DRAKK METAL FEST (Black Bomb A + Primal Age + Mars Red Sky + Misanthrope + Otargos + Opium Du Peuple) le 22/03/2024, Bonjour Minuit, SAINT BRIEUC (22)
Black Bomb A + Primal Age + Mars Red Sky + Misanthrope + Otargos + Opium Du Peuple
Vendredi 22 mars 2024Salle : Bonjour Minuit
SAINT BRIEUC (22)
Saint-Brieuc est une discrète bourgade grisâtre de par sa pluie et son granit, coincée au fond d’ une immense baie naturelle la parfumant, à l’occasion, des odeurs salines du grand large. Elle s’anime paisiblement de ces 50 000 âmes comme le font toute ces villes moyennes. 50 000 âmes, c’est sans compter celles, errantes, des suicidés qui sont la spécialité locale. La « ville aux sept vallées » offre, par ce fait, beaucoup de ponts pour qui veut y sauter ; beaucoup d’arbres pour qui veut s’y accrocher. Saint-Brieuc, c’est aussi un squat mythique, le Wagon, dont les cendres se ravivent maintenant dans « L’Autre Monde », un festival mythique, le Carnavalo, ressuscité depuis 2017 et des punks à droite à gauche.
Saint-Brieuc, c’est le paradis des cramés du ciboulot.
C’est dans ce décor que se plante, pour la première fois, le Drakk Metal Fest qui avait accosté en terre normande pour les deux premières éditions. Accueillie par la SMAC Bonjour Minuit, l’équipe du Drakk, dirigée par le patron de Mad Breizh Production, étale les hostilités sur deux jours en cette fin du mois de mars: Punk, Death, Black, HxC : l’affiche, variée dans les genres et les renommées, est alléchante. S’y rendre était une obligation.
Vendredi 20h.
Le week-end commence avec les Orléanais d’Orpheum Black œuvrant dans un prog-rock cinématique. Le quintet soigne son esthétique autant que sa prestation et enchaîne les titres langoureux. Les riffs teinté de rock s’entremêlent avec les lignes éthérées du synthé alors que le duo au chant s’offre à un jeu de question/réponse très bien rodé et énergique. J’irais même jusqu’à dire que c’est un tantinet théâtral. Ce n’est pas spécialement mon genre de prédilection mais cela reste un bon set d’ouverture, la salle se remplissant petit à petit.
Ils laisseront place aux Bretons de Druids of the Gué Charette. Changement d’ambiance radical. Psychédélisme, chamanisme et post-punk seront ici de mise. La scène se remplit d’une multitude de racks à pédales, de totems et thérémine quand les quatre encapuchonnés prennent subitement place pour screamer sur des boucles fuzzées. Entre « rock de surfer sous prod’ » et post punk, le mariage est ici réussi et nous envoie loin, très loin dans les tréfonds obscurs du cosmos psychique, le tout avec l’arrogance du punk que rien n’arrête. Vous voyez le genre ? Il est assez difficile de mettre des mots sur leur musique, mais pourtant, pourtant, l’expérience est réellement éprouvante [au sens premier du terme].
On restera dans la chaude distorsion avec les Bordelais de Mars Red Sky et leur stoner sensible. D’une humilité déconcertante (et même touchante), le trio nous assomme d’entrée de jeu avec ses basses pilonnées par les fûts de MatGaz. Venus présenter Dawn of the Dusk, le trio sera déroule avec aisance et parcimonie son set qui sera plus que correctement réceptionné par le public. Le chant de Julien Pras, sur vinyle, réussi avec brio à imposer sa fragilité dans cet ensemble bourdonnant et exprime avec beauté une grande sensibilité qui nous heurte en plein cœur. Autant vous dire qu'en faire l’expérience live démultiplie les choses. Autrement dit : la petite heure passe très très vite, étouffés dans cette (petite) salle de 400 places.
