Japanische Kampfhörspiele - Bilder fressen Strom
Chronique CD album (42:26)

- Style
Melting Pot Death/Grind/Groove/Punk/Fun - Label(s)
Unundeux - Date de sortie
2 janvier 2010 - Lieu d'enregistrement Calles Kellerbar
écouter "Album entier"
Des CDs bradés pour 3 francs 6 sous, des bacs regorgeant de pépites impatientes de venir se nicher dans notre lecteur, des pochettes fortement typées, des noms de groupes déjà croisés au détour de mags ou de webzines … On a tous acheté des albums improbables, d’occase ou en solde. Core&Co profite de l’occasion (ouarf) pour vous livrer ses impressions sur des CDs qui n’auraient peut-être sinon jamais été chroniqués en ces lieux.
Je fais des découvertes grâce aux soldes – épisode 10
Ça faisait un bail, dites, qu'on n'avait plus alimenté les CoreAndColonnes avec le haut de la pile de nos bonnes affaires. Il faut dire que le lapin qui vous parle a de moins en moins souvent l'opportunité de franchir le seuil d'un O'CD (… la chaîne de magasins existe toujours, si j'en crois Google). Et puis avouez que faire les bacs de disques d'occase sur le net, c'est quand même vachement moins excitant... Mais pour le coup, Bilder Fressen Strom constitue une bonne raison d'ajouter un 10e épisode à la série Coup de Foudre à la Braderie d'Lille (… moins surcoté que Notting Hill), cette galette frappadingue, moins purement Grind qu'elle voudrait le faire croire, ayant de sérieux arguments pour convertir les saintes-nitouches habituellement rebutées par les odeurs de fond de squats.
Personnellement, c'est via l'excellent side-project Fake Idyll que j'ai croisé pour la première fois le nom de Japanische Kampfhörspiele, les deux entités partageant leur batteur / beugleur Christof Kather, ainsi que leur guitariste, Robert Nowak (oh que je l'aime ce nom). Et pour ma plus grande joie, la première de ces deux formations n'offre rien d'autre qu'une version un chouia plus foutraque de la musique pratiquée par la seconde. Que l’on étudie la tracklist ou que l'on regarde rapidement ce qui se dit des samouraïs teutons sur le web, on pourrait croire que la musique que ceux-ci pratiquent n'est rien d’autre que du bon vieux Grind de fond d'abattoir, canal anarcho-punk rigolard. Cela a d'ailleurs peut-être été le cas par le passé – la discographie du groupe s'étend de 1998 à 2023, on peut donc imaginer que sur la durée les zigotos aient donné dans le pur Napalm Death-worship. Mais en 2010, millésime de ce 4e album, tout juste un an avant l'arrivée du Therapist de la formation-jumelle, le groupe allemand est bien loin de donner dans la pure orthodoxie Grindcore.
Alors c’est sûr, ces 42 minutes sont découpées en 27 pistes. Et « Der Arsch » (10 secondes au compteur), « Angriff auf die Zivilisation » (21 secondes), tout comme « Rentnerparadies » (un poil plus long) annoncent la couleur assez clairement. OK, Bilder Fressen Strom c’est du grumeleux, et pas mal du Punk aussi. Et pour finir de faire enfiler son habit au moine, on mentionnera encore que derrière le micro c'est l'un de ces duos growl gras du glaviot Vs protestations de pochtron qui éructe sa bière et sa bile. Tout cela suffira sans doute à Philippe Manœuvre pour tirer les conclusions qui s’imposent. Sauf que justement, elles ne s’imposent pas.
D’autant moins que la chose nous est clairement expliquée dès la toute première piste, « Die Schlachtung », 5 minutes 26 et toutes ses dents : 1) la prod’ est grosse comme ça et permet d’entendre jusqu’aux poils de cul du batteur qui frisent sous l’effort (Jacob Bredahl au mix et mastering), 2) la basse est superbement protubérante, 3) les breaks sont nombreux et bien pensés, 4) les assauts sont massifs, façon Death en treillis, 5) la batterie fait dans la finesse, loin des incontrôlables tornades blastées usuelles. Bref, c’est pas de la dentelle, mais presque. À la limite on aurait envie de coller un petit préfixe « Tech- » à l’étiquette stylistique ici accolée (d’ailleurs, si si, on pense à Atheist sur les tortillons de « Dement »). Vous dites ? Pour du Grind on ne dit pas « Tech-Grind » mais « Mathcore » ? Oui mais non, vraiment : rien à voir (à l’exception peut-être du riff TDEP-esque entendu sur « Auto »).
