Winfield + Seeds Of Mary + We Shot First le 03/11/2017, Orient Express, CAEN (14)

Winfield + Seeds Of Mary + We Shot First (report)

Winfield et Seeds Of Mary ensemble sur la même affiche dans un bar caennais... Tiens, tiens, comme c'est bizarre, cette vieille impression de déjà-vu... Ah mais oui, bien sûr, c'était en février 2016, cette date-même qui m'avait permis de découvrir le second groupe bordelais que je ne connaissais absolument pas. Petit coup de cœur d'ailleurs au passage. Un peu plus d'un an et demi après, la collaboration bordelo-caennaise récidive, chacun défendant son nouvel album respectif sorti cette année. Le tout pour un prix totalement dérisoire – trois petits euros – c'est qu'il aurait été dommage de s'en priver !

 

Si l'année dernière, c'était le sous-sol moite et puant le veau en sueur du El Camino qui accueillait ce joyeux plateau, c'est désormais l'Orient Express qui prête un bout de sa salle. Habituellement connu par la part la plus noctambulo-festive des étudiants et autres amateurs de billard – l'établissement en étant richement équipé – il s'agit bien d'une première pour moi de fouler ces lieux pour un concert. Même s'ils ont déjà accueilli des affiches plutôt étonnantes comme par exemple Freak Kitchen par le passé... Et je vais être honnête d'emblée, j'espère d'ailleurs que cela sera la dernière. Certes, il y a plus de place, une meilleure acoustique et un vrai plateau donc un meilleur confort tant pour les musiciens que pour le public par rapport au bar qui les accueillait l'année précédente. Mais bon sang, pourquoi n'avoir foutu aucune séparation – alors qu'il y avait des rideaux non déployés en place – séparant la scène du reste de la salle ? Et avoir poussé le bouchon plus loin à entreposer des tables et chaises à 7 ou 8 mètres de la scène ? Ah oui, leçon du parfait commercial : « un usager attablé sera plus propice à aller commander une nouvelle conso au bar dès lors qu'il l'aura fini alors qu'un spectateur devant la scène en plein concert aura plus tendance à la faire durer, voire attendre la fin de la prestation avant de se réapprovisionner ». J'imagine que ce genre de prérogatives mercantiles – car il est vrai qu'il n'a pas du tout de clientèle ce bar en dehors de ça, misère ! – sont supérieures au respect des artistes qui ont loué la salle qui doivent se contenter de jouer entre trois et trente courageux pèlerins debout devant la scène. Tandis que toute une masse est tranquillement installée en bout de fosse, comme si un Patrick Sébastien allait nous présenter son Plus Grand Cabaret Du Monde. Voire, regarde furtivement sur les côtés entre deux balancements de queues tape-boules (de billard hein...). Et aux gens de donner raison à cette sale mentalité commerciale en se laissant berner : vous êtes dans un concert de rock ou quoi bordel ? Après, par rapport à une époque, il faut admettre que l'Orient Express accueille moins de concerts, on comprend bien mieux pourquoi maintenant... Car mon petit doigt me dit – enfin les principaux intéressés, fortement agacés, me l'ont fait comprendre après leur prestation – que l'on ne reprendra plus Seeds Of Mary à y remettre les pieds. Pas dans ces conditions en tout cas. Voilà pour le côté vilain coup de gueule.

 

« Oh mais ce ne serait pas Seeds Of Mary qu'on a déjà vu une fois au El Camino ? » me souffle l'ami à côté de moi devant la formation sur scène qui avait déjà bien entamé son set à notre arrivée un peu tardive. Eh bien, même si j'admets ne pas avoir écouté leur nouvel album, j'ai écarquillé des yeux ronds comme des billes. Comment passer d'un grunge/rock 90's très Alice In Chains à un rock à l'américaine calibrée dans la droite lignée des Foo Fighters qui, en plus, se payent le luxe de reprendre du Parkway Drive ? Petite compassion : la bonne quarantaine du compère explique sans doute ce manque cruel d'oreilles et de réminiscence auditive. Car c'est bien devant We Shot First que nous sommes, groupe plutôt jeune qui nous vient du Havre et ne possède qu'une démo à son actif. De bonne facture d'ailleurs même si elle montre un groupe très loin de réinventer la poudre et manque quelque peu de personnalité musicalement parlant. Mais petit « espoir naissant » pour le Havre car les mecs sont solides et bien dans leurs baskets, ce qu'ils ne manquent pas de faire savoir en configuration live. Le nerf de la guerre pour ce style de musique qui ne me parle pas plus que cela personnellement sur disque. Pourtant, le contexte ne se prêtait pas forcément à se démener plus que cela. We Shot First a pris sur lui et a fait son truc avec énergie et sympathie, le tout avec un son qui restera constant toute la soirée d'ailleurs. Et ce, même s'il n'y avait que deux ou trois pèlerins aux abords de la scène. Chapeau bas !

