Metallica - Live Shit: Binge & Purge

Pour rater l’info concernant les trente ans du cinquième album de Metallica, le Black Album, Metallica, appelez-le comme vous voulez, il faut le faire exprès, ou alors vivre dans un autre siècle. La presse surtout, mais également une large partie des media s’en sont fait le relais. Rien n’est épargné au fan, le phénomène aux plus de trente millions d’exemplaires vendus, est décortiqué dans ses moindres détails: la couleur du mediator de James Hetfield sur le quatrième riff de « Holier Than You », l’accordage de la caisse claire pour « Wherever I May Roam », la longueur des cheveux de Jason Newsted ou la taille des sloggy de Kirk Hammett… Bref, presque tout a été écrit sur le sujet, je ne vais pas en rajouter une couche, même si ça aurait pu être un bon choix pour marquer la rédaction de ma cinq-centième chronique pour COREandCO. Pour cela, je vous laisse profiter de la bibliographie pléthorique disponible sur le sujet, d’autres ont écrit beaucoup mieux que moi sur le sujet.

Non, je vais plutôt me concentrer sur l’une des nombreuses manifestations de la mainmise des Four Horsemen sur le monde du Metal. Suite à la sortie de l’album, le groupe s’embarque pour une tournée de plus de deux ans. Sorti à l’automne 1993, le gargantuesque coffret Live Shit: Binge & Purge vient couronner ces quelques 295 dates à travers le globe. Outre les trois CD des concerts à Mexico (1er et 2 mars 1993), on y trouve les enregistrements vidéo de deux concerts, San Diego (13 – 14 janvier 1992) et Seattle (29 -30 aout 1989, sur la tournée …And Justice For All), accompagnés de nombreux goodies. Sur cette tournée, Metallica joue près de trois heures, sans première partie, et ces soirs-là, il se produit devant un public de 20 - 26 000 personnes.

Le groupe est ultra rodé par des mois de tournée et il se dégage de toute sa prestation une sensation de facilité. L’intro traditionnelle « The Extasy Of Gold » de Morricone résonnent dans dans le Palacio de los Deportes avant que le riff d’ « Enter Sandman » ne déboule et mette les choses au clair: la puissance de feu de Metallica est intacte et le son est massif, il écrase tout sur son passage. James Hetfield est très en voix, avec son timbre inimitable et fait preuve d’une aisance déconcertante dans sa communication avec le public mexicain. Il ne faut pas attendre bien longtemps avant qu’il ne balance son premier « Fuck » glissé au milieu des paroles du titre. Très judicieusement suit le biblique « Creeping Death » qui permet au bassiste de donner de la voix (même si certains trouvent qu’il chante comme un personnage de dessin animé) mais également au public, chaud comme un feu de camp scout, de répondre aux sollicitations de Jaymz sur les refrains et surtout pour les fameux « DIE ! » en fin de titre. « Harvester Of Sorrow » vient rivaliser en lourdeur avec un « Sad But True » tubesque.

Ce sont donc pas moins de vingt-quatre titres qui sont joués à la perfection par un groupe au somment de sa forme, mené par un James Hetfield dans des chaussons quand il s’agit de s’adresser à la foule. Il ne faut pas être grand clerc pour comprendre que la simplicité des structures des morceaux du Black Album (dont six sont interprétés) est une réaction à l’extrême sophistication de celles de l’album précédent (le groupe avouera que pendant la tournée Damaged Justice, il a trouvé le temps long lors de l'interprétation de certains titres). Ce qui explique qu’hormis le « Harvester… » cité plus haut et « One », …And Justice For All se retrouve réduit à un medley. Ses albums plus anciens sont quant à eux assez équitablement représentés, même si « Master Of Puppets » n’est joué qu’à moitié. Les solos de basse et de guitare sont l’occasion de mettre la lumière sur les talents de musicien de Jason Newsted (l’éternel New Kid) et de Kirk Hammett (quand on regarde les vidéos, on réalise qu'il est bon de ne pas être une de ses guitares…).

Le set se déroule, parfait équilibre entre passé et présent jusqu’à « Seek And Destroy », tiré de Kill’em All, et ses 18’08, qui voit le groupe jouer avec le public, Hetfield descendant dans la fosse pour faire chanter / crier / beugler des Mexicains remontés comme un matheux devant une rythmique de Meshuggah. D’ailleurs, le public n’a pas encore pris cette habitude (que je trouve assez déplorable) de chanter certains riffs ou chorus de guitare (sur ceux de « Fade To Black » ou « One »). Pour faire redescendre la pression, le groupe enchaîne avec une version sur-vitaminée de « Whiplash » suivi de « Nothing Else Matters », le morceau qui a cristallisé un grand nombre de haines et de rancœurs à l’encontre des Mets et de leur nouvelle orientation. Il ne se départit pas pour autant de niaque et enchaîne avec le lourdingue « Wherever I May Roam » avant d'entamer la fin du set un peu plus « décontractée », avec quatre reprises (Diamond Head, Anti-Nowhere League, Misfits et Queen) et des anciens titres dont un « The Four Horsemen » dantesque. « Stone Cold Crazy » expédié à une vitesse supersonique est une conclusion parfaite d'un set monstrueux.

J'avais tout juste quinze ans quand est publié ce Live Shit, il n'est donc pas surprenant que les cassettes ripées aient longtemps squatté mon Walkman, m'accompagnant sur le chemin du lycée, bien plus que l'album éponyme. On pourra en dire ce qu'on voudra, la dimension dans laquelle il l'a propulsé est une étape logique au regard du boulot abattu par les musiciens depuis leurs débuts. Grand public, mais sans concessions.

Bon anniversaire.

Xuaterc

le 03/10/2021