Russkaja - Turbo Polka Party
Chronique CD album (39:59)

- Style
Fusion vod-Ska Metal - Label(s)
Napalm Records - Date de sortie
3 février 2023 - écouter via bandcamp
Russkaja, c’est la joie de vivRRRe incaRRRnée, avec un accent slave à couper au couteau. Russkaja, c’est un 9,5/10, à un poil de barbe de la note parfaite, attribué à Energia!, l’album du coup de foudre. Russkaja, c’est du Metal de grizzli, du Ska bondissant, de la Polka rigolarde et du Punk truculent. Russkaja, c’est une formation autrichienne fondée par Georgij Makazaria, chanteur né dans la patrie de Stravinsky, et Dimitrij Miller, bassiste ukrainien, celle-ci (la formation, pas Dimitrij – précisons, car on ne sait jamais qui "iel" est) brassant avec tendresse et humour tous les clichés du pays des tsars.
Mais Russkaja ce sont aussi des rendez-vous manqués.
* Des dates annulées, au Glazart en novembre 2015 (à cause d’un manque de préventes ?), puis au Petit Bain en avril dernier (on en reparle quelques lignes plus bas).
* Un album zappé par CoreAndCo, No One Is Illegal, le petit précédent, tout d’abord parce que celui-ci n’était dispo ni sur Bandcamp, ni sous forme de promo non streamé, et puis parce que le gentillet morceau-titre, écouté pour se faire une idée malgré tout, nous avait fait l’effet d’un pet de musaraigne sur un mur de bunker. Et « Love Revolution » – autre extrait notable de la même galette – n’avait pas redressé la barre plus que cela.
* Un split, eh oui, crénom de nom, annoncé en février, parce que l’actualité devenait vraiment trop pesante, et que le groupe – bien que multiculturel, mis sur pied par un duo russo-ukrainien, et prônant activement la tolérance et la mise à bas des frontières – en avait marre de devoir se justifier tout le temps, et commençait à craindre un peu pour ses fesses (…vous savez combien l’humanité comporte en ses rangs de résidus de fausse-couche réfléchissant plus avec les couilles et les poings qu’avec la purée de neurones qu’ils ont entre les oreilles).
Alors j’avoue : si j’ai fini par acquérir Turbo Polka Party, c’est suite à cette bien triste nouvelle, et poussé par quelques critiques élogieuses émanant de mélomanes de mes amis. Et si le contexte s'avère donc bien maussade, ce n’est par contre pas le cas de ce 7e album qui renoue avec la verve et l’énergie communicative du bien nommé opus de 2013. Et l'on peut dire que cette cuvée nouvelle commence sur les chapkas de roues (… ou bien dit-on « sur les chapeaux d’Russes » ?). Avec l’archétypal « No Borders », sur lequel le groupe, mené par l’éternel ogre bienveillant Georgij, déroule tout le spectre russkajien : pêche Metal, mélancolie positive, refrain aussitôt-entendu-aussitôt-repris, et discours universaliste. Puis arrive coups sur coups les deux plus grosses tueries. « Russki Style », qui allie gouaille Rock’n’Roll énorme, Ska Metal qui bute, groove de gros ours bourru, facéties et poudre de Kremlin-pinpin. Puis « Shapka », qui montre un vrai regain d’inspiration, taquine le registre des Dirty Shirt, et moshe dru lors d'un refrain sur lequel intervient une voix autre, de plus en plus sarsippiussesque au fur et à mesure que le morceau avance.
Puisqu’on évoquait les Dirty Shirt, continuons le parallèle en passant en revue « Vozdukh », morceau dont le riffing Néo et le featuring (de l’omniprésent Benji de Skindred) renvoient au « Pretty Faces » des Roumains. De featuring il est également question sur l’excellent « Senales », morceau à l’éclatante bonne humeur hispanique, interprété en compagnie des Allemands de Le Fly. La collaboration avec Micha Rhein d’In Extremo s'avère un peu moins pétillante par contre, celle-ci ayant entraîné l’écriture du titre le plus lacrymo-tristoune de l’album. Mais on leur pardonne cet écart poils-mouillés-et-regard-torve-de-cocker : après tout, peut-il y avoir russophonie et pas un seul de ces moments où le verre et le cœur se brisent de concert ? Bien qu'un peu facile et trop plein de Nananaï caricaturaux, on se marre quand même en découvrant la reprise de « Last Christmas » – oui oui, le titre de Georges Michael, ici copieusement enskaïfié... Il faut reconnaître que Georgij fait un Père Noël particulièrement convainquant. Et puis ça bleuaaargle dans le fond par moments, et ça, ça n’a pas de prix !
Mais on ne vous quittera pas sans signaler la beuverie typique « Paschli », un « New Life » plus narratif, plein d’espoirs et de lendemains qui chantent, et surtout ce « Turbopolka » qui – il n’ont pas renouvelé l’erreur – nous permet de quitter le navire sur un dernier gros coup de boost, le réservoir plein à craquer de vitamines métallico-cuivrées.
… Putain quelle idée de nous laisser ainsi en plan ! Espérons que Poutine s’étranglera vite en mangeant son bortsch, ou qu’il glissera bientôt sur une savonnette dans un hammam tchétchène, que ce putain de conflit se termine enfin, et que le groupe fête ça en se reformant : ça me casserait sérieusement les noisettes que cet album soit le dernier, et que je n’ai pas l’occasion d’aller kazatchoker devant une scène où ces doux-dingues se produisent !
La chronique, version courte: malheureusement, Turbo Polka Party est le chant du cygne de Russkaja. Un chant du cygne plein de panache, qui retrouve quasiment le niveau d’énergie explosive d’Energia!. Un dernier tour de piste le front haut, pendant lequel – tout en n’abandonnant jamais ce mélange fondateur de Metal, de Ska, de Punk et de Polka – le groupe nous offre un ultime shoot de bonne humeur musicale, se renouvelant sans pour cela avoir à se réinventer. Des au revoir à la fois tristes et joyeux, donc… notre espoir étant que la fin (… heureuse !) du conflit russo-ukrainien ressuscite ce collectif qui a autant à voir avec Poutine que Berlusconi avec le féminisme militant.
2 COMMENTAIRES
noideaforid le 24/05/2023 à 13:28:46
Et un nombre incalculable de "putain de tubes"!
J'ai une question par contre, est ce que tu as un auto challenge d'arriver à mettre le mot "poils" au moins une fois dans tes chroniques ? 😀
cglaume le 24/05/2023 à 13:41:16
Cherche pas, c’est freudien 😅
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