Compilation - Memoria - A tribute to the alternative 90's

Superbe initiative que ce Tribute initié par l'excellent label, jeune mais ingénieux, Yr Letter Records. Celui-ci, soucieux d'une certaine qualité et ne versant donc pas dans un quantitatif qui lui aurait porté préjudice, a en effet eu l'idée de réunir la crème de la scène française, plus quelques figures de proue étrangères, pour reprendre à leur façon dix-sept standards des 90's. On ne peut qu'être touché par cette démarche, d'une part parce qu'on connait tous, à l'exception de quelques jeunes écervelés ne jurant que par la scène anglaise actuelle, l'importance et la richesse des 90's, et d'autre part au vu des groupes sollicités pour l'occasion.

En effet, et si l'ensemble n'est bien évidemment pas exhaustif, on retrouve ici des formations comme Gâtechien, Powell, Luis Francesco Arena ou Atomic Garden côté français, ou encore Frank Turner ou Lead Orphans, pour faire court, hors de nos frontières. Chacun y va de sa reprise, et si certains prennent peu de risques, comme Gâtechien avec le "Bombtrack" de RATM (la cover n'en étant pas moins captivante, porteuse de la folie du duo et lui seyant donc à merveille) ou Dead Pop Club pour l'énorme "I was dreaming" des Thugs (superbe choix, certes assez fidèle mais "dynamité" par la vigueur du groupe) ; l'ensemble est de haute tenue et fait honneur non seulement à Yr Letter, mais également aux formations mises en scène, remettant de plus au goût du jour une époque encore fortement présente dans les mémoires.

On pourrait d'ailleurs s'arrêter à chacun des morceaux exécutés, dont ce superbe et poignant "When you sleep" (My Bloody valentine) repris...à la guitare acoustique par Walter Schreifels, magnifique, ou "Be Quiet And Drive (Far Away)" des Deftones, interprêté de manière complètement plânante et délicate par Jonah Matranga, ou encore Frank Turner et sa version exaltée du "Sally" de Kerbdog. On s'enthousiasme pour le choix, par Atomic Garden, du "Grudge" de Mega City Four, compréhensible quand on sait les liens qui unissaient Wizzz, ce personnage génial, et le trio clermontois, et l'énergie affichée par le Billy Gaz Station de Mat' Gaz sur sa reprise des Posies ("Grant Heart", morceau déjà référentiel à l'origine). Powell surprenant et passionnant son monde avec un relookage total et entièrement réussi du "Head To Wall" - Feat. Cyesm de Quicksand, spatial et doté de zébrures guitaristiques acides, splendide.

Quoiqu'il en soit, c'est l'intégralité de ce Tribute qu'il importe d'honorer et de mettre en avant, aucune faute de gout, aucun faux-pas dans le "covering" n'étant à déplorer. Bien au contraire, on ne peut que se rendre compte, à l'écoute, de l'excellente tenue de notre scène, et des gouts imprenables de ses membres, dont Luis Francesco Arena et sa relecture acoustique chatoyante de Far ("I like it"). On se réjouit aussi de la présence d'un morceau des Babes in Toyland, l'énorme "Dust Cake Boy", repris avec fougue par Mr Moustache, et bien sur d'"Aneurysm" de Nirvana, que Novels joue assez fidèlement, mais de façon marquante et en insistant avec à-propos sur le côté noisy de cette chanson.

Il est à noter que l'éclectisme, en plus de choix parfaitement judicieux, est de mise et résume remarquablement la teneur et la diversité sonore et stylistique liée aux 90's, entre le "Fuzzy" de Grant Lee Buffalo repris avec sensibilité par Lula Fortune, le "Foreign Devils On The Silk Road" de Chokebore, superbement chanté par une voix féminine, signé Run Ronie Run. Ou, pour compléter la liste, DevonMiles et son "Getchoo" (Weezer,est-il besoin de la rappeler?) fidèle et passionné. Sans oublier Cooper et son choix d'un titre de Jawbox ("Static"), et bien sur Down to Earth pour ce "Let me Drown" (Soundgarden) puissant et bien en phase avec le répertoire de la révélation française. Et pour finir, Lead Orphans qui opte pour "Corduroy" de Pearl Jam et apporte lui aussi une contribution étincelante à ce Tribute abouti et judicieux, tant dans les choix effectués que dans les orientations voulues. Vive les 90's...et merci à Yr Letter Records, ainsi qu'à l'ensemble des intervenants.

Refuse to keep silent

le 06/11/2009