Le set à peine terminé que la troupe d’Opium Du Peuple s’affaire, telle une fourmilière, à installer son matériel alors que Slobodan, raconte à qui veut l’entendre (entre deux accolades) ses anecdotes sur Saint-Brieuc y compris et notamment au Wagon. Ce n’est pas la peine de présenter ni le groupe ni le genre pratiqué. Les néophytes venant à l’aveugle n’ont pas été déçu quand Joey Délices et Mademoiselle coeur ont débarqué encapuchonnées et sautant comme des cabris. Le spectacle [le terme est juste] commence sur les chapeaux de roues. Défilent alors, dans une folle énergie punk, les mythiques reprises qui ont fait (et font encore) la renommée d’ODP. L’autodérision est ici le maître-mot. Gil de la Tournante, comme d’habitude, se prend des savates, accompagné ici de Burno à la gratte pour 3 dates. Ne faisant l’impasse sur aucune partie de sa discographie, ODP nous parle donc de La Fistinière et de Dominique, arborant les multiples costumes adéquats. Un véritable spectacle vous dis-je qui clora la soirée dans une apothéose d’énergie punk vitale (et revitalisante)
Samedi 17h30
C’est sous un temps plus que couvert que je pénètre à nouveau dans l’enceinte du site aménagée pour l’occasion pour les metalleux/coreux bordelais de Praetorian qui aiment qualifier leur musique de punch metal. Malgré leur quinzaine d’année d’existence, j’en fais la découverte à l’occasion. La prestation que le quartet délivre est plus qu’honnête. Un circle pit dans le premier quart d’heure et un wall of death en guise de conclusion ; on fait largement pire en terme d’ouverture de festival. Si on met de côté l’aspect too much du decorum ( oui, les polos floqués, les blasers floqués, les étendards floqués, le back drop floqué, c’est un peu redondant), le combo, chantant en français, nous fait donc passer une petite heure forte agréable et nous permettra de nous chauffer pour Primal Age.
HxC bas du front mais pas des idées, les gaillards issus du bocage normand nous font le plaisir de venir faire leur dernière date 2024 avant de rentrer en phase de composition. Trente ans que la bande de vegan/edge milite pour la cause animale à coup de riffs à pogo. Nous concoctant une setlist chronologique retraçant leur carrière ( le terme n’est pas volé!) les cinq buveurs de jus de pommes s’amusent pendant une heure à enjailler la fosse qui, pour le coup, est ultra réceptive (une bonne partie ayant pris soin de faire macérer son jus, m’voyez?). Bonne ambiance pour travailler les adducteurs et le cardio, le tout dans un sérieux remugle de sueur.
19h30. Otargos vient calmer les ardeurs et déroule son beumeu fantastique ( dans toute les nuances du terme). Changement radical de public qui va venir ici travailler son muscle sterno-cleido-mastodien. Autrement dit : hocher de la tête les bras croisés. Je ne pourrais faire qu’une partie du set, devant m’éclipser pour cause d’interview avec la tête d’affiche. Idem pour Akiavel, qui passera à la trappe pour cause... de file d’attente pour manger. On touche ici un des (rares) points négatif du week-end : trop peu de food-trucks pour rassasier la fosse, ce qui engendre des files d’attente assez longues.
Une fois mes obligations journalistiques faites, je suis de retour dans la fosse pour les vieux briscards de Misanthrope qui nous balance son metal extrême durant une heure. Philippe Courtois de l’Argilière, aussi bavard que serein, entrecoupe chaque piste d’un souvenir, d’une anecdote, d’une explication. Et mon dieu qu’elles sont nombreuses ! De ‘1666’ à ‘Bâtisseur de cathédrales’, une grande partie de la prolifique discographie est ici jouée ce soir. Sans autre apparat que la qualité de leur musique, le quatuor se fera un malin plaisir de nous éructer le mal-être et les tourments de la psyché humaine dans la grandiloquence littéraire qui leur est propre. Un bon moment donc, que le groupe partage volontiers avec la fosse cherchant sans cesse une proximité sincère.
L’heure passe très vite et arrive enfin la tête d’affiche, venue défendre son huitième album, sortant six jours plus tard. Il ne faudra guère plus que quelques minutes pour que Black Bomb A enflamme la fosse. Tous leurs albums ne se valent pas, certes, mais une chose est sûre : c’est toujours plaisant de les voir live. La machine est rodée, le duo de frontmen soulève la fosse avec facilité et le bordel est rapidement mis. Les joints tournent autant que les gens dans un nuage de fumée, de sueur et de bière. Bonne ambiance donc. Les pistes d’Unbuild the World ont l’air d’être très bien réceptionnées de la part du public. Public qui reprendra en chœur le traditionnel ‘Mary’ avant de repartir, pour la plupart, sur des tentatives, certes vaines mais non dénuée d’entrain, de toucher frénétiquement leurs coudes avec le bout de leurs pieds tout en jetant son prochain. Bref. Ambiance adéquate pour qui veut se défouler.
Les festivaliers finiront donc rincés, mais au vu des sourires affichés, plutôt satisfaits. Et en faisant le bilan de week-end, ils peuvent l’être ; satisfaits. Une belle affiche, éclectique et de qualité, une orga qui tient la route et des services et locaux d’une SMAC qui, pour les pratiquer régulièrement, sont très agréables. Que demander de plus ?
Des food-trucks supplémentaires et une édition 2025 !
0 COMMENTAIRE
AJOUTER UN COMMENTAIRE