 

On passe à Seeds Of Mary – les vrais cette fois – qui n'a pas beaucoup plus de chance non plus en terme de ramassage de curieux à ses pieds puisqu'on doit bien être une douzaine à braver les quelques mètres séparant la scène et les tables. Leur nouvel album, The Blackbird And The Dying Sun, vient à peine de sortir de façon officielle qu'ils viennent déjà en défendre ses lettres de noblesse. Mieux encore, les Bordelais misent tellement sur ce deuxième album long format qu'ils l'interprètent dans sa quasi-intégralité ce soir, délaissant complètement son répertoire plus ancien. Pari audacieux s'il en est puisque chaque personne du bar – moi y compris, n'ayant pas eu le temps d'écouter mon exemplaire promotionnel que notre Pidji en chef m'a envoyé peu avant mon départ pour ladite soirée – se retrouve face à un ensemble de morceaux qu'il ne connaît absolument pas. Bon, après, la population connaissait-elle leur album et EP précédents, il y a fort à parier que non. Il n'empêche que d'une certaine manière, je n'aurais pas dit non à une petite lichette de « Freak Show » ou de « God And A Gun » tirés de Choose Your Lie pourtant fort efficaces en live. Un regret vite mis de côté car il faut admettre que découvrir un nouvel album directement sur les planches est un exercice hyper intéressant et dont on ne peut se targuer de le faire tous les soirs avant de rentrer boire son eau chaude sous la couette. Et maintenant que j'ai tellement potassé le pendant studio qu'une chronique repose dans les colonnes invisibles du site, je peux carrément le dire : ce second méfait sonne bien comme la maturité pour Seeds Of Mary. Et les bougres doivent en être pleinement conscients tant ils ne s'efforceraient pas à autant le représenter sur les planches. Une configuration qui par ailleurs en révèle tout le potentiel puisque l'on défausse totalement la production pas tip top de la galette au profit d'un son plus dynamique et organique. Ce qui donne à toutes ces compositions une plus grande énergie et une plus grande richesse émotionnelle. Parce que les Bordelais sont carrés, maîtrisent leur propos et n'y vont pas par le dos de la cuillère. Peu de monde devant eux, ce qui ne les empêche pas de se démener comme des beaux diables devant les rares présents. Tout en tentant de rallier les fonds de régiment à sa cause, en les sollicitant verbalement entre les titres, le guitariste et le vocaliste allant même jusqu'à quitter la scène et les trouver en face. Effort plus que vain, les culs restant vissés sur les chaises par une glue modèle « extra forte ++ ». Tant pis, même si déception il y a, ils continuent quand même et le cachent plutôt bien, rendant honneur au petit troupeau avant, un peu timide – et n'ose accompagner le chanteur dans son quatre-pattes sur « Like A Dog » – mais pas moins enthousiaste. Déception et frustration trahies en toute fin de prestation où le batteur, ne pouvant pas contenir son agacement plus longtemps, en jette sa baguette aux abords de scène de dépit. Et a semblé fort surpris de la retrouver quelques minutes plus tard dans mes petites mimines au merch'. Un point dont je ne pourrais pas leur reprocher tant j'ai trouvé cela également fort dommage. Alors que les Bordelais nous ont livré une excellente prestation, carrée dans l'interprétation et chaleureuse de communication, ils méritaient d'être davantage suivis, à l'instar de l'année dernière où l'ambiance était fort moite.

 

Winfield prend le relais. Retour au bercail pour les Caennais après sa petite tournée avec ses prédécesseurs de scène où ils défendent eux aussi leur second album long format, Rock'n Roll Ist Krieg, sorti plus tôt cette année. Les ayant entrevus le weekend précédent au Conquérant Metal Fest, j'ai pu constater rapidement qu'ils n'avaient rien perdus de leur capacité naturelle à mettre l'ambiance. Ce qui explique pourquoi le troupeau avant s'est quand même davantage étoffé pour en arriver à une bonne trentaine de carcasses avant même que le combo ne joue son premier accord. Certes, ça semble modeste mais difficile de prétendre à mieux dans ces conditions. Et en cela Winfield cache très bien sa frustration – à supposer que les mecs en avaient d'ailleurs – de cet accueil mi-figue mi-raisin. Parce qu'avec eux, c'est ça : devant 200 pois sauteurs ou 2 touristes cul-de-jatte, c'est toujours la fête, la bonne humeur et le rock'n roll aussi con qu'efficace. A même se demander s'ils n'ont même pas transformer leur banal local de répétition en véritable sauna permanent juste à coup de riffs ! Et le public ne peut se contenter de rester statique tant ça cause et ça encourage à se lâcher avant de lui-même lâcher sa sauce musicale. Un bon rock'n roll des familles. Simple, cradingue, énergique et par conséquent fédérateur pour toute bonne fosse qui se respecte. Si, bien entendu, sur album, on restera plus mesuré dans le sens où cela reste fort classique dans son genre et ne fait qu'office de prétexte à étoffer et varier des setlists de concerts, il faut admettre que ça envoie grave lors de ces derniers. Ça déménage, ça sue, ça joue tellement sur les clichés – le plus volontairement du monde – que ça en devient badasse. Du vrai fun en barre qui défoule et qui donne bien soif, voilà comment résumer une prestation de Winfield. Et pour ce soir, c'est d'autant plus le cas car si une personne debout pouvait encore poser un peu de réticence, les Caennais pouvaient compter sur les mecs de Seeds Of Mary et We Shot First pour débouler in-extremis et, hyper beaux-joueurs, foutre le bordel. Tant dans la fosse à headbanguer comme des fous jusqu'à provoquer du slam et du circle pit que sur scène à assurer les chœurs en se tapant la pose avec les six-cordistes et bassiste. Envahissement qui n'embête nullement les Normands, « c'est des putains de potes après tout ! ». Bref, même si quelques âmes supplémentaires se sont laissées tenter à rejoindre les rangs en cours de prestation, il est étonnant de constater à quel point le feu peut être mis à une concentration si faible de troupes. Comme quoi, tout est une question de volonté et dans cette dernière prestation, les trois groupes à l'affiche, de manière plus ou moins directe ont su imposer une bien jolie fête. Et pour ça, un grand bravo !

photo de Margoth
le 09/12/2017

1 COMMENTAIRE

cglaume

cglaume le 10/12/2017 à 08:06:51

Ah la frustration de voir un groupe méritant s'escrimer devant 3 pèlerins et une armée de siroteurs de bière indifférents, ça donne envie de destribuer les baffes...

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