Crowborn - It Just Is

All of These Bees… de Breakfast Epiphanies, Unclog Me de Plunger, les délires des superbes zinzins de Dazy's Fasulia... Les découvertes réalisées grâce à une surveillance assidue du tag « funk metal » sur Bandcamp sont aussi juteuses qu’elles sont régulières (… écrire « fréquentes » serait mentir, par contre). C’est pourquoi votre CoreAndCopinou de lapin continue sans relâche à exploiter ce filon. Ce qui le conduit aujourd’hui encore à sortir de son chapeau un pur produit du web-underground : It Just Is, premier EP 3 titres de Crowborn. Et si on s’arrête aujourd’hui spécifiquement sur celui-ci, vous vous en doutez : c’est qu’il s’agit à nouveau de l’une de ces petites pépites qui mériteraient que l’on entonne tous en cœur « Quand je pense à Baaaand-campeuh, je fais ‘rnandeuh, je fais ‘rnandeuh… » (Mettez-y du vôtre hein, sinon je vais être obligé d’arrêter définitivement ces calembours à 5 centimes d’euros !).

Outre le « funk metal » évoqué dans le paragraphe précédent, l’EP en question se voit décoré des tags « Cambridge » (en effet, nos zozos sont anglais), « groove metal » (GROOOOSSE influence Pantera à babord) et « hard rock » (on en reparlera au moment de causer des 2 derniers titres). Et ces quelques étiquettes suffisent effectivement à nous mettre sur la voie où Crowborn roule sa bosse et son roc. Mais confirmons plutôt la chose en effeuillant la tracklist : vu sa taille modeste, on ne me reprochera pas de track-by-tracker.

« It Just Is », morceau-titre qui endosse légitimement la responsabilité de donner son nom à l’EP, est l’uppercut qui couche l’auditeur et le force à lâcher un « WouAAwh ! » malgré lui. C’est que le bestiau riffe gras et gros, comme si l’on était plongé au beau milieu de l’un des pics d’intensité de Cowboys From Hell. ‘de dieu, c’est Dimebag qui riffe ou bien ? Ça sent la gouaille texane, la sueur au ‘sky, les phalanges qui démangent… Bagaaaaarre !!! Sauf que, attendez voir : voilà-t-y pas que le morceau breake d’un coup !?? Et c’est parti dans le plus insouciant et le plus léger des Funk Metal, quoique toujours soutenu par une section rythmique épaisse comme un steak de bison, comme si les Red Hot ou Incubus avaient mis un tigre (une panthère plutôt !) dans leurs riffs. Ou comme si Phil Anselmo et ses potes avaient tenté de placer un clip sur MTV entre « Epic » et « Violent & Funky » ! Ce panard, les copains !!!

Sauf que le tag « hard rock » nous prévenait que la Fusion crowbornesque n’allait pas se contenter d’une bipolarité Groove’n’Funk Metal : dès « Stay In Your Lane », on sent en effet que la basse slappée c’est cool, mais que le cuir et les Harleys, c’est ‘achement bien aussi. Du moins est-ce ce que nos Anglais doivent penser. Car si la disto dorénavant de rigueur pourrait tout à fait émaner d’un Pantera plus nettement southern, on sent bien que ce virage trouve plutôt sa justification dans un amour immodéré pour le bon vieux Hard Rock à papa, celui qui accompagne les bikers pendant leurs parties de billard au fond du rade Chez Mimile. Ça pue le Black Label Society tout ça, aéré de sonorités « désertiques » qui donnent l’impression d’apercevoir le ciel bleu, là-haut, entre les sommets du canyon au fond duquel on bivouaque. Il est loin, soudainement, le Funk Metal. Mais il faut reconnaître que c’est pas mal du tout…

C’est alors à « Statues » de conclure… Et initialement il faut bien avouer qu'on affiche une franche moue : ne serait-ce pas une version du pauvre de l’entame de « It Just Is » qu’on entend là ? Quoi : le groupe serait déjà à court d’idées ? Mais une basse slappée vient vite nous rassurer. Ça, et un regain d’énergie qui donne l’impression que les riffs panteresques sont dorénavant boostés par une énergie plus moderne, forgée à parts égales sur le trampoline de Trepalium et au cours des trips hypno-séduisants des moins robotiques des disciples de Meshuggah… C’est que c’est bon tout ça dites-moi ! Et l’avantage c’est que les trois dimensions de la personnalité des Anglais s’expriment à présent de concert, le visage Funk Metal ayant, il est vrai, dorénavant plus à voir avec Mindfunk ou Psychefunkapus qu’avec Infectious Grooves. Alors évidemment, l’impact n’est pas le même que celui de « It Just Is », d’autant que certains passages introspectifs flirtent rythmiquement avec le point mort. Mais ce groove chaleureux, cet arrière-goût de poussière, cette poigne velue et ce pied qui ne peut s'empêcher de marquer le rythme remportent bientôt nos suffrages...

Je sais bien: Groove Metal comme Funk Metal ne sont plus fashion depuis au moins une génération (… mais on s’en branle de la mode, pas vrai ?). Et pour le Hard Rock graisseux il faut remonter à plus loin encore (… pas taper Papy !). Pourtant It Just Is est foutrement réjouissant – sans parler de ce morceau-titre qui est tout bonnement é-norme ! Voilà donc un EP qui prouve qu’on peut faire du putain de neuf qui bute avec du vieux-mais-pas-miteux… Alors on recycle, on composte, on va fouiller dans les males du grenier, et surtout on soutient ce petit groupe qui le vaut bien !

La chronique, version courte: on sort tout ce qui reste dans le frigo, on balance dans une marmite, on touille avec la guitare… Et putain que c’est bon ! C’est la recette simple mais judicieuse de It Just Is, premier EP 3 titres de Crowborn, qui mêle la poigne massivement poilue du Groove Metal, l’insouciance ensoleillée de la scène Funk Metal, et les bottes poussiéreuses du Hard Rock de biker. Pantera meets les Red Hot meets Black Label Society : et ça bute, mais oui !

Cglaume

le 13/04/2023