Bak - Sculpture
Chronique mp3 (53:49)

- Style
Prog metal symphonicoriental - Label(s)
Autoproduction - Sortie
2011
Il y a de bonnes chances pour qu’on tombe d’accord sur le point suivant: myspace est carrément mal en point, la faute notamment à une nouvelle interface dont l’ergonomie est aussi légère et pertinente qu’une charolaise affublée de patins à glace. Et puis dites: à quand date votre dernière vraie grosse découverte myspacienne, hein, allez, on fait marcher la boîte à souvenirs…? Le constat est amer et sans appel: 90% des « requêtes en amitié » qui émanent de ce site proviennent dorénavant d'"artistes" Rap’n’Bide ou d’endives pop à gratte acoustique qui ignorent copieusement nos aspirations musicales réelles. Et les 9,9% restant se répartissent entre des formations US de deathcore à mèche et des groupes frenchy de mèche-core deatheux…
Restent ces rares 0,1% qui constituent le mince fil arachnéen nous reliant encore à cette cyber communauté musicale sur le déclin. Vous l’aurez compris lecteurs finauds que vous êtes: aujourd’hui les 0,1% en question nous viennent d’Australie, pratiquent un metal progressif tricoté à partir de soies orientales, de dentelles orchestrales et de barbelés extrêmes, et s’appellent Bak. Alors, et A? (Ami lecteur, oublie immédiatement la phrase précédente qui n’était là que pour effectuer un jeu de mot débile que les humoristes de Télé Z nous ont cédé à bas prix). A l’écoute de Sculpture, premier (non?!?) et dernier album en date du groupe, on se demande bien comment il peut encore exister des formations avec de tels niveaux de maîtrise et d’inspiration et paradoxalement aussi peu de traces laissées de par le Wild Wild Web. Car Bak c’est les 1001 nuits dans votre salon, c'est une bonne vingtaine d’instruments de toutes sortes, c'est un chanteur d'exception ainsi que des chœurs somptueux, ce sont des mélodies à liquéfier une reproduction de David Douillet en bronze, c'est une finesse digne des plus grands relevée d’un judicieux zest de folie (figurez-vous qu’au sein de son pack promotionnel, le groupe fournit une authentique boîte de conserve de flageolets à la vodka – pleine! – à l’étiquette entièrement customisée)! Les lecteurs qui souhaiteraient que l'on déverse la benne à références comparatives se prendraient sur le coin du museau un mariage Orphaned Land / Therion (période Theli) mis au service d’un metal rock prog/post/whatever tripant (j’imagine que si je maîtrisais le sujet, il faudrait que je parle de The Mars Volta, Tool, Porcupine Tree... Mais comme ce n’est pas le cas je ne le ferai pas:) ), le tout saupoudré de l’optimisme sereinement pétillant d’un Devin Townsend et de foufou-teries discrètement Pattoniennes. Et tout ça ne serait pas complet si on oubliait de citer Secret Chiefs 3 dans sa dernière mouture.
Là normalement, vous avez besoin de reprendre votre souffle... Et moi aussi crénom!
Sculpture est un enchantement. Cet album est en effet tout d'abord – puisqu’il faut bien commencer à dérouler la pelote en tirant sur un premier fil – un festival vocal merveilleux où brillent un chanteur sensible et racé capable des élans les plus poignants comme des éructations les plus growlées, une chanteuse plus rare mais précieuse, des chœurs Therionnesques, de douces litanies orientales… Et des instrumentaux (ou quasi) qui ne sont clairement pas là pour la déco' ni pour cacher les défauts de l’édifice! C’est ensuite le théâtre privilégié où s’exprime un guitariste (un seul??) intelligemment virtuose, qui ne place jamais son ego devant ses compositions. Et c’est encore un captivant voyage de par le vaste monde, qui s'attarde plus particulièrement dans des contrées où le soleil tape fort, où les femmes vont d'un pas chaloupé et enivrant, où des mystères aussi excitants que dangereux vous guettent à chaque détour, bref: où l’aventure ne s'arrête jamais. Pas de faiblesse à l’horizon, le voyageur se voyant proposer en alternance de longues épopées haletantes et des morceaux plus immédiats, la variété du propos n’affectant jamais l’inébranlable cohérence de l'œuvre. Et malgré la haute tenue générale, il ressort par endroits de ces moments particulièrement addictifs qui vous font revenir sans relâche vers l’album. Ceux-ci ont pour nom « Why » (le morceau du charmeur de serpents où une apparente indolence ne cache nullement une puissance impressionnante et des mélodies captivantes), « Our Time » (longue pièce mettant en scène un couple de chanteurs époustouflant, ainsi qu’une basse sombrement funky et une salve de riffing thrash saccadé qui s’intègre parfaitement dans un décorum pourtant très typé world music - paf à 5:15!) ou encore « Sands of Time » (mariage ultime de la force du rock et des arabesques langoureuses de mélopées arabisantes). A écouter à genoux, sur le moelleux d'un tapis volant.
Maintenant, toutes ces pages web que nous autres chroniqueurs passionnés couvrons de notre prose fervente ne sont rien d'autres que vaines élucubrations si, au terme d’une chronique comme celle-ci, tu ne vas pas – cher lecteur éclairé – te procurer l'album en question, ou tout au moins écouter des extraits de celui-ci, disponibles notamment sur myspace (écoute-moi Why nom d’un p'tit bonhomme!)... Car Sculpture est une invitation qui ne se décline pas, et une véritable révélation qui est sûre de trouver son chemin dans les classements de fin d’année de ceux qui auront croisé sa route. Si tu aimes te faire bêtement mal, un conseil: passe à côté de cet album. Dans le cas contraire: plonges-y les yeux fermés et les oreilles grandes ouvertes. Perso je retourne (me) passer ce Bak avec mention (!).
La chronique, version courte: Sculpture est une merveille de metal à la fois délicatement progressif, puissamment burné et savamment symphonique, le tout abondamment arrosé d’influences orientales.
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