Sur Bilder Fressen Strom il est plutôt question d’un mélange Death musclé mais chiadé / Punk / Groove / Fun, à la croisée de Frightmare, Zoebeast et Illdisposed, dans une version toutefois un poil plus destroy. Même si, c’est vrai, sur un gros dernier tiers nettement plus « à l’arrache », le groupe retombe dans l’absence de sophistication du Grind le plus crasse. Mais ce n’est pas ce que l’on retient de l’album. On garde en tête cette liberté, cette indépendance vis-à-vis des codes, ce côté ludique, ainsi que ces grosses accroches qui font la différence, et peuvent – à l’instar des albums de Nasum – séduire un public plus large que les seuls fans d’Agathocles. Liberté, parce que « Jochbeinbruch » va rouler des mécaniques sur un terrain quasiment Indus, tandis que « Lebendgewicht » se conclut sur une séquence hypnotique habitée par une « flûte » pincée aux sonorités clairement orientales. Indépendance vis-à-vis des codes, parce que les Allemands balancent quand même trois instrumentaux, et que ce type d’exercice n’est pas fréquent chez les grindeux. Ludique, parce que les zozos donnent l’impression de s’en payer une bonne tranche – exemple parmi tant d’autres, « Links », qui entremêle joyeusement les styles (... extrêmes). Et enfin Accrocheurs, car quand même, écoutez donc « Die Kampagne » : il n’est pas merveilleusement perché et complètement irrésistible ce passage « exotique », plein de roucoulantes percus et de bruits de jungle ? Et l’accélération Punk’n’Rock’n’Speed, à 2:04 sur « Supermacht », vous faites comment pour y résister ? Et cette décélération délicieuse, traversée de riffs à la Carcass, à 0:39 sur « Wie geht nochmal ficken » ? Et « Schmerzrakete », son breakdown de mammouth à 0:28, puis son joyeux changement de vitesse à 1:25 ?
Ces gars-là savent clairement comment parler à un festivalier ! Ainsi qu’à un lapin Nawako-extrémiste. Alors si des fois vous aviez tenté l’expérience Fake Idyll et que vous aviez aimé, prolongez le kiff avec Bilder Fressen Strom. Si vous aimez le gras dans sa déclinaison la plus finaude, essayez Bilder Fressen Strom. Si vous ne diriez pas non à un Frightmare ou un Zoebeast plus Grind, essayez Bilder Fressen Strom. Si vous gardez un bon souvenir de One Step Beyond, essayez Bilder Fressen Strom. Si vous écoutez Trollfest à fond pour faire chier les voisins et la masse bien-pensante, essayez Bilder Fressen Strom. Et même si vous ne rentrez dans aucune de ces cases, mais que vous aimez les tartines beurre de cacahuètes / miel, plonger dans la piscine en faisant une bombe de salopard, ou regarder le Gendarme à St Tropez en mangeant des sushis, essayez Bilder Fressen Strom.
(C’est bon, le message est passé ?)
La chronique, version courte : si on observe Bilder Fressen Strom de loin, aux jumelles, on pourrait avoir l’impression qu’il s’agit de Grindcore. Et, allez, c’est vrai que l’esprit est là, au moins en partie. Mais sur ce 5e album, les Allemands de Japanische Kampfhörspiele sont bien trop habiles, rigolards et farfouilleurs pour se sentir chez eux dans cette case. En calant ce dodu CD dans votre platine, attendez-vous plutôt à une version Punk des registres combinés de Frightmare et Zoebeast, auquel il faut ajouter un niveau technique et des accroches plus joufflus que la moyenne.
3 COMMENTAIRES
lapaju le 16/07/2023 à 09:45:35
Excellent album !
Thedukilla le 30/07/2023 à 18:40:47
Ça joue le 15 septembre à la Brat Cave à Lille avec GRUIIIIK et les copains de Filthcrawl, ça va être plein de jus de bonheur et d’odeurs funs !
cglaume le 31/07/2023 à 06:21:28
Ça va clairement sentir le lard grillé 🤘🤘
AJOUTER UN COMMENTAIRE