Gross Reality - Return To Ruin
Chronique CD album (46:19)
- Style
SF Prog Thrash virtuose - Label(s)
Divebomb Records - Date de sortie
08 septembre 2023 - Lieu d'enregistrement Jamie King Audio
- écouter via bandcamp
« Tube de Juvamine désespérément vide ? Stock de Viagra épuisé ?
Fond de bouteille sec comme un ultimatum administratif ?
En plus vous êtes dans une zone non desservie par Über Spliff ?
Pas de panique : un massage auriculaire à base de jus de Thrash, et ça repart ! »
C’est vrai : quoi de mieux pour s’auto-botter le cul qu’un bon vieil album qui riffe à fond de train ?
… Sauf qu’il faut bien dire les choses telles qu'elles sont : trop souvent, l'opus Thrashus Vulgarus use de clins d’œil aussi convenus que surabondants à Kreator, Slayer et/ou Vektor, ce qui ne laisse plus beaucoup de place à l’imagination… Or la nouveauté, les surprises, il en faut, de temps en temps, pour entretenir la flamme !
C’est à ce moment précis de nos réflexions qu’arrive la cavalerie / Zorro / Batman / Gross Reality, le superhéros de nos envies de frais. Car si le groupe galope sur des tempos qui peuvent régulièrement déclencher le flash des radars, il sait se distinguer des nombreux Speedy Gonzales constituant le gros du peloton. Ces Américains (ils crèchent à Pittsburgh) aiment en effet raconter des histoires, faire briller l’argenterie, et parsemer leur steak saignant de savoureuses plantes aromatiques.
« C’est bien beau tes images, là, mais ça n’aide pas vraiment à comprendre de quoi il s’agit ! »
Imaginez qu’après avoir été séduit par le Order of the Illuminati d’Agent Steel, Darkane (époque Expending Senses) se consacre plus spécifiquement au Thrash, et mette ce dernier au service d’une odyssée spatiale ayant l’ambition d’un Operation Mindcrime (cf. Queensrÿche)… Ça en jetterait, pas vrai ? Eh bien cette séduisante construction de l'esprit donne une vraie bonne idée de ce qui se passe au cours des trois quarts d’heure que dure Return To Ruin. Mais avant de continuer, consacrons un rapide paragraphe à décrire le QUI et le QUOI (vous n’avez qu’à zapper celui-ci si vous n’avez cure des CV et autres éléments de contexte).
Gross Reality a commencé à rugir en 1991, et ce jusqu’en 1996. Sans jamais rien sortir d’officiel, mais en foulant des planches accueillant également Bolt Thrower, Cannibal Corpse, Confessor ainsi que Type O Negative. S’ensuivirent donc un split (en 1996, donc... 'faut suivre !), reformation (en 2009), puis la sortie d’une démo, d’un EP, et à présent non plus seulement 2, mais bien 3 albums ! Pas de nom de musicien fameux à vous livrer en pâture, pas de Grammy ni de signature chez EMI : juste des putain de riffs ! Ainsi que, côté textes, les tribulations de deux « psychonautes » (c’est comme un cosmonaute, sauf qu’il voyage dans sa tête, grâce à son dealer) qui vont de bad trips en hallus sévères, ce nouvel épisode se situant quelque-part entre Stargate, La Planète des Singes et Matrix (… ainsi que Very Bad Trip, donc). Là, vous savez tout ce qu’il faut savoir sur les décors et les costumes.
Le « Melodic Galactic Thrash » mitonné par ces Américains est confectionné à partir de guitares qui nous riffent au fond des boyaux, d'ambiances follement narratives, d'un savoir-faire certain livré sans ce manque d’enthousiasme qui vient parfois avec les années, et de quelques belles prouesses techniques, pour un résultat qui mérite les lauriers « Prog » sans la lourdeur sur l’estomac qui accompagne parfois la prise de cette consistante pilule. Parmi les pièces les plus marquantes que vous traverserez pendant la visite de ce fastueux édifice musical, observez plus attentivement les belles œuvres de marqueterie offertes par « Soul Substance », ses mystérieux détours qui n’entravent en rien l’expression d’une puissance phénoménale, ses langueurs townsendiennes à 1:55, ses riffs cinglants, et ses quelques magnifiques moments de grâce. Admirez les dorures Flamenco qui illuminent « Prison Planet » à 3:41. Vibrez sur les couplets fonceurs de « Mind at Large ». Ecarquillez les yeux sur les détours plus ostensiblement SF Prog de « Time Portals », qui emprunte aussi bien au Voivod fougueux des débuts qu’à Pink Floyd (ce riff frelonneux, à 1:56, a déjà fait retentir ses échos sur The Wall). Vibrez face à la détermination affichée par le morceau-titre, et sur ce revirement Death Metal manifesté sans aucune ambiguïté en fin de course. Puis terminez, pantelant, sur les presque 9 minutes, pluvieuses et pourtant lumineuses, de « Solitary Hyosis ».
Ai-je évoqué les broderies aussi incessantes qu’élégantes des guitares leads ? Non ? C’est à présent chose faite.
Eh oui, tout ça date de la rentrée 2023. Du coup c’est cramé pour jouer les fines lames à la pointe de l’actualité musicale. Mais 'crévindiou – comme dirait le père Marcel du champs d’à côté – quand c’est aussi délicieusement parfumé, telle une jupette consentante un soir de labour, on ne regard’ point si la lune est déjà levée, ni si la donzelle a les genoux croutés : on profite à plein de l'instant présent, et on ponctue la fin de l'aventure avec un râle de contentement.
Bref : allez-y, c’est d’la bonne !
La chronique, version courte : Return To Ruin, c’est un peu l’album que Darkane aurait pu écrire si, après avoir été séduit par le Order of the Illuminati d’Agent Steel, les Suédois s’étaient consacrés plus spécifiquement au Thrash, et qu’ils avaient mis ce dernier au service d’une odyssée spatiale ayant des ambitions à la Operation Mindcrime (cf. Queensrÿche)… En clair : ça bute, ça riffe tous azimuts, ça met du youpi dans l'calbut.
2 COMMENTAIRES
Black Comedon le 27/11/2024 à 11:36:53
Eh bien quel bonne surprise, alors que j'avais prévu d'écouter pour la 15eme fois le dernier album d'Opeth pour statuer si il finira en tête de mon top 2024 devant le fabuleux album des Américains de Denver. Et bing du Thrash Prog avec un timbre de voix que je n'avais pas entendu depuis longtemps (Divine Decay, Maximize Misery, chouette album, pochette ignoble) et des passages qui m'ont fait penser à du Alchemist (si j'en avais pas écouté ce week end, j'aurais pas eu la réf) et tout le reste si bien décrit dans cette belle chro.
Merci pour la découverte !
cglaume le 27/11/2024 à 11:39:14
Toujours heureux d'aider à ce qu'un album rencontre son public 🙂🤘🤘
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