précédent Witchcult Today.

el gep

el gep le 20/12/2024 à 22:49:59

Réécouté aujourd'hui... Excellent !
Putain les enfants, faut bien vous dire un truc: y'a des groupes qui n'en ont rien à battre du ''confort d'écoute'' de l'auditeur, de l'auditeur tout court ou des morceaux ''accrocheurs''. Y'a des groupes qui font leur sorcellerie, vont chercher des choses pas agréables, exorcise en musique en créant des choses pas commodes, et c'est bien le but. Mais vous êtes tous trop cons pour le comprendre, ou même juste vous en apercevoir et vous prendre au jeu.